Service de police de l’agglomération de Longueuil

« On change le mandat et la mission du travail policier »

Le Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL), déjà connu pour ses approches innovatrices, amorce un virage majeur qui fera en sorte que, d’ici 10 ans, seulement la moitié des policiers répondront aux appels 911 tandis que l’autre moitié travaillera dans la communauté.

Ce nouveau projet, qui fait partie d’une démarche de changement de culture entreprise il y a quelques années par le SPAL, s’appelle RESO, pour réseau d’entraide sociale et organisationnelle. Il débutera le 24 octobre avec une patrouille de 24 policiers qui feront un stage d’immersion, sans arme et sans uniforme, d’une durée de six semaines.

En janvier 2022, les policiers retrouveront leurs armes et leurs uniformes et seront affectés à un secteur bien précis de la ville pendant de nombreuses années.

« Ces policiers vont vivre dans la communauté, explique le directeur du SPAL, Fady Dagher. Donc, pas d’appels 911. Ils vont être à pied ou à vélo et vont travailler dans des quadrilatères de la ville, où on sait qu’on a des problématiques récurrentes, soit de santé mentale, d’itinérance, d’intégration ou d’exclusion sociale. »

« Leur rôle principal sera de côtoyer les familles, les groupes communautaires, les gens de la rue, certains partenaires, et de voir les problématiques émergentes. Ils vont travailler en amont, donc de façon proactive, pour éviter la criminalisation, les appels au 911, les crises et les interventions physiques musclées qui peuvent finir par un drame. »

– Fady Dagher, directeur du Service de police de l’agglomération de Longueuil

« Un des secrets, c’est que le policier n’est pas un travailleur social, mais il doit être un acteur social », poursuit-il.

Ce projet, financé à hauteur de 3,6 millions sur trois ans par le gouvernement du Québec, est « une première » dans l’histoire de la police au Québec, croit le directeur Dagher.

Il a été annoncé par la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbault, et le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant.

« C’est un projet avant-gardiste, un projet qui pourrait jeter les bases d’un nouveau modèle policier au Québec et qui […] pourrait à terme, si tout se passe bien, servir aussi de modèle pour d’autres organisations policières. »

– Geneviève Guilbault, ministre de la Sécurité publique

La mairesse de Longueuil, Sylvie Parent, est du même avis. « Je pense que ça va venir changer à jamais le service de police chez nous. Le but, c’est de dire comment on peut bonifier ce type de police et comment on pourra par la suite transposer ça dans d’autres corps de police ici au Québec », dit-elle.

Une police de concertation

Pour le directeur Dagher, ce projet va plus loin que la police communautaire. « Ce n’est pas de la police communautaire. Ce n’est pas de la police de proximité. C’est de la police de concertation, dit-il. On change le mandat et la mission du travail policier. »

Les 24 policiers seront sélectionnés en fonction de critères bien précis.

« On va chercher des personnes qui ont vraiment envie de faire ce travail, qui ont la main au cœur, qui veulent servir la population avec une grande ouverture d’esprit, peu importe les origines, les orientations sexuelles, la classe sociale de la personne, détaille M. Dagher. Donc, des personnes qui ont un côté humain très développé. Des gens avec une très grande autonomie, un désir de servir et de prendre soin des gens, et qui sont capables de travailler dans des zones grises, donc vraiment dans l’intelligence émotionnelle très poussée. »

Le SPAL prévoit évaluer sa patrouille chaque année avec des critères de performance. Si le nombre d’appels 911 baisse, le nombre de policiers RESO augmentera pour atteindre, d’ici 5 à 10 ans, la moitié des 300 agents du service de police.

Une patrouille hybride, composée d’un policier et d’un travailleur social, sera aussi mise sur pied pour répondre aux appels en santé mentale.

La Fraternité des policiers et policières de Montréal a fait savoir qu’elle allait « observer cette expérience avec grande attention ». De son côté, le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) n’a pas réagi.

— Avec La Presse Canadienne

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.