COVID-19

« Le réseau de la santé est à bout de souffle »

« Le réseau de la santé est à bout de souffle », reconnaît le premier ministre François Legault, prévenant qu’une levée de certaines restrictions sanitaires sera possible seulement lorsque le nombre d’hospitalisations et de nouveaux cas de COVID-19 aura diminué. Et ce n’est pas demain la veille, selon la tendance actuelle.

En conférence de presse mardi, François Legault s’est dit « prêt à à peu près tout faire pour réduire la surcharge de travail » des infirmières. Mais il est hors de question de leur accorder des hausses salariales supérieures à l’inflation, a-t-il précisé, 24 heures après que des membres de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) ont bloqué simultanément le pont Jacques-Cartier à Montréal et le pont de Québec.

« Je comprends la fatigue, la frustration des infirmières, a-t-il réagi. Je comprends qu’on a promis en campagne qu’il n’y aurait plus de temps supplémentaire obligatoire, mais vous le savez, on est dans une situation spéciale », alors qu’il y a toujours pénurie d’infirmières et que l’on se retrouve en pleine pandémie.

Dans le cadre des négociations pour le renouvellement des conventions collectives, le premier ministre promet des « efforts financiers » pour alléger le fardeau des infirmières. Il a toutefois prévenu que le gouvernement n’a pas les moyens en même temps d’accorder des hausses salariales supérieures à l’inflation.

« On n’est pas capables de faire les deux. Il faut respecter la capacité de payer des Québécois. On ne veut pas augmenter les impôts et les taxes. »

— François Legault

Le premier ministre a rappelé que le déficit de l’année en cours atteindra 15 milliards de dollars et que le retour à l’équilibre budgétaire est prévu dans cinq ans.

Or, la FIQ a fait des salaires un enjeu majeur des présentes négociations : elle réclame des augmentations de 12,4 % en trois ans (sa demande initiale était de 21,6 %). L’offre du gouvernement s’élève à 5 % sur la même période.

François Legault a prévenu que les restrictions sanitaires, certes « difficiles », devront être maintenues un bon moment. Le mois dernier, il avait demandé aux Québécois un effort particulier pendant 28 jours, afin de limiter les contacts sociaux. L’échéance arrive la semaine prochaine. Questionné pour savoir ce qu’il adviendra le 28 octobre, le ministre de la Santé et des Services sociaux, Christian Dubé, n’a pas laissé présager un relâchement, indiquant que c’est impossible de donner une réponse claire à ce stade-ci.

Tout en se disant ouvert à quelques petits ajustements aux règles ici et là, François Legault a servi un avertissement clair.

« Les Québécois doivent comprendre que ces mesures-là, on va les garder en place jusqu’à tant qu’on voie le nombre de cas diminuer, le nombre d’hospitalisations diminuer. »

— François Legault

C’est loin d’être le cas.

Le Québec a rapporté mardi une hausse marquée de 33 nouvelles hospitalisations. Le total des patients hospitalisés atteint 565 au Québec. Il s’agit de la plus forte hausse du nombre d’hospitalisations depuis le 5 octobre. À cette date, 36 hospitalisations avaient été enregistrées.

Le cap des 100 patients aux soins intensifs est maintenant atteint. C’est une hausse de huit cas par rapport à la veille.

Onze décès s’ajoutent au bilan. Cinq sont survenus dans les 24 dernières heures, auxquels s’ajoutent sept autres enregistrés entre le 13 et le 18 octobre. Un décès est toutefois retranché, puisque l’enquête a démontré qu’il n’était pas attribuable à la COVID-19. La majorité de ces nouveaux décès sont survenus dans la grande région de Montréal. Au total, 6055 Québécois ont succombé à la maladie.

Un plateau, mais des tests en baisse

Après avoir augmenté de façon importante, le nombre de cas confirmés rapportés quotidiennement oscille autour des 1000 par jour depuis deux semaines et demie. « L’inquiétude qu’on avait, il y a trois semaines, de voir monter ça à 1500, 2000, ça ne s’est pas réalisé, heureusement », a affirmé François Legault.

Mardi, 877 nouvelles infections ont été rapportées, mais 90 cas « saisis antérieurement » ont été retirés, puisque « le résultat aurait dû être négatif », a indiqué le ministère de la Santé. Ces cas seront retirés « graduellement », en fonction de la date où ils ont été confirmés. Pour l’heure, le cumul des infections atteint 95 216.

Le nombre de prélèvements, lui, est en forte baisse par rapport aux derniers jours. En date du 18 octobre, le Québec n’en avait réalisé que 16 291. C’est le plus petit bilan à cet égard depuis le 7 septembre. Dans les cinq derniers jours, la moyenne frisait les 25 000 tests de dépistage. Christian Dubé a fait valoir que la Santé publique compte maintenant 1600 employés pour faire le traçage ; ils étaient 800 auparavant. Selon François Legault, 1 million de Québécois ont téléchargé l’application de notification Alerte COVID.

Pendant que la région de Québec a recensé 92 cas mardi – près de trois fois moins par rapport aux 272 infections rapportées lundi –, Montréal a enregistré 273 nouvelles infections. C’est une hausse marquée par rapport à la veille, alors qu’on avait confirmé 193 cas.

Selon le directeur national de santé publique, le DHoracio Arruda, environ 46 % des éclosions proviennent des milieux de travail. Il soupçonne un relâchement du respect des consignes sanitaires dans les entreprises. Il a fait un nouvel appel à la vigilance. « La saison de la grippe s’en vient. Je vais vous le dire, ce n’est pas le temps de commencer à surcharger nos hôpitaux », a-t-il ajouté.

Alors qu’une poignée de manifestants opposés aux mesures sanitaires se sont réunis devant son domicile jeudi soir dernier, le DArruda a confirmé qu’on a lui « offert dès le départ une protection avec chauffeur et garde du corps, compte tenu de l’analyse qui est faite par la Sécurité publique en lien avec différentes menaces qui ont déjà eu lieu et qui continuent à avoir lieu ». Il bénéficiait déjà de cette protection le printemps dernier.

Une centaine de CHSLD et de résidences touchés

Le gouvernement signale que la COVID-19 est présente dans 40 CHSLD, 66 résidences privées pour aînés (RPA) et 11 ressources intermédiaires, où au total plus de 570 personnes sont atteintes de la maladie. À Lac-Mégantic, le CHSLD Du Granit se trouve dans le palier rouge d’établissement « en situation critique » ; on y recense 15 infections, soit 34,9 % des résidants. En Montérégie, le dossier du centre du Comté-de-Huntingdon est suivi de près ; on y recense 9 infections, pour un total de 17 % des résidants. En ce qui concerne les RPA, cinq établissements – trois en Montérégie, un dans Lanaudière et un en Estrie – comptent entre 29 % et 57 % de résidants infectés, ce qui les classe au palier rouge.

Christian Dubé a reconnu que la liste des cas dans ces établissements que le gouvernement rend disponible n’est pas à jour. Cette liste ne rend donc pas compte de l’état réel de la situation. Le 7 octobre, La Presse faisait état d’importantes éclosions dans des résidences et des CHSLD qui ne figuraient pas dans la liste gouvernementale disponible sur le web.

En conférence de presse, Christian Dubé a expliqué qu’il dispose d’une « liste opérationnelle » fiable, actualisée constamment, pour lui permettre d’avoir un état des lieux précis. Or, les données qui y sont contenues ne sont pas transférées automatiquement dans la liste « publique », dont les informations proviennent d’un « ancien système ». Il s’est engagé à ce que la « liste opérationnelle » soit publiée au cours des prochains jours. « Il n’y aura plus deux listes, il va y avoir une liste pour qu’on puisse être informés », a-t-il promis.

COVID-19

Dépistage dans les écoles

L’Université de Montréal lance cet automne un programme de dépistage sérologique de la COVID-19 dans des garderies et des écoles primaires et secondaires de quatre quartiers de Montréal – Beaconsfield, Hochelaga-Maisonneuve, Montréal-Nord et le Plateau Mont-Royal. Des écoles et garderies seront sélectionnées et les parents des enfants seront contactés pour participer à l’étude. Les tests sérologiques, qui se font sur un échantillon de sang, permettent de déterminer si une personne a des anticorps contre le SARS-CoV-2, le coronavirus responsable de la COVID-19. Ces anticorps témoignent d’une infection passée, mais n’assurent pas nécessairement l’immunité. — Mathieu Perreault, La Presse

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