Actualités COVID-19

Peut-on
atteindre
l’immunité
collective ?

La vaccination permet souvent d’atteindre une « immunité collective », c’est-à-dire que les personnes non vaccinées sont protégées parce qu’une maladie ne circule plus dans la société. Or, dans le cas de la COVID-19, en dépit des progrès de la vaccination, il se pourrait qu'elle ne soit jamais atteinte.

Qu'est-ce que l’immunité collective

Au départ, il y a un an, on parlait d’immunité collective dans un contexte où il n’y avait aucun traitement ni vaccin contre la COVID-19, rappelle Benoît Mâsse, épidémiologiste à l’Université de Montréal. « On l’évoquait en Suède, qui faisait très peu de confinement avec l’idée d’arriver plus vite à une immunité collective, dit M. Mâsse. Mais finalement, la proportion de personnes infectées est restée très basse même en Suède. » Avec la grande efficacité des vaccins, on a recommencé à parler d’immunité collective. Dans le cas de beaucoup de maladies infectieuses, une personne infectée ou vaccinée ne peut plus attraper la maladie, ou la transmettre. Le virus cesse presque de circuler. Ainsi, si 80 % de la population est immunisée contre un virus, quatre personnes sur cinq ne seront pas malades après avoir été en contact avec une personne infectée. Le seuil d’immunité collective varie beaucoup d'un virus à l'autre : de 50 % pour les virus moins contagieux à 90 % pour ceux qui le sont davantage. Au Québec, le gouvernement Legault estime que la vaccination complète de 75 % de la population de 12 ans et plus d'ici la fin d'août permettrait d'atteindre l'immunité collective face à la COVID-19.

Les effets de l'hésitation

L’hésitation vaccinale, qui incite certains à ne pas se faire vacciner, joue un rôle dans l’atteinte de l’immunité collective. Pour l’instant au Québec, la campagne de vaccination se déroule bien. Ainsi, chez les 60 ans et plus, les taux de vaccination dépassent les 85 % dans tous les groupes d’âge pour la première dose. Un peu partout dans le monde, certains groupes se montrent toutefois plus hésitants face aux vaccins. « Aux États-Unis, tout ce qui s’est passé avec l’expérience de Tuskegee sur le traitement de la syphilis rend les Afro-Américains très méfiants, observe Maryse Guay, spécialiste en vaccination à l’Université de Sherbrooke. La vaccination contre la COVID-19 ne fait pas exception. » Dans les années 1930, le gouvernement américain a recruté 600 Afro-Américains de l’Alabama en leur offrant un traitement contre plusieurs maladies. En réalité, ils leur ont inoculé la syphilis, dans le but de documenter l’évolution naturelle de la maladie.

La vaccination des soignants

Un autre point d’inquiétude est le taux de vaccination inférieur à 80 % chez les employés de la santé, voire sous les 60 % dans certaines catégories de maisons de retraite au Québec. Depuis avril, le ministère de la Santé et des Services sociaux oblige les soignants qui refusent la vaccination à se faire tester trois fois par semaine. « S’ils sont en congé, ils doivent se rendre au test à leurs frais, dit la Dre Guay. On a des données anecdotiques qui montrent que ça a un effet. » Cela dit, la vaccination contre la COVID-19 dans le secteur de la santé est supérieure à celle contre la grippe, qui est souvent sous la barre des 50 %.

Et les voyages ?

Même si un pays a atteint le seuil d’immunité collective, des éclosions d’une maladie peuvent survenir en raison de voyages dans des pays où le virus circule encore. « C’est sûr que parler d’immunité de groupe avec le contexte d’un monde où on voyage beaucoup, c’est différent », dit Andrés Finzi, virologue à l’Université de Montréal. Par exemple, une éclosion de rougeole au Québec en 2011 a été liée à un voyageur de France, qui fait partie depuis 2019 des pays à risque pour cette maladie selon les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) du gouvernement américain, en raison d’une forte hésitation vaccinale dans le pays de Molière. Un passeport vaccinal pourrait limiter les risques associés aux voyages.

Le mystère des variants

Le seuil d’immunité de groupe augmente avec le degré de contagion d’un virus. Or, certains variants de la COVID-19 sont de 50 % à 100 % plus transmissibles que la souche originale, note M. Mâsse. « On parlait d’immunité collective avec 70 % de la population vaccinée, mais avec les variants, c’est 80 %, 90 %. » M. Finzi note aussi qu’un variant résistant aux vaccins pourrait apparaître, ce qui anéantirait l’immunité collective. « Pour le moment, les variants ne résistent qu’à une couche de la réponse immunitaire, alors les vaccins restent aussi efficaces. Mais on ne peut pas dire si ça va continuer comme ça. » Cela dit, il y a moins de nouveaux variants quand le virus circule moins grâce à une forte vaccination. « C’est pour ça que c’est vraiment important que la vaccination soit mondiale », dit M. Finzi.

Mesurer l’efficacité du vaccin

Lueur d’espoir, des chercheurs américains planchent sur un test qui estimerait la réponse immunitaire à un vaccin. « Comme ça, on pourrait savoir tout de suite si ça a fonctionné, dit M. Mâsse. Et on pourrait donner un autre vaccin à un patient qui n’est pas protégé. » Des chercheurs américains comparent les taux de différents anticorps chez les gens qui ont reçu le vaccin de Moderna, pour voir s’ils sont différents chez ceux qui ont eu la COVID-19 par la suite et chez ceux qui ne sont pas tombés malades.

En chiffres

Le seuil de vaccination pour atteindre l'immunité collective pour différentes maladies

Source : Université de Montréal

COVID-19 : entre 70 % et 90 % (estimation)

Rougeole : entre 83 % et 95 %

Variole : entre 85 % et 90 %

Varicelle : entre 70 % et 85 %

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