L’artificialité de la pénurie de main-d’œuvre du Québec

Même si la pénurie de main-d’œuvre au Québec existait avant que la crise sanitaire fasse rage au sein des économies du monde, le phénomène se retrouve désormais aggravé à un point de rupture. Pas moins de 94 % des entreprises du Québec affirment avoir un enjeu d’embauche de personnel, peu importe leur taille et leur secteur d’activité, dans toutes les régions de la province, selon le Conseil du patronat du Québec.

Nous devons passer à l’action.

Et bien que plusieurs facteurs externes soient fréquemment montrés du doigt pour expliquer ce dénouement, si nous regardons de plus près, on arrive à une constatation importante : la pénurie de main-d’œuvre n’est pas le problème en soi. Celle-ci n’est que le symptôme principal d’un problème plus délicat, soit un enjeu d’identification de talents, d’allocation de ressources et d’association aux bonnes entreprises.

On parle ici de l’embauche du personnel hautement qualifié – les acteurs de l’économie de l’innovation québécoise – qui soutient les entreprises en démarrage, les entreprises centrées sur la technologie, et les secteurs clés qui contribuent à l’avancement de la nouvelle économie du Québec. C’est dans ces industries que l’on retrouve la solution clés en main à ce problème. Des industries qui étaient en pleine ébullition pré-COVID-19.

Pour que le Québec puisse réellement tirer le plein avantage de cette économie de l’innovation, la mise en place d’un mécanisme favorisant une collaboration accentuée en matière de recherche appliquée entre nos entreprises, le gouvernement et nos établissements postsecondaires sera primordiale.

Cultiver une ligne directe de la recherche à l’entrepreneuriat pour les PME d’ici

Donc si la demande est clairement présente, voire désespérée, vers où devrions-nous nous tourner pour l’offre ?

La COVID-19 a mis en lumière les secteurs économiques par excellence qui joueront le rôle principal dans notre relance : l’industrie 4,0, les technologies propres, l’intelligence artificielle et l’informatique quantique, pour n’en citer que quelques-uns.

Et le Québec regorge de talents inexploités dans ces secteurs, tant du côté postsecondaire que du côté entrepreneurial. Le réel défi consiste à combler le fossé entre les deux.

Or, l’indicateur clé du succès dans cette lutte sera les taux de succès à mobiliser nos différents acteurs afin d’aider les entreprises du Québec à innover en créant une pépinière de talents, et ainsi améliorant leurs compétences et en élargissant leurs réseaux. Voilà le cœur d’une solution à la pénurie de main-d’œuvre.

Que ce soit par le dévoilement de l’un des premiers laboratoires d’innovation en commerce au détail au Canada ouvert au public à l’Université McGill ou par les succès d’entreprises québécoises qui brillent à l’international tout en investissant dans du personnel hautement qualifié d’ici, tels que les Medicago, Humanitas et Menya de ce monde, le Québec continue de faire preuve de grande ingéniosité entrepreneuriale.

Mais il reste encore beaucoup de travail à faire.

Renforcement des partenariats stratégiques

La communication et la sensibilisation auprès des PMEs seront aussi de mise, alors qu’il n’est pas toujours évident de réconcilier les différences et d’éliminer les murs idéologiques et pratiques qui existent depuis longtemps entre le secteur privé et l’enseignement supérieur.

En aidant les entrepreneurs à comprendre les avantages économiques concrets de la collaboration avec le milieu universitaire, par exemple dans un contexte de stage d’innovation, on se prête de façon totalement organique à un riche partage de connaissances qui permet non seulement de tisser des liens encore plus forts entre les deux groupes, mais qui facilite également l’accumulation d’expérience professionnelle auprès de jeunes chercheurs et étudiants, qui figure parmi les qualités les plus recherchées lors de l’examen des candidatures dans le cadre d’un processus d’embauche.

Une solution à portée de main

Le Québec dispose actuellement de tous les outils nécessaires pour rayonner à l’échelle mondiale, et les conditions sont réunies pour concrétiser sa place comme un concentrateur d’innovation. Nous avons un secteur privé à la recherche de main-d’œuvre hautement spécialisée, des institutions postsecondaires de renommée mondiale dotées de chercheurs à la fine pointe de leurs domaines respectifs, un écosystème d’accélérateurs et d’incubateurs d’entreprises motivées et pleinement équipées, une économie rebondissante et des élus qui, par leurs engagements et leurs investissements jusqu’à maintenant, semblent vouloir être de la partie. Il ne nous manque que la volonté collective de donner vie à cette vision.

Il suffit de collaborer étroitement avec les divers acteurs du secteur afin de bien comprendre les besoins des entreprises.

C’est en ciblant des solutions et des projets sophistiqués à long terme basés sur la recherche de demain, mais qui répondent directement aux défis des entrepreneurs sur le terrain aujourd’hui qu’on arrivera à favoriser la croissance et l’innovation au Québec.

C’est en ce sens que nous pouvons ainsi réellement envisager de bâtir une économie parmi les plus avant-gardistes et prospères au monde.

Voilà pourquoi le discours de la pénurie de main-d’œuvre du Québec est artificiel. Un argument d’homme de paille en quelque sorte. L’économie future du Québec, l’économie qui marquera les prochains jalons de développement économique de la province, est déjà bien établie. Et elle est plus que prête à restimuler l’économie. Il suffit d’ouvrir les yeux et d’oser voir un peu plus loin devant.

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