Biblio

La pluie intérieure

Dans ce court roman d’une grande densité, une femme amoureuse s’élance vers l’homme aimé, elle ne veut pas rater son train. Sur le quai du métro, un vieil homme lui sourit, puis se jette sous les roues. Trop bouleversée, elle ne se rendra pas au rendez-vous. Cet événement tragique, traumatique, rompt le temps en deux, crée une brèche dans son quotidien. La narratrice doit reprendre son souffle, non seulement pour accuser le coup de cet échange de regard qu’elle ne peut oublier, un dernier regard qu’elle a peut-être volé aux proches du suicidé, mais aussi pour revisiter sa vie et sa relation avec cet homme que dorénavant elle fuit. Elle pense à ce grand-père qui, dans son enfance, lui aura appris « l’élan nécessaire » pour affronter le monde, à cet amour qui lui aura peut-être permis « tous les autres ». La narratrice ne sombrera pas, elle écoutera ce que réveille en elle cette mort anonyme rappelant la fragilité de toute existence, cette « pluie intérieure » qui fait les larmes, de joie ou de peine. Elle tanguera pour mieux danser, on lui dira : «  son sourire vous a donné quelque chose qu’il faut garder ». Magnifique. — Chantal Guy

Extrait

Écoute la pluie, de Michèle Lesbre

« Comment te transmettre ces minuscules détails, ces instants lumineux où, dans l’ombre fragile d’un homme vieillissant et solitaire, j’arpentais la campagne paisible avec déjà la conscience aiguë d’un temps en fuite, d’une disparition possible de ce corps que je devinais maigre et fatigué, aux gestes mesurés, à la démarche lente et régulière, dont j’avais sans doute hérité mais de quoi ? De la solitude ? De son amour du silence et de la contemplation ? »

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