Le gardien qui devient meilleur
La fois d’avant, ici même au Centre Bell, Cayden Primeau nous avait fait comprendre que pour lui, ce n’était qu’un début.
C’était le soir du 12 mars, et il avait tout vu, tout arrêté, et puis les fans s’étaient mis à scander son nom. C’est arrivé encore cette fois-ci, en ce petit jeudi soir ordinaire, surtout au chapitre du spectacle : après un autre arrêt, les gens ici se sont mis à hurler des Primeau ! Primeau ! Primeau ! comme on le fait en présence de quelque chose de grand. « Je ne vais jamais me tanner de ça ! », a avoué le jeune gardien en fin de soirée.
Ça tombe bien, parce que s’il continue comme ça, comme il l’a fait lors de cette victoire de 4-1 face aux Flyers de Philadelphie, Primeau aura le luxe de vivre d’autres moments comme ça, dans une ville qui a l’habitude de tomber rapidement en amour avec ses gardiens.
Le Canadien a tiré seulement 17 fois et a récolté 2 buts dans un filet désert à la fin. Les Flyers ont tiré 30 fois et auraient sans doute mérité mieux, mais parfois, il y a des choses qui ne s’expliquent pas. Par exemple, dans le vestiaire du Canadien, c’est un vieux succès du groupe autrichien Opus, Live is Life, qui jouait à fond la caisse en fin de soirée. Ça aussi, ça ne s’explique pas.
Mais passons, car Primeau est passé à exactement une minute et une seconde d’un troisième blanchissage de suite au Centre Bell, un plaisir qui lui a été retiré par un but d’Owen Tippett. Il aura donc passé 178 minutes et 43 secondes de suite sur la glace du Centre Bell sans accorder un seul but.
« On ne joue pas pour les blanchissages, a tenu à préciser le gardien au terme du match. C’est bien quand on en obtient, mais on ne joue pas pour ça. Une victoire, c’est encore mieux. »
Ce qui est bien, surtout, c’est que Primeau commence à donner des bouts de réponse à ses patrons. Ce match était seulement son 18e match de la saison, ce qui représente un échantillon bien modeste, il est vrai. Mais peu à peu, le Primeau que l’on voit ces jours-ci est en train de grandir sous nos yeux.
« J’essaie de ne jamais trop penser à l’avenir. Tout ce que je veux, c’est être prêt au moment où l’on décide de me faire signe. Je n’ai jamais joué autant de matchs depuis que je suis dans cette ligue, et je dois dire que ça fait du bien. »
— Cayden Primeau
« Mais j’essaie seulement de progresser, et je pense que je suis certainement un meilleur gardien maintenant que je ne l’étais en début de saison. »
Ses coéquipiers voient eux aussi la même chose.
« Il a été immense pour nous une fois de plus, a expliqué le défenseur Jayden Struble. Je ne sais plus ça fait combien de matchs qu’il joue comme ça, mais à chaque occasion, il nous offre une chance de gagner, comme Samuel [Montembeault] le fait lui aussi. Nos deux gardiens ont été incroyables, mais on espère ne pas avoir à tant se fier à eux à l’avenir ! »
Ce bout-là sera important pour la suite des choses. Cette équipe a vu passer des dizaines et des dizaines de joueurs au fil des récentes années, mais souvent, trop souvent en fait, les (rares) succès du club tenaient aux bonnes performances devant le filet.
Ce jeudi soir en est un bon exemple : une victoire est une victoire, bien sûr, mais ce serait probablement une bonne idée de lancer plus de 17 fois. En troisième, le Canadien a obtenu seulement 5 tirs, contre 16 pour les Flyers. La plupart du temps, c’est quelque chose qui va mener à une défaite.
Mais bon, pourquoi autant de négativisme ? On peut aussi enfiler nos lunettes roses et voir que cette victoire est la troisième de suite pour le Canadien. En plus, Nick Suzuki a atteint la barre des 30 buts et Mike Matheson, celle des 50 points.
C’est bien assez pour donner le goût de fredonner un bout de pop autrichienne des années 1980.