Vos questions, nos réponses

La vaccination des tout-petits

Le Canada a approuvé jeudi le vaccin de Moderna contre la COVID-19 pour les enfants de 6 mois à 5 ans. Celui de Pfizer, soumis à Santé Canada le mois dernier, est toujours en cours d’examen. La décision soulève toutefois des questions dans la population, notamment chez bon nombre de parents. Quatre spécialistes en immunologie nous aident à y voir plus clair.

La vaccination des jeunes enfants est-elle vraiment nécessaire ?

« C’est certain que c’est un groupe qui est moins sujet à faire des infections graves, mais ce n’est pas impossible », dit d’emblée Alain Lamarre, professeur-chercheur spécialisé en immunologie et virologie à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS).

Depuis le début de l’année 2022, 1128 enfants de moins de 10 ans ont été hospitalisés en lien avec la COVID-19 au Québec et deux ont succombé au virus, selon les données de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ). « Si on peut éviter ça, c’est important de le faire », dit Lamarre.

« Il ne faut pas oublier que les enfants peuvent souffrir de COVID-19 longue », ajoute Lionel Berthoux, professeur de virologie et maladies infectieuses au département de biologie médicale de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). « C’est clair que les bénéfices de la vaccination sont toujours supérieurs au risque », résume-t-il.

Le vaccin est-il efficace chez les jeunes enfants ?

Dans les études cliniques, le vaccin de Moderna s’est avéré efficace à 50,6 % pour prévenir la COVID-19 chez les participants âgés de 6 à 23 mois. L’efficacité descendait à 36,8 % chez les participants âgés de 2 à 5 ans, alors que celle du vaccin de Pfizer était de 80,3 % à condition d’avoir trois doses. Toutefois, l’efficacité du vaccin contre les formes graves de la maladie demeure très élevée chez les deux fabricants. « C’est surtout ça qui est important », dit M. Lamarre.

Quels sont les effets secondaires des vaccins chez les jeunes enfants ?

Lors d’essais cliniques de Pfizer et Moderna réalisés chez des milliers d’enfants, les effets secondaires le plus fréquemment signalés comprenaient la douleur, la rougeur et le gonflement au site d’injection, la fièvre, l’irritabilité, la somnolence, la perte d’appétit, la fatigue, les maux de tête, les douleurs musculaires, les frissons, les nausées/vomissements, les raideurs articulaires et le gonflement des ganglions lymphatiques. « Il n’y a eu aucune complication sérieuse pour ces milliers d’enfants », dit M. Berthoux.

Par ailleurs, il ne semble pas y avoir un risque accru de myocardite, une inflammation du muscle cardiaque, ni de péricardite, une inflammation des tissus entourant le cœur, à la suite de la vaccination comme c’était le cas chez les jeunes hommes et les adolescents.

Les doses du vaccin COVID pour les enfants sont-elles les mêmes que pour les adultes ?

Non, le dosage est différent. Avec Pfizer, chaque dose contient 3 microgrammes de vaccin à base d’ARNm, comparativement à 30 chez les adultes. Pour Moderna, la dose se limite à 25 microgrammes, contre 100 chez les adultes. « Le système immunitaire des enfants est très réactif et bien performant, donc on a besoin de moins d’antigènes. La réponse immunitaire demeure largement adéquate », dit M. Lamarre.

« C’est une bonne nouvelle que la dose soit adaptée en fonction de l’âge, puisque ça limite le plus possible les effets secondaires », renchérit le DNicholas Brousseau, président du Comité sur l’immunisation du Québec et médecin-conseil à l’Institut national de santé publique.

Qu’en est-il des bébés de moins de 6 mois ?

Ils n’auront pas accès au vaccin, indique le DBrousseau. « Par contre, les femmes enceintes y ont accès et en se faisant vacciner, elles peuvent donner une certaine protection, soit certains anticorps, à leur bébé par leur placenta », explique-t-il. Moderna prévoit également tester son vaccin chez les enfants âgés de 3 à 6 mois.

Si votre enfant a contracté la COVID-19 récemment, devrait-il se faire vacciner dès maintenant ?

Non, répondent unanimement les experts. « C’est inutile de se faire vacciner à court terme si l’enfant l’a contractée récemment. C’est la même chose chez les adultes », dit Denis Leclerc, professeur de biologie médicale à la faculté de médecine de l’Université Laval.

« Je dirais que pendant huit semaines, il n’y a pas d’urgence. Si les enfants ont eu le virus il y a quelques semaines, c’était probablement Omicron [ou ses sous-variants], donc ils pourraient se permettre d’attendre à la fin de l’été », estime M. Lamarre.

Le Comité sur l’immunisation du Québec devrait présenter ses recommandations sur la question sous peu, précise le Dr Brousseau.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.