Énergie

Le Québécois qui voulait électrifier le Rwanda

À elle seule, elle augmentera la production électrique du Rwanda de 7 %. La jeune entreprise Afritech Energy, fondée par le Sherbrookois Dan Klinck, entreprendra en janvier la construction de cinq microcentrales hydroélectriques au pays des mille collines, un projet qui comprend déjà des retombées sociales concrètes pour les communautés concernées.

Dan Klinck parle de son projet Empowering Villages (autonomiser les villages) avec un enthousiasme débordant.

L’entreprise qu’il a fondée avec un partenaire rwandais, Afritech Energy, entreprendra en janvier la construction de cinq microcentrales hydroélectriques dans l’ouest du pays. Les travaux devraient durer 18 mois.

Le jeune père de famille est particulièrement fier de la vision « sociale » de son entreprise, qui investit et s’implique dans les communautés où elle s’installe.

« Les microcentrales sont loin de Kigali, parmi les populations les plus pauvres du pays, alors nous construisons des bibliothèques là où on bâtit une microcentrale, des parcs de jeux pour enfants, des centres communautaires », énumère-t-il, ajoutant investir aussi dans la protection de l’environnement et dans des entreprises locales.

« Quand l’électricité arrive, ça crée des occasions d’affaires », dit-il, précisant que son entreprise prévoit à terme réinvestir 10 % de ses profits dans les communautés locales.

BESOIN D’ÉLECTRICITÉ

Le Rwanda, qui connaît des délestages fréquents et dont une grande partie de la population n’a toujours pas accès à l’électricité, souhaite faire passer sa puissance installée de 160 MW, aujourd’hui, à 563 MW, en 2017.

À titre comparatif, Hydro-Québec a une puissance installée de 36 643 MW.

Ensemble, les cinq microcentrales d’Afritech Energy ajouteront 11,8 MW à la puissance installée du Rwanda, ce qui placera la petite entreprise parmi les cinq plus importants producteurs actuels d’hydroélectricité du pays.

La plus importante des cinq microcentrales, sur la rivière Bihongora, produira 5,3 MW d’électricité, tandis que la plus petite, sur la rivière Rubagabaga, en produira 0,3 MW.

Seulement 20 % des foyers rwandais sont actuellement raccordés au réseau électrique et « le but du gouvernement, c’est d’arriver à 70 % d’ici trois ans », explique Dan Klinck, ajoutant fièrement que « dans les villages où on travaille, on va essayer d’atteindre 100 % ».

Pour atteindre cet objectif, Kigali mise sur les énergies renouvelables, notamment l’hydroélectricité.

« L’hydrologie est excellente [au Rwanda] », s’exclame Dan Klinck, surtout dans les régions montagneuses du nord et de l’ouest.

Par contre, l’eau étant particulièrement chargée de sédiments, l’entreprise a dû doter toutes ses installations de dessableurs.

Afritech Energy a opté pour des centrales au fil de l’eau, s’évitant ainsi la coûteuse construction de barrages et la création de réservoirs.

C’est une entreprise norvégienne qui s’est chargée de l’ingénierie. C’est aussi une banque norvégienne qui finance les trois quarts des 40 millions de dollars que requiert la construction des cinq centrales.

Actuellement, 40 % de l’électricité est produite à partir d’hydrocarbures au Rwanda, ce qui explique son coût élevé, à 0,28 US $/kWh (0,37 $).

« C’est la plus chère en Afrique de l’Est ! », s’exclame Dan Klinck, qui prévoit vendre l’électricité produite dans ses centrales à 0,13 US $/kWh (0,17 $).

UNE VOCATION IMPRÉVUE

Au départ, Dan Klinck ne se destinait pas particulièrement à la production d’électricité. Le Sherbrookois de 32 ans, qui a étudié en finances à l’Université Bishop’s, a suivi sa conjointe enseignante au Rwanda.

C’est en cherchant à investir dans des entreprises qu’il a réalisé les besoins immenses du Rwanda en électricité et décidé de fonder Afritech Energy avec un partenaire rwandais.

Son partenaire et lui ont personnellement investi 500 000 $ et l’entreprise sherbrookoise Global Excel a mis quelque 100 000 $ dans le financement de la microcentrale de Rubagabaga, une contribution qui pourrait être décuplée si le projet est un succès. 

Dan Klinck est fier de dire que « 80 % » des membres de son équipe d’une quarantaine de personnes sont Rwandais, mais il souligne que le pays n’a pas une grande expertise en matière d’hydroélectricité.

Il souhaite donc trouver des entreprises québécoises prêtes à le suivre dans son aventure rwandaise.

Le jeune homme d’affaires affirme qu’il est « 10 fois plus facile que n’importe où » de lancer une entreprise au Rwanda, un pays qui « n’est pas comme le reste de l’Afrique », sécuritaire et exempt de corruption.

« Lancer une entreprise [au Rwanda], ça prend six heures ! »

— Dan Klinck

La jeune entreprise, créée en 2013, ne compte pour l’instant qu’une seule réalisation à son actif, à titre de sous-traitante : une centrale solaire de 8,5 MW inaugurée en juillet dernier à Rwamagana, dans l’est du pays.

Dan Klinck voit cependant beaucoup plus grand. Son objectif est d’atteindre d’ici quelques années une production électrique oscillant entre 50 et 100 MW. Au Rwanda, mais aussi dans les pays voisins, comme le Burundi et la République démocratique du Congo.

LE RWANDA EN CHIFFRES

Population : 12,7 millions d’habitants

Puissance installée : 160 MW

Puissance projetée en 2017 : 563 MW

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