Rapport du GIEC sur le climat

L’humanité à la veille de conséquence cataclysmiques

Pénurie d’eau, exode, malnutrition, extinction d’espèces… La vie sur Terre telle que nous la connaissons sera inéluctablement transformée par le dérèglement climatique quand les enfants nés en 2021 auront 30 ans, voire plus tôt, alerte un projet de rapport des experts sur le climat de l’ONU obtenu par l’AFP.

Quel que soit le rythme de réduction des émissions de gaz à effet de serre, les impacts dévastateurs du réchauffement sur la nature et l’humanité qui en dépend vont s’accélérer, assure le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), et devenir douloureusement palpables bien avant 2050.

« La vie sur Terre peut se remettre d’un changement climatique majeur en évoluant vers de nouvelles espèces et en créant de nouveaux écosystèmes », note le résumé technique de 137 pages. « L’humanité ne le peut pas. »

Le projet de rapport rédigé par des centaines de scientifiques rattachés au GIEC, qui fait autorité en la matière, oscille entre un ton apocalyptique et l’espoir offert aux humains de changer leur destin avec des mesures immédiates et draconiennes.

Le rapport d’évaluation complet de 4000 pages, bien plus alarmiste que le précédent de 2014, a pour vocation d’éclairer les décisions politiques.

Même si ses principales conclusions ne changeront pas, il ne sera officiellement publié qu’en février 2022, après son approbation par consensus par les 195 États membres.

Trop tard, cependant, pour les cruciales réunions internationales sur le climat et la biodiversité prévues fin 2021, notent certains scientifiques.

Parmi ses conclusions les plus importantes, figure un abaissement du seuil au-delà duquel le réchauffement peut être considéré comme acceptable.

En signant l’accord de Paris en 2015, le monde s’est engagé à limiter le réchauffement à +2 °C par rapport à l’ère préindustrielle, si possible à +1,5 °C.

Désormais, le GIEC estime que dépasser +1,5 °C pourrait déjà entraîner, « progressivement, des conséquences graves, pendant des siècles, et parfois irréversibles ».

Et selon l’Organisation météorologique mondiale, la probabilité que ce seuil de +1,5 °C sur une année soit dépassé dès 2025 est déjà de 40 %.

« Nos enfants et petits-enfants »

« Le pire est à venir, avec des implications sur la vie de nos enfants et nos petits-enfants bien plus que sur la nôtre », martèle le GIEC, alors que la prise de conscience sur la crise climatique n’a jamais été aussi étendue.

Le climat a déjà changé. Alors que la hausse des températures moyennes depuis le milieu du XIXsiècle atteint 1,1 °C, les effets sont déjà graves et seront de plus en plus violents, même si les émissions de CO2 sont freinées.

Pour certains animaux et certaines variétés de plantes, il est peut-être même déjà trop tard : « Même à 1,5 °C, les conditions de vie vont changer au-delà de la capacité de certains organismes à s’adapter », souligne le rapport, citant les récifs coralliens dont un demi-milliard de personnes dépendent.

Parmi les espèces en sursis figurent les animaux de l’Arctique, territoire qui se réchauffe trois fois plus vite que la moyenne. Sur place, des modes de vie ancestraux de peuples vivant en lien étroit avec la glace pourraient aussi disparaître.

Une menace généralisée

Agriculture, élevage, pêche, aquaculture… « Dans tous les systèmes de production alimentaire, les pertes soudaines s’accroissent », observe aussi le rapport, pointant les aléas climatiques comme « principal moteur ».

Or, l’humanité n’est à ce stade pas armée pour faire face à la dégradation certaine de la situation. « Les niveaux actuels d’adaptation seront insuffisants pour répondre aux futurs risques climatiques », prévient le GIEC.

Même en limitant la hausse à 2 °C, jusqu’à 80 millions de personnes supplémentaires auront faim d’ici à 2050 et 130 millions pourraient tomber dans la pauvreté extrême d’ici 10 ans.

En 2050, des centaines de millions d’habitants de villes côtières seront menacés par des vagues-submersions plus fréquentes, provoquées par une hausse du niveau de la mer, qui entraînera à son tour des migrations importantes.

À +1,5 °C, dans les villes, 350 millions d’habitants supplémentaires seront exposés aux pénuries d’eau, 400 millions à +2 °C. Et avec ce demi-degré supplémentaire, 420 millions de personnes de plus seront menacées par des canicules extrêmes.

Des choix radicaux

Sans oublier les incertitudes autour des « points de bascule », éléments clés dont la modification substantielle pourrait entraîner le système climatique vers un changement violent et irrémédiable.

Au-delà de +2 °C, la fonte des calottes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique de l’Ouest (qui contiennent assez d’eau pour provoquer une hausse du niveau de la mer de 13 mètres) pourrait par exemple entraîner un point de non-retour, selon de récents travaux.

C’est pour cela que « chaque fraction d’un degré compte », insiste le GIEC, alors qu’un autre point de rupture pourrait voir l’Amazonie – un des poumons de la planète avec les océans – transformée en savane.

En dépit de ses conclusions alarmantes, le rapport offre tout de même une note d’espoir. L’humanité peut encore orienter sa destinée vers un avenir meilleur en prenant aujourd’hui des mesures fortes pour freiner l’emballement de la deuxième moitié du siècle.

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