Épargner presque 3000 $

Réduire le gaspillage alimentaire à la maison reste probablement le meilleur moyen d’économiser et de contrecarrer les effets de l’inflation à l’épicerie. Toutefois, deux récents rapports indiquent que nous gaspillons toujours trop.

Épargner à l’épicerie représente un défi de taille, alors il faut faire preuve de créativité.

D’abord, le Conseil de la transformation alimentaire du Québec (CTAQ) et le Conseil canadien du commerce de détail (CCCD), par l’entremise de la firme Léger, ont présenté la semaine dernière un constat assez clair sur le gaspillage alimentaire dans les ménages québécois. Comme il s’agit d’un sondage, personne ne s’est rendu dans les résidences pour vérifier et mesurer l’ampleur du gaspillage, mais le rapport nous offre de très bons indicateurs. Le sondage vise les ménages québécois seulement, mais des résultats similaires peuvent aussi s’observer ailleurs au pays. Nous gaspillons énormément. Environ 58 % de tous les aliments produits au Canada, soit 35,5 millions de tonnes, sont perdus ou gaspillés, et plus de 40 % de ce volume est gaspillé par les consommateurs.

Les conclusions du rapport sont aussi prévisibles que déconcertantes. D’abord, l’oubli semble constituer le plus grand problème. En connaissant mal l’inventaire du réfrigérateur et du garde-manger, le consommateur perd des aliments. D’ailleurs, 51 % des Québécois jettent de la nourriture par oubli, ou à cause d’une mauvaise gestion de l’inventaire alimentaire domestique.

Les foyers à revenus élevés avec ou sans enfants présentent les pires comportements liés au gaspillage. La vie effrénée des parents incite peut-être au gaspillage. Seulement 22 % des ménages prétendent ne pas gaspiller du tout.

Les dates de péremption constituent le deuxième facteur qui pousse les gens au gaspillage. En effet, 40 % des ménages jettent de la nourriture lorsque les dates de conservation arrivent à échéance. Les jeunes de 18 à 34 ans gaspillent davantage, à 50 %. Étonnamment, 69 % des gens sondés avouent consommer des produits après la date limite d’utilisation. La chaîne britannique Morrison’s vient d’éliminer les dates de péremption sur le lait, incitant les consommateurs à utiliser leurs sens, l’odorat, la vue et le goût, pour leur gestion de risque. Morrison’s est la première chaîne à adopter une telle politique… il y en aura sûrement d’autres.

Finalement, 9 % des personnes interrogées avouent jeter de la nourriture parce que le produit n’offrait pas le goût espéré. Attentes trop élevées ou pur caprice, peu importe, le résultat est le même.

Et cette semaine, Recyc-Québec nous a offert de nouvelles données, avec toujours le même constat. Nous gaspillons trop. Plus de 40 % des aliments deviennent des résidus alimentaires, et les familles québécoises en sont l’un des principaux responsables.

Le message se résume simplement : il suffit de manger tout ce qu’on achète, autant que possible. Mais en réalité, avec la vie que nous menons, c’est plus facile à dire qu’à faire. Il faut y penser, y réfléchir, en parler, et surtout s’ajuster.

Personne ne gaspille volontairement. La grande majorité des gens souhaite gaspiller le moins possible, cela va de soi, mais le mode de vie peut parfois compliquer les choses. Avec l’inflation alimentaire excessive, le gaspillage prend une importance particulière. Plus de 71 % des ménages québécois veulent moins gaspiller en raison des prix élevés à l’épicerie. Une société qui valorise la nourriture gaspille moins.

Pour manger tout ce que l’on achète, il faut congeler, planifier et, surtout, penser à l’argent perdu. Selon certaines estimations du groupe VCM International, en Ontario, un ménage moyen au Canada peut gaspiller l’équivalent d’environ 3000 $ de nourriture par année. Cela représente trois fois la somme supplémentaire que chaque ménage devra débourser en raison de l’inflation alimentaire. Le gaspillage alimentaire est la seule facture que nous ne recevons jamais, mais que nous devons payer chaque jour.

Pour réduire le gaspillage alimentaire, il faut miser sur la conscience et non la culpabilité. Il faut en parler et développer de nouvelles technologies, au détail, en restauration et même dans nos résidences. Il existe des solutions. Que ce soient les étiquetages ou les réfrigérateurs intelligents informant le consommateur sur la présence de pathogènes ou l’incitant à utiliser des applications comme Flashfood, FoodHero ou bien TooGoodToGo, chaque geste compte. L’éducation devient aussi un outil puissant. Par exemple, on peut tout congeler, ou presque, il faut le dire et le répéter.

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