Sixième vague

La pression s’accentue à nouveau sur le réseau de la santé

La sixième vague de COVID-19 met encore le réseau de la santé à l’épreuve, les hospitalisations liées au virus frisant maintenant la barre des 2000 au Québec. Et cette hausse risque de se poursuivre encore dans les prochaines semaines, les cas continuant de grimper chez les plus âgés, plus vulnérables.

« Dans le contexte, sans aucune restriction et sans dépistage populationnel, c’est prévisible qu’on verra plus de cas s’accumuler, et surtout plus d’hospitalisations. En d’autres mots, le pire de cette vague n’est pas encore arrivé », dit le DMatthew Oughton, spécialiste des maladies infectieuses à l’Hôpital général juif.

À ses yeux, l’atteinte d’un pic passera en effet par des hausses importantes de transmission « dans les prochains jours, voire les prochaines semaines ». « En attendant, on n’avance pas du tout dans la troisième dose. On est figés depuis un bon moment. Il faut vraiment accélérer la cadence si on veut atteindre un sommet de vague plus rapidement », dit-il, en appelant aussi à nouveau Québec à redémarrer le dépistage PCR dans certains groupes de population.

Québec a recensé mardi une hausse de 145 hospitalisations (294 entrées, 149 sorties). À ce jour, 1938 patients demeurent hospitalisés en lien avec le virus, dont 67 aux soins intensifs (- 2).

« On est encore devant l’inconnu, en termes de l’ampleur qu’aura cette vague », affirme aussi le virologue Benoit Barbeau, professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal (UQAM).

« Je pense qu’on en a pour encore une ou deux semaines, minimalement, avant d’atteindre un plateau. »

— Benoit Barbeau, virologue

« Notre meilleur point de repère, c’est l’Europe. Et même là-bas, ce ne sont pas tous les pays qui parlent encore de plateau ou de ralentissement », ajoute le virologue.

Encore en hausse chez les aînés

Pour l’heure, les cas continuent à augmenter chez les personnes âgées (60 ans et plus), tout comme les décès et les hospitalisations, d’ailleurs. Le Québec rapporte en moyenne 850 nouveaux cas par jour chez les aînés, en hausse de 36 % sur une semaine. Chez les moins de 60 ans, les infections semblent vouloir plafonner ou même tendre à la baisse.

D’après M. Barbeau, la hausse encore en cours chez les plus âgés ne présage rien de bon à court terme pour le réseau de la santé, ceux-ci représentant 85 % des personnes actuellement hospitalisées. « C’est certain que les jeunes vont peu subir les conséquences de cette vague-là, surtout s’ils sont vaccinés ou infectés par Omicron. Mais les plus vieux, eux, vont être protégés de façon beaucoup moins prolongée. Ils subiront davantage de conséquences, surtout si leur troisième dose date d’un certain moment », résume-t-il.

À l’Association des spécialistes en médecine d’urgence du Québec, le DGilbert Boucher confirme que le réseau est sous haute pression. « En plus de la COVID, il y a une demande incroyable de services de la population actuellement », indique-t-il.

« Depuis une semaine, n’importe qui dans les urgences attend de très nombreuses heures. C’est extrêmement difficile dans nos salles d’attente. »

— Le DGilbert Boucher, de l’Association des spécialistes en médecine d’urgence du Québec

« Tellement de facteurs »

Professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal (ESPUM), Roxane Borgès Da Silva collecte depuis bon nombre de semaines déjà des données sur le nombre de nouveaux cas de COVID-19, avec plusieurs autres chercheurs du Centre interuniversitaire de recherche en analyse des organisations (CIRANO). Elle estime que de 30 000 à 40 000 Québécois contractent le virus actuellement, par jour.

« Je ne suis pas étonnée de la proportion des hospitalisations dans ce contexte-là, quand on sait que ça suit toujours le nombre d’infections. Je m’attends donc à ce que ça augmente encore dans le réseau de la santé pendant au moins deux semaines », soutient-elle également.

Elle affirme que l’atteinte d’un éventuel sommet de la sixième vague dépendra de « plusieurs facteurs », y compris, en premier lieu, la manière dont les Québécois vont s’approprier la nouvelle gestion du risque, qui est dorénavant individuelle vu l’absence de mesures sanitaires.

Mardi, l’administratrice en chef de l’Agence de la santé publique du Canada, la Dre Theresa Tam, a confirmé que la sixième vague a officiellement gagné tout le Canada. Le Comité consultatif national de l’immunisation (CCNI) presse les Canadiens d’obtenir une troisième dose. L’administration de cette dose de rappel pour les 12 à 17 ans n’a pas encore obtenu le feu vert de Santé Canada, mais le CCNI la recommande quand même six mois après la dernière vaccination pour les adolescents à risque.

La Dre Tam recommande le port du masque pour tous, qu’il soit obligatoire ou non dans les provinces. « Ce n’est pas important s’il y a une directive sur le masque ou non, c’est tout simplement vraiment important de le porter », a-t-elle dit. Le directeur de la Santé publique de l’Ontario, le Dr Kieran Moore, avait fortement recommandé la veille de continuer de porter le masque, qui n’y est plus obligatoire depuis le 21 mars.

— Avec la collaboration de Pierre-André Normandin et de Mylène Crête, La Presse

État des lieux

Les 1938 personnes hospitalisées représentent une hausse de 31 % sur une semaine. Aux soins intensifs, la situation demeure moins aiguë, les 67 patients représentant une baisse de 3 % sur une semaine. On recense en moyenne 66 patients de plus chaque jour dans le réseau. Québec a signalé mardi 2596 nouveaux cas de COVID-19, ce qui porte la moyenne quotidienne à 3136. La tendance est ainsi en hausse de 9 % sur une semaine. Ces chiffres ne reflètent vraisemblablement qu’une partie des infections totales en raison de l’accès limité aux tests de dépistage par PCR.

Côté vaccination, la campagne québécoise continue de gagner en vitesse. Lundi, plus de 25 600 doses supplémentaires ont été administrées. Le taux de positivité est de 16,7 %.

— Henri Ouellette-Vézina et Pierre-André Normandin, La Presse

60 %

Moins de 60 % des personnes âgées de 18 ans et plus ont reçu la dose de rappel au Canada. Au Québec, la couverture vaccinale varie d’un groupe d’âge à l’autre. Parmi les 60 ans et plus, 86 % ont reçu une troisième dose. Cette proportion diminue à 61 % pour les 40 à 59 ans et à 38 % pour les 18 à 39 ans.

Source : Agence de la santé publique du Canada

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.