« Ça peut arriver à n’importe qui »

Commentateur sportif et ancien joueur de la LNH, Gilbert Delorme se remet d’un accident vasculaire cérébral

« C’est comme gagner la loterie, mais j’ai pas gagné une tabarnac de cenne ! »

Confirmé : Gilbert Delorme va beaucoup mieux. Il affichait sa bonhommie habituelle lorsqu’il nous a rappelé, mercredi après-midi, depuis la région de West Palm Beach. À entendre son débit, son langage toujours coloré, on est loin de se douter que l’homme au bout du fil vient de passer 11 jours à l’hôpital.

Mais c’est bel et bien ce que l’ancien défenseur, que l’on entend maintenant à la radio, a vécu. Mercredi, au micro de l’émission Du sport le matin au 91,9 Sports, il a révélé à l’animateur Louis-Philippe Guy qu’il avait subi un accident vasculaire cérébral (AVC), ce qui expliquait son absence des ondes ces derniers jours.

C’est ça, la « loterie » qu’il a gagnée. Une loterie parce que « ça peut arriver à n’importe qui. C’est juste une bad luck », rappelle-t-il.

En forme, mais à risque

S’il y en a un qui peut se permettre de dire que « ça peut arriver à n’importe qui », c’est bien Delorme.

Un rappel pour les plus jeunes : dans les années 1980, le microsillon En forme avec Gilbert Delorme faisait fureur dans les Sports Experts du Québec.

Delorme, c’est aussi un homme qui a déjà voulu s’attaquer au record du monde de pompes. Au début de la pandémie, il avait même ramené des chroniques de mise en forme. « Comme les gyms étaient fermés, nos auditeurs avaient les conseils de Gilbert en ondes, se rappelle Louis-Philippe Guy, coanimateur avec Delorme. Il donnait des détails pour bien exécuter les exercices. »

Malgré tout cela, il n’était pas à l’abri d’un AVC. Le DSylvain Lanthier, neurologue à l’hôpital du Sacré-Cœur et porte-parole de Cœur+AVC, peut en témoigner.

« Je suis spécialiste en AVC chez les jeunes adultes, donc je vois souvent des gens pas mal en forme qui en font un quand même », explique le DLanthier, également professeur agrégé à la faculté de médecine de l’Université de Montréal.

Delorme a été chanceux dans sa malchance. L’AVC qu’il a subi est de type hémorragique ; c’est le type d’AVC avec le plus haut taux de fatalité, mais pour ceux qui y survivent, « une fois que le sang est parti, on peut récupérer des fonctions », rappelle le DLanthier.

Et le sang est bel et bien parti.

« L’infirmière, Amy, avait de l’expérience. C’était une straight-shooter, raconte Delorme. Elle m’a dit : “Je sais que t’as déjà vécu de la douleur au hockey, mais ce que tu vas vivre dans les deux ou trois prochains jours, ça ne sera pas drôle. Le sang dans ta tête, ça doit aller quelque part. Ça doit descendre, mais il y a des milliers de nerfs.” C’était pas son premier rodéo, elle savait de quoi elle parlait ! C’était épouvantable, la douleur dans la nuque. »

Mercredi matin, Delorme a rencontré le médecin, qui lui a dit que si tout continuait de bien aller, il pourrait reprendre l’activité physique lundi. Pour l’heure, il est donc en voie de s’en tirer sans séquelles. « En général, 15 % des patients récupèrent intégralement, 15 % meurent, et 70 % gardent des séquelles, qui peuvent être légères, modérées ou sévères », rappelle le DLanthier.

Chanceux dans sa malchance, disions-nous…

Les bienfaits d’une bonne santé

Mais Delorme a aussi mis toutes les chances de son côté en étant dans une forme impeccable. Un facteur qui a possiblement aidé « parce qu’une bonne forme physique facilite la réadaptation lorsque nécessaire, souligne le Dr Lanthier. De plus, les gens en forme ont souvent moins de maladies qui limitent la capacité de faire de la réadaptation. L’hypertension artérielle est une des causes des AVC hémorragiques, mais il arrive que des gens en forme en souffrent sans le savoir, sans être contrôlés. L’hypertension, c’est le tueur silencieux. Pour éviter ça, on peut limiter le sel, faire de l’exercice ou prendre des médicaments pour le contrôler. »

Le médecin nous rappelle les autres facteurs de risque, en plus de l’hypertension : diabète, obésité, sédentarité, cholestérol, tabagisme, abus d’alcool.

« Dans tous les cas, on peut soit le contrôler, soit prendre de la médication. C’est important, car si on contrôle les facteurs de risque, on réduit de 80 % les risques de subir un AVC. »

« La meilleure prévention, c’est de vous tenir en meilleure forme possible, ajoute Delorme. C’est votre arme secrète. Si ça t’arrive, mais que t’es bien bâti pour te défendre, ça va aider énormément. Si vous ne faites pas attention, si vous fumez, que vous faites du diabète, du cholestérol dans le tapis, que vous ne mangez pas bien… Et c’est important de se faire examiner. Moi, je fais un examen médical par année. »

Ensuite, il importe évidemment d’être attentif aux signes. Cœur+AVC le rappelle avec l’acrostiche « v-i-t-e » : visage (affaissé), incapacité (de lever un bras), trouble de la parole, extrême urgence (composez le 911).

Delorme, lui, avait consulté une première fois après avoir senti une douleur au cou, douleur que le médecin en Floride a attribuée à une blessure d’entraînement. Le lendemain, il s’est réveillé d’une sieste « pas capable de cligner de l’œil gauche, et la bouche croche », relate-t-il.

Sa femme, ancienne infirmière, et sa fille, première répondante puisqu’elle est policière, l’ont immédiatement ramené aux urgences, où des examens approfondis ont révélé l’AVC.

« Tu te penses invincible. J’arrive à 60 ans, je suis en forme, je n’ai aucun problème. Tu te penses invincible parce que tu te sens fort. »

Une leçon de vie à en tirer ?

« Je disais à ma femme ce matin que ça m’a fait réaliser une chose : si t’as le goût de passer une fin de semaine quelque part, ben vas-y. Tu le sais jamais. »

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.