Élections de mi-mandat

La démocratie américaine fonctionne

Contrairement aux prédictions de plusieurs sources réputées, les élections de mi-mandat aux États-Unis n’ont pas produit de « vague rouge » favorisant le Parti républicain. Au contraire, le Parti démocrate conserve le contrôle du Sénat, et même si les républicains prennent le contrôle de la Chambre des représentants, la marge sera très modeste. Le président Joe Biden s’en sort donc plutôt bien.

Il apparaît clair que l’inflation fut le facteur déterminant en faveur du vote républicain. Toutefois, on constate aussi que le jugement de la Cour suprême prononcé en juin dernier, qui restreint les dispositions sur l’accès à l’avortement établies par le jugement Roe c. Wade de 1973, a indéniablement motivé le vote démocrate. De plus, les interventions de fin de campagne du président Biden et de l’ancien président Barack Obama au sujet des défis et des menaces qui visent la démocratie américaine ont également eu comme incidence de mobiliser les électeurs de ce parti.

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Il semble que ces éléments ont notamment incité les femmes et les jeunes à se rendre aux urnes.

Il s’agit de la meilleure performance d’un président à ses premières élections de mi-mandat depuis George W. Bush en 2002, et ce, malgré un taux d’approbation de moins de 45 % pour le président Biden.

Ces élections de mi-mandat ont aussi produit des résultats marquants en matière de diversité des élus. Le nombre de femmes (à titre de gouverneurs) et de personnes issues des communautés culturelles qui ont été élues n’a jamais été aussi important. Notons l’élection d’un jeune représentant de 25 ans dans l’État de la Floride, le démocrate Maxwell Frost, qui devient le premier élu américain issu de la génération Z, ainsi que l’élection du premier gouverneur afro-américain du Maryland, le démocrate Wes Moore. Voilà de bons indices de la vitalité de la démocratie aux États-Unis.

Donald Trump, le grand perdant

Plusieurs des vedettes républicaines furent recrutées par l’ancien président Donald Trump en vue de ce scrutin. Elles appuyaient sa thèse concernant le présumé vol de l’élection présidentielle de 2020 et l’illégitimité de Joe Biden à la présidence.

Toutefois, un grand nombre de ces candidats ont subi la défaite, et particulièrement dans deux États jugés clés pour 2024, le Michigan et la Pennsylvanie, où on a assisté à un balayage démocrate.

De plus, le gouverneur de la Floride, Ron DeSantis, sort grand gagnant de l’élection du 8 novembre en raison de sa réélection décisive et de sa performance auprès des Latino-Américains. La victoire de ce leader de la droite commence à faire des ravages au sein de l’unité républicaine.

Plus encore, certains médias conservateurs, incluant Fox News, remettent déjà en doute la viabilité de la candidature de Trump en 2024 et font la promotion de celle de DeSantis. Plusieurs républicains commencent à se dissocier de sa prochaine campagne, dont Mike Pence, son ancien vice-président. Celui-ci vient d’ailleurs de publier un livre dans lequel il dénonce le comportement qu’a eu Trump le 6 janvier 2021, alléguant que ses interventions les ont, lui et sa famille, mis en danger.

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Certes, il est trop tôt pour écrire la nécrologie politique de Donald Trump, mais son retour à la présidence en 2024 apparaît désormais beaucoup plus compliqué.

Perspectives pour les élections de 2024

La performance des démocrates aura pour effet de donner une plus grande marge de manœuvre que prévu à Joe Biden durant la deuxième moitié de son mandat. Même si la Chambre des représentants passe aux mains des républicains, il ne faudra pas sous-estimer le président en poste. Biden est un habitué des manœuvres politiques au Congrès.

Les résultats du 8 novembre lui donnent aussi un peu plus de temps pour laisser savoir ses intentions en vue de la présidentielle de 2024. Toutefois, la majorité des électeurs qui ont voté aux élections de mi-mandat semble souhaiter sa retraite.

Chose certaine, la polarisation et la division restent entières. On prévoit des séquelles à la suite de l’enquête sur les événements du 6 janvier 2021. Possiblement des accusations par le département de la Justice envers Trump. On prévoit aussi que près du quart des élus du Congrès continuent de considérer l’élection de 2020 comme illégitime.

Beaucoup de questions se présentent à l’horizon. Est-ce que le gouverneur Ron DeSantis se présentera à l’investiture républicaine contre Donald Trump ? Allons-nous voir l’émergence d’une « élection du changement » avec une nouvelle génération, sans Biden ni Trump ?

On peut prévoir que la question de la démocratie américaine sera à nouveau dans le paysage politique d’ici 2024. Cela étant, il reste que pour de nombreux Américains, les élections du 8 novembre ont fait la démonstration de l’importance d’aller voter et de la différence que peut faire chaque vote. Sans aucun doute, ils ont assisté au fonctionnement de leur démocratie.

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