vie au travail

Les leçons de District 31

Le million et plus d’inconditionnels de District 31 devront en faire leur deuil : la première saison se termine jeudi. Au-delà de l’attrait des intrigues de la quotidienne de Radio-Canada, l’émission est un bel exemple de valorisation du bien-être au travail. Ce que prônent de plus en plus de gestionnaires. Entretien avec l’auteur Luc Dionne sur l’ambiance dans son poste de quartier.

VIE AU TRAVAIL District 31

Fleurs, tapes dans le dos et coups pendables

La première saison de District 31 fourmille d’intrigues, mais aussi de mille et une attentions envers les collègues enquêteurs et policiers. On envoie des fleurs à celui qui vient de perdre sa femme, on s’intéresse au moral d’un autre, on tient compte des appels de détresse d’un troisième, on s’oblige à détendre l’atmosphère par des tours pendables, comme le vol qualifié d’un séchoir à main dans la salle de bains du poste… « Je dirais que les policiers de District 31 sont plutôt tranquilles ! estime Luc Dionne. Je ne peux en mettre trop pour que ça reste crédible ! Cela dit, la job appelle ça, surtout en grande période de pointe, à la veille d’arrestations. »

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Question de confiance

La quotidienne de Luc Dionne est néanmoins un miroir de ce qu’implantent de plus en plus d’entreprises qui favorisent le bien-être au travail. Intuition de l’auteur ou simple mécanisme pour ajouter de la texture à ses histoires ? « Il y a une différence fondamentale entre la gendarmerie, soit la police en uniforme, et la division des enquêtes, répond Luc Dionne. En gendarmerie, on est sur la patrouille, sur la route. Les relations se limitent à notre partenaire. Du côté des enquêteurs, c’est dans la définition même des tâches qu’ils se parlent beaucoup, qu’ils travaillent en équipe. Car tout est une question de confiance. »

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Pas froide comme d’autres séries

Les séries policières riment souvent avec froideur et échanges costauds entre collègues. Avec District 31, Luc Dionne voulait détruire certains clichés et mythes télévisuels. « Ç’aurait été facile de tomber dans un pattern, d’y aller tout le temps dans la confrontation, admet celui qui a pondu 120 épisodes dans cette populaire première saison. Mais au départ, des enquêteurs, c’est du bon monde. Il n’y a pas de solitaires là-dedans. C’est la vie ! »

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Proximité 31 = efficacité

Être soudés les uns aux autres entraîne forcément de l’empathie. Mais un tel intérêt pour le bien-être de l’autre de la part des commandants et lieutenants favorise la motivation et les résolutions d’enquêtes. « La police est un milieu hyper hiérarchisé, comme l’armée, explique Luc Dionne. Plus on monte dans la pyramide, plus c’est froid. Mais sur le plancher des vaches, cette proximité, c’est la nature de la job. Des enquêtes criminelles, c’est un travail de réflexion en gang. »

« Le commandant Chiasson (Gildor Roy) a toutefois une humanité qu’on oublie souvent dans la haute direction, note Laure Cohen Van Delft, coach de gestion pour dirigeants de SmARTCoaching. C’est très important, car c’est ce qui prévient notamment l’épuisement au travail. Quand tu sens que la haute direction peut lire tes faiblesses, tu te sens moins gêné de les dévoiler. »

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Réduction de l’absentéisme

Grâce à une culture d’entreprise qui favorise le bien-être, les échanges au travail et qui adoucit la hiérarchie, l’organisation arrive à réduire son taux d’absentéisme et de démotivation, très coûteux. En 2013, le Conference Board du Canada évaluait à 16,6 milliards les coûts liés à l’absentéisme au pays, soit 2,4 % de la masse salariale brute. « Par contre, tu auras beau avoir des garde-fous, s’il n’y a pas de ressources, il y aura des problèmes, prévient Laure Cohen Van Delft. L’humain peut intervenir par son empathie et son écoute, mais si l’organisation coupe dans les ressources humaines, le gestionnaire écope en termes d’épuisement. »

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Un bel exemple ?

Les dirigeants d’entreprise et gestionnaires peuvent-ils s’inspirer de ce qui est mis de l’avant dans District 31 ? « Dans l’émission, les employés sont motivés et ressentent de la satisfaction au travail, car il y a un sentiment d’appartenance à une confrérie, une culture d’entreprise, décrit Laure Cohen Van Delft. C’est un pour tous et tous pour un. Ils ont de l’autonomie dans leur travail, les coudées franches. Et ils sont compétents. Mais là où le bât blesse, c’est qu’il n’y a pas d’équilibre vie personnelle et travail. »

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Une source d’inspiration en gestion

Comme source d’inspiration, on peut plutôt analyser les façons de gérer des différents patrons de la quotidienne, soit Nadine (Magalie Lépine-Blondeau), Daniel (Gildor Roy) et, au début, Laurent (Patrick Labbé). « On entend souvent dans la série : “Dans mon bureau !”, remarque Laure Cohen Van Delft. Pour Laurent, ça sous-entend que tu passes un mauvais quart d’heure. Mais pour Nadine, ça rime avec motivation des troupes et séances de remue-méninges. »

Comme dans la vie, les qualités et la personnalité d’un dirigeant influencent les résultats. « Laurent prône la collégialité, mais dans les faits, il n’agit pas de la sorte, remarque Laure Cohen Van Delft. Nadine, oui. »

Un style de gestion comme celui de Laurent peut susciter de grandes tensions au sein de l’équipe. Alors qu’un gestionnaire authentique protège ses employés et obtient la confiance de ses troupes autant que de ses supérieurs. « Donc, même lors de situations stressantes, les employés peuvent passer par-dessus, car ils sentent le respect et une vraie reconnaissance de leur supérieur. »

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