Debout grâce au médicament le plus cher du monde

Le petit Jacob est l'un des enfants à avoir reçu le Zolgensma, un traitement coûteux aux effets « inimaginables ».

Neuf enfants québécois ont reçu le médicament le plus cher de la planète, un traitement évalué à 2,8 millions de dollars qui freine l’amyotrophie spinale, depuis qu’il est remboursé par Québec. Les effets de cette nouvelle thérapie dépassent les attentes des familles et des médecins, jusqu’à maintenant.

Jacob se tient debout ! Il s’appuie sur une petite table, fait rouler des camions et marmonne des bruits de moteur. Cette scène, elle aurait été impensable il y a quelques mois à peine. « Qu’il gagne autant en force, c’est inimaginable ! », s’exclame Audrey Cueillierrier, maman de l’enfant.

Le bambin de 2 ans est atteint d’amyotrophie spinale, une maladie dégénérative qui s’attaque tour à tour aux muscles, à la respiration, à la déglutition et au cœur. Jusqu’en 2019, avant que les premiers traitements ne voient le jour, la maladie était la principale cause génétique de décès chez les enfants en bas âge.

Jacob, qui a reçu son diagnostic vers 1 an, a dû subir quatre ponctions lombaires et quatre injections de Spinzara, sous anesthésie générale, en seulement quelques mois. Le traitement doit être administré tous les quatre mois.

La vie de l’enfant a toutefois pris un tournant quand le Zolgensma a été ajouté à la Liste des médicaments fournis en établissement et couvert par la Régie de l’assurance maladie du Québec, en octobre dernier.

Jacob a reçu sa dose de Zolgensma le 24 novembre. Une seule injection est nécessaire. « On ne nous l’a pas vendu comme un médicament miracle, explique Audrey Cueillierrier. Mais jusqu’à maintenant, on est tellement contents des résultats. Ça va au-delà de nos espoirs ! »

« Jacob a tellement progressé. Il se tient debout, ce qu’il n’avait jamais fait avant. C’est sûr qu’on doit l’aider et qu’il a besoin d’un petit support, mais une fois qu’il est en position debout, il peut rester comme ça quelques minutes.  »

– Audrey Cueillierrier, mère de Jacob

La pharmaceutique Novartis, qui produit le Zolgensma, n’a pas la prétention de guérir l’amyotrophie spinale. Elle affirme que son médicament, recommandé chez les enfants de moins de 6 mois, « freine l’évolution de la maladie ». Mais Jacob, lui, a pourtant vu sa qualité de vie s’améliorer.

Il a davantage d’énergie, il passe de la position assise à la position couchée par lui-même, il guérit mieux des petits virus comme le rhume parce qu’il a plus de force dans ses poumons, notent ses parents Audrey Cueillierrier et Frédérick Beaulieu.

« Il commence aussi à ramper un petit peu. Il lève ses fesses, pousse ses genoux et avance avec ses bras. Il ne rampe pas complètement, mais on voit que ça s’en vient », poursuit la mère de famille, qui espère un jour voir son fils marcher.

Vers le dépistage néonatal ?

Le cas de Jacob est loin d’être unique, confirme la neurologue pédiatrique Cam-Tu Émilie Nguyen, qui suit des enfants atteints d’amyotrophie spinale au CHU Sainte-Justine.

« Je ne pensais pas qu’on allait voir des effets clairs et nets aussi rapidement », souligne la neurologue qui présentera les résultats du traitement lors de la Conférence sur la thérapie génique organisée par la faculté de pharmacie de l’Université de Montréal, jeudi.

« Il y a une différence en ce qui a trait à la force du tronc des enfants. Ceux-ci se tiennent beaucoup plus solidement. Des parents nous ont dit qu’ils ont tourné le dos quelques secondes et leur enfant avait bougé. Pour eux, avant, c’était impossible, ce genre de situation.  »

– Cam-Tu Émilie Nguyen, neurologue pédiatrique

« Parfois, les enfants n’atteignaient pas leur poids santé parce qu’ils avaient de la difficulté à mastiquer et à avaler. Avec le traitement de Zolgensma, les enfants ont plus d’appétit, ils gagnent du poids, ils ont plus d’énergie pour jouer toute la journée », poursuit la neurologue pédiatrique.

L’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux a d’ailleurs recommandé, en novembre dernier, que l’amyotrophie spinale soit ajoutée à la liste des maladies dépistées dès la naissance des enfants, comme en Ontario et en Alberta. Le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec se penche actuellement sur la question.

« La thérapie génique est un traitement extrêmement coûteux, le traitement le plus cher au monde. On veut donc pouvoir l’utiliser dans la fenêtre où il est le plus efficace, soit avant le début des symptômes », plaide la Dre Nguyen.

Ainsi, les petits patients atteints d’amyotrophie pourraient se développer comme tous les autres enfants de leur âge.


EN SAVOIR PLUS

8
Nombre d’enfants qui naissent avec la maladie chaque année, au Québec, en moyenne

Source: SOURCE : ministère de la Santé et des Services sociaux

1/40
Proportion des personnes qui sont porteuses génétiques de la maladie, c’est-à-dire qu’elles portent le gène mutant sans toutefois être atteintes de la maladie.

Source: SOURCE : Dystrophie musculaire Canada

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