Relations internationales

Une gouvernance féminine plus que jamais nécessaire

En 2022, les États-Unis ont révoqué le droit à l’avortement, l’Afghanistan a privé les femmes d’éducation, et le conflit russo-ukrainien a exposé les Ukrainiennes à une violence basée sur le genre accrue. Cette période de forte instabilité et de dégradation des conditions féminines est doublement marquée par la menace du leadership et de la participation à la vie politique des femmes, selon l’Organisation de nations unies (ONU). Dans ce contexte, il est indispensable de rappeler que la démocratie, la paix et la prospérité nécessitent la pleine participation des femmes aux décisions et aux actions politiques.

Les relations internationales sont marquées, comme l’ensemble de la sphère politique, par une présence résiduelle de femmes dans les hauts postes de décision.

Actuellement, seuls 13 pays sont gouvernés par une cheffe d’État, tandis que 22 % des ministres des Affaires étrangères sont des femmes. À l’ONU, seules 4 femmes dirigent l’une des 15 agences les plus importantes.

Il faut rappeler que l’accès des femmes au pouvoir politique est avant tout un droit. Peu importe leurs compétences, leur efficacité ou leur orientation politique, les femmes détiennent le droit, au même titre que les hommes, de prendre part aux processus de décision.

Par ailleurs, il se trouve que l’implication des femmes dans les relations internationales est déterminante dans la protection des populations vulnérables et la construction d’une paix durable.

Les impacts de la gouvernance féminine

La parité en politique n’est pas seulement une question de quotas d’inclusion. C’est une condition sine qua non dans la mise en œuvre de politiques pertinentes et efficaces. Les équipes dirigeantes ne peuvent appréhender l’ensemble des enjeux et des acteurs concernés par un problème sans être constituées d’une grande diversité de points de vue. Lors des processus de réconciliation, la participation de femmes à la négociation des accords de paix augmente de 35 % la durabilité et l’efficacité de ceux-ci. En cause, la question du genre est mieux prise en compte, impliquant davantage les femmes dans la construction d’une société de fait plus démocratique et inclusive.

Certes, toutes les dirigeantes politiques n’agissent pas nécessairement en faveur de la condition féminine. Mais en raison de leur expérience des rapports de pouvoir, les femmes leaders tendent à être plus sensibles aux enjeux de genre et à encourager des mesures plus inclusives.

La situation des femmes aux États-Unis, en Iran ou encore en Afghanistan nécessite que des actrices politiques soient intégrées à l’encadrement national et international de la situation.

En cause, ces dernières prennent davantage en considération les besoins spécifiques des femmes, d’autant plus cruciaux dans un contexte d’instabilité géopolitique et de récession de certains droits.

Récemment, ce sont les femmes ministres des Affaires étrangères du Canada, de la France, de l’Allemagne et du Royaume-Uni qui ont cherché à mobiliser la communauté internationale autour de la protection des femmes dans le conflit russo-ukrainien.

Il n’est pas question d’hégémonie politique féminine ou d’éradication des dirigeants masculins, comme certains le craignent. La parité des instances de pouvoir ne vise qu’à introduire une diversité de perspectives à la prise de décision. Quelle est la valeur d’une décision prise par une minorité d’hommes blancs pour la pluralité des genres et des races qui constitue la population ? Les pays qui ont le mieux lutté contre la pandémie de la COVID-19 étaient parmi les plus paritaires au monde, à l’image de l’Allemagne, du Danemark ou de la Nouvelle-Zélande. La construction et la mise en œuvre de solutions politiques ne peuvent que bénéficier de la richesse de points de vue, d’expertises et d’expériences apportés par la parité des instances dirigeantes.

L’homogénéité masculine du pouvoir politique doit être reconnue comme telle. L’absence de diversité d’acteurs politiques bénéficie à ceux qui sont représentés, et obstrue la compréhension des situations de tous. De fait, les femmes tendent à être effacées de l’intérêt général, au nom du mythe de la neutralité politique masculine : « Start looking at men as men », dit l’écrivaine Cynthia Enloe. Il faut considérer les hommes comme des hommes, et saisir l’importance d’un pouvoir politique représentatif de la réalité.

« N’oubliez jamais qu’il suffira d’une crise politique, économique ou religieuse pour que les droits des femmes soient remis en question. » Les mots de Simone de Beauvoir n’ont jamais été aussi d’actualité, à l’heure où l’on observe un recul historique des droits des femmes dans diverses régions du monde. La faible intégration des femmes à la sphère politique et internationale est directement liée à la situation, et l’avancée de la parité déterminera l’état de l’égalité et de la prospérité dans le monde.

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