Neuvième palmarès des urgences de La Presse

Le Québec
remonte la pente

Le temps d’attente moyen dans les urgences du Québec a connu cette année sa plus forte baisse en neuf ans. Selon les données colligées par La Presse, les Québécois ont attendu en moyenne 16 h 42, une diminution de 48 minutes.

Selon le président de l’Association des médecins d’urgence du Québec (AMUQ), le Dr Bernard Mathieu, la diminution du temps d’attente est en partie due à la création dans certains hôpitaux d’unités d’hospitalisation brève, où l’on accueille les patients qui ont besoin de 48 à 72 heures de soins. D’autres établissements ont adopté des plans de surcapacité, qui permettent de déplacer un patient sur civière dans les corridors aux étages plutôt que de le laisser aux urgences. « Ça allège vraiment le fardeau aux urgences », note le Dr Mathieu.

Le pourcentage de séjours de 48 heures et plus aux urgences a aussi connu sa plus forte baisse en neuf ans : il est passé de 6,7 % à 5,9 %.

Le Dr Mathieu croit que la population a de quoi se réjouir : « On sort les patients de l’hôpital bien plus vite qu’avant. On a vécu des situations désastreuses et inacceptables dans le passé et on espère ne jamais les revivre. »

AMÉLIORATION À MONTRÉAL

La situation s’est améliorée dans presque toutes les régions du Québec. Même à Montréal, où la durée moyenne de séjour aux urgences a diminué de 1h30 depuis l’an passé pour atteindre 19h30.

La métropole est toutefois encore bien loin des 12 heures d’attente que souhaite atteindre le ministère de la Santé depuis des années. Seulement 27 des 85 hôpitaux de notre palmarès atteignent cette cible, soit le même nombre que l’an dernier.

Dans l’ensemble, le Québec obtient la note de C au palmarès des urgences, la même depuis neuf ans.

« On récolte les fruits du travail des dernières années, mais il y a encore du chemin à faire. »

— Le Dr Bernard Mathieu, président de l'Association
des médecins d'urgence du Québec

Parmi les établissements qui ont vu leur performance s’améliorer se trouve le Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM). La Dre Emmanuelle Jourdenais, chef des urgences, se réjouit que la situation soit meilleure dans deux des trois pavillons de son établissement, soit Notre-Dame et l’Hôtel-Dieu. « Régler le problème aux urgences, c’est un marathon. On a revu nos pratiques. Tout le monde met la main à la pâte et ça commence à porter ses fruits », dit-elle.

Le pavillon Saint-Luc continue toutefois de traîner la patte avec une note de E+. De tous les hôpitaux du Québec, seul l’hôpital d’Argenteuil (situé à Lachute) obtient une pareille note.

CAS TOUJOURS DIFFICILES

Dans certains hôpitaux, la situation demeure difficile. C’est le cas de l’hôpital Fleury, à Montréal, où l’attente moyenne (28h24) est la plus longue au Québec.

À l’hôpital du Suroît, à Valleyfield, l’attente a augmenté de 4 heures cette année pour atteindre 25 heures. Le nombre de séjours de 48 heures et plus a bondi de 13,8 % à 17 %.

Selon le directeur général de l’établissement, François Therrien, le nombre d’ambulances qui arrivent à l’hôpital a augmenté de 30 % depuis cinq ans. La grande majorité des patients qu’elles y amènent sont des gens âgés de plus de 75 ans. « La pression est énorme depuis des mois », dit-il. 

Pour remédier à la situation, l’hôpital du Suroît a notamment reçu de Québec l’autorisation de créer une unité d’hospitalisation brève de 10 lits. « On a aussi 30 patients par jour en fin de soins actifs qui bloquent des lits parce qu’il y a une pénurie d’hébergement pour aînés dans la région. On va améliorer la situation », affirme M. Therrien.

Neuvième palmarès des urgences de La Presse

Exploit à Maisonneuve-Rosemont

Sur papier, l’hôpital Maisonneuve-Rosemont semble avoir réalisé un véritable exploit. La durée moyenne d’un séjour aux urgences est passée de 40 à 24h48. Chef clinico-administrative du programme clientèle des urgences, Luce Gagnon explique que différentes mesures ont été adoptées cette année. « On a notamment fait des ententes avec la première ligne pour que les patients retournent plus rapidement à domicile », dit-elle. Un médecin de plus travaille aux urgences le jour et la nuit.

Depuis quatre mois, un protocole de surcapacité a été adopté. Les patients en attente d’un lit peuvent maintenant être envoyés sur civière aux étages plutôt que d’attendre aux urgences. Trois lits d’hospitalisation brève, réservés pour la gériatrie, ont aussi été ouverts.

Toutes ces mesures ont permis aux séjours de
48 heures et plus de passer de près de 30 % l’an dernier à 18,2 % cette année, et ce, même si les urgences ont reçu 5000 visites de plus.

Le chef des urgences, le Dr Éric Gagnon, est heureux de l’amélioration. « Mais on a fait le plus facile, jusqu’ici. La situation n’est pas beaucoup moins lourde. On arrive au bout de ce qu’on peut faire à l’interne. Il faut maintenant travailler pour empêcher les patients d’arriver en grand nombre aux urgences. » Le Dr Gagnon estime qu’il manque encore de 80 à 100 lits dans l’établissement. « Tant que ça ne sera pas corrigé, on va encore vivre des journées à 140 % d’occupation, comme c’est le cas actuellement. »

Il faut noter que même si l’attente a considérablement diminué à l’HMR en 2013-2014, l’établissement voit sa note au palmarès passer de D+ à D. C’est que malgré une nette amélioration, l’attente de 24h48 reste parmi les plus élevées du Québec. L’HMR obtient donc la même note que l’an dernier pour ce critère. Le nombre de personnes âgées de 75 ans et plus et le pourcentage d’hospitalisations aux urgences, deux critères qui permettent d’évaluer la lourdeur de la clientèle et qui pondèrent les notes du palmarès, ont également beaucoup diminué à l’HMR cette année, ce qui explique que la note globale de l’établissement a diminué. « C’est dommage. Parce que sur le terrain, on voit les améliorations », plaide Mme Gagnon.

— Ariane Lacoursière, La Presse

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