Quelle solution ?

Le Canadien devra trouver les ajustements nécessaires pour freiner le Lightning, mais l’entraîneur-chef Luke Richardson ne veut pas tout chambarder en prévision du deuxième match de la finale de la Coupe Stanley.

Mardi après-midi à l’entraînement du Canadien. Un entraînement pour les 10 réservistes, en fait. Sur une séquence, Joel Armia et Tomas Tatar s’échangent la rondelle autour du gardien Jake Allen.

Armia, un géant aux mains de velours, ancien choix de premier tour, totalise 8 buts en 27 matchs de séries éliminatoires depuis son arrivée à Montréal. Tatar, un bon ailier gauche qui a du vécu, aurait pu connaître une troisième saison de suite de 50 points, n’eût été la pandémie.

Quand on parle de profondeur, elle se trouve aussi ici. Tatar est loin d’être parfait – il n’est pas laissé de côté pour rien – mais il demeure un réserviste de luxe.

Alors non, Luke Richardson n’est pas à court d’options, au lendemain de la cinglante défaite de 5-1 subie aux mains du Lightning de Tampa Bay, en ouverture de la finale de la Coupe Stanley.

On devine qu’Armia était sur la patinoire pour les mêmes raisons qu’il participait à l’échauffement lundi : pour se délier les jambes, après un repos forcé de quelques jours dû à la COVID-19. S’il avait été en santé, il y a lieu de croire qu’il n’aurait pas perdu sa place, puisqu’il était un ingrédient important d’un quatrième trio efficace.

La présence d’Armia à l’entraînement mardi, avec les surnuméraires, n’exclut donc pas son retour ce mercredi. Mais même si retour il y a, Richardson ne semble pas disposé à tout chambarder.

« Je ne pense pas que la solution soit dans les combinaisons, a affirmé l’entraîneur-chef du Canadien, en visioconférence, mardi midi. On a vraiment joué un de nos moins bons matchs. Je ne crois pas que ce soit une question de qui joue avec qui. »

Revirements et nervosité

Richardson a dû parler de « gestion de la rondelle » 15 fois à ses deux dernières conférences de presse, pour expliquer pourquoi le Lightning – particulièrement le trio de Brayden Point – s’est éclaté contre le Canadien.

« Ils sont capables de créer leur propre attaque, ils n’ont certainement pas besoin de notre aide », a lancé l’entraîneur-chef, une formule qu’on l’imagine très bien lancer en pleine séance vidéo avec ses joueurs.

Richardson a ajouté une explication pédagogique à souhait.

« Les revirements les aident, car ça réduit la longueur de la patinoire pour eux et ça leur évite de jouer sur 200 pieds. »

— Luke Richardson

Son explication tient en effet la route pour les trois premiers buts du Lightning. Les deux premiers ont commencé entre la ligne bleue défensive de l’équipe de Tampa Bay et le cercle des mises en jeu ; le troisième, à la ligne rouge centrale.

Richardson et Phillip Danault ont évoqué la nervosité pour expliquer les difficultés de Nick Suzuki et de Cole Caufield, deux des plus jeunes attaquants de l’équipe. « C’était une grosse scène. On avait des papillons », a estimé Richardson.

Suzuki ne s’est pas défilé. « On doit avoir confiance en nos moyens. Mais il y a des moments pour attaquer, a rappelé le jeune centre. Il faut comprendre quand il n’y a rien devant nous et ne pas essayer de créer quelque chose quand on n’a pas d’options. »

Un autre trio défensif ?

Le problème, c’est que l’entraîneur derrière le banc adverse s’est follement amusé avec les confrontations lundi. « On dirait qu’il essaie d’éloigner le trio de Point de nous », a noté avec justesse Phillip Danault, un stratagème qu’il a jugé « un peu choquant ». Choquant, mais dans les règles de l’art.

D’ailleurs, le Québécois ne devait pas s’attendre à revoir si souvent son vieux pote des Tigres de Victoriaville, Yanni Gourde. C’est ce dernier qui a été le rival le plus fréquent de Danault aux mises en jeu lundi : 10 fois, ils ont croisé le SherWood. À l’inverse, Danault a seulement affronté Point trois fois.

Alors, comment maximiser les chances de bien se défendre contre Point et Nikita Kucherov, de loin les deux attaquants les plus productifs des séries 2021 ? Et si la solution passait par la création d’un deuxième trio à vocation défensive, pour appuyer celui de Danault ?

Le scénario a d’ailleurs été évoqué par Stéphane Waite, ancien entraîneur des gardiens du Canadien, pendant notre baladoémission Sortie de zone. Essentiellement, il donnerait à Richardson deux unités capables de se défendre, notamment lors de mises en jeu en zone défensive.

Jake Evans et Paul Byron semblent être des candidats de choix pour évoluer au sein d’une telle unité. Les deux ont la vitesse pour suivre les meilleurs éléments adverses, et ont connu du succès lorsqu’ils étaient jumelés. En saison, selon Natural Stat Trick, Byron a été le compagnon de trio qu’Evans a vu le plus souvent ; ils ont joué 276 minutes ensemble à 5 contre 5. Bilan : 10 buts marqués pour le Canadien, 5 buts accordés.

Cette solution n’est pas parfaite. La bouchée serait grosse pour Evans, qui vient de disputer sa première saison complète dans la LNH, et qui revient tout juste d’une commotion cérébrale. Mais il a connu de très bonnes soirées contre Connor McDavid, montrant un avantage de 3-1 aux buts marqués quand les deux se sont affrontés.

Et puis, en tenant pour acquis qu’Armia revient, qui serait laissé de côté ? Eric Staal, dont le leadership a été tant vanté ? Le jeune Caufield, déjà le tireur le plus habile de cette équipe ? Jesperi Kotkaniemi, toujours meilleur en séries qu’en saison, et qui partage le premier rang du Canadien avec 5 buts ?

Richardson peut toutefois se consoler en se disant que le trio de Point, Kucherov et Ondrej Palat, aussi bon soit-il, n’a pas non plus marqué trois buts par match tout au long des séries. Avant le match de lundi, à 5 contre 5, cette unité montrait un modeste bilan de + 2 (9 buts marqués, 7 buts accordés).

Encore faut-il trouver la solution, même si elle n’est pas parfaite.

Gallagher devrait jouer

Les images de Brendan Gallagher, la tête ensanglantée, ont abondamment circulé. On n’a pas pu lui voir la bouille, puisqu’il ne faisait pas partie des deux joueurs retenus pour parler aux médias. Mais on devine que l’incident, survenu après que Mikhail Sergachev l’eut projeté sur la patinoire après qu’il eut perdu son casque, contribuera à l’image de guerrier du petit numéro 11. Gallagher ressemble de plus en plus à un gars qui a passé trois minutes dans un octogone avec Georges St-Pierre, mais Richardson a trouvé une autre métaphore. « Je viens de lui parler au déjeuner. Gally, c’est Gally. Il a des cicatrices partout à tous les matchs. Il n’est pas très beau en ce moment, il ressemble à une carte routière. Mais c’est un guerrier et il sera à son poste. »

Finale de la Coupe Stanley

Le Canadien souhaite accueillir 10 500 spectateurs

L’opération séduction se poursuit chez le Canadien.

Dans un geste surprenant, l’organisation a fait une sortie publique afin d’implorer la Santé publique du Québec de l’autoriser à accueillir 10 500 personnes au Centre Bell pour les deux ou trois matchs que l’équipe disputera à domicile en finale de la Coupe Stanley.

France Margaret Bélanger, vice-présidente exécutive et chef des affaires commerciales du Canadien, s’est faite la porte-parole du club.

Elle a confirmé que l’équipe était « en conversation » avec le gouvernement du Québec et la Santé publique depuis vendredi dernier, après qu’une demande formelle eut été déposée pour que l’amphithéâtre puisse désormais être utilisé à 50 % de sa capacité. Pour l’heure, 3500 spectateurs y ont accès – le maximum prévu par les autorités –, ce qui représente 16 % des quelque 21 300 sièges disponibles.

Le prochain match à domicile du Canadien, le troisième de la série finale, aura lieu le vendredi 2 juillet.

À noter : le Canadien se dit « ouvert » à l’idée de demander une « preuve quelconque » de vaccination à ses spectateurs, si cela lui permet de favoriser la présence du fameux « septième joueur » dans l’édifice. Une telle preuve n’est actuellement pas requise, mais « on est en train de voir ce que ce ça pourrait être », et la Santé publique devrait être à l’aise avec la solution proposée, a indiqué Mme Bélanger.

Peu importe la réponse de Québec, le port du masque demeurera obligatoire à l’intérieur de l’établissement.

Le Canadien a basé sa demande sur le fait que le Centre Bell est vaste de 2 millions de pieds carrés ; par conséquent, on dit avoir « les moyens nécessaires et l’expertise requise pour maintenir la distanciation physique » entre les personnes sur place. On souhaite par ailleurs maintenir les protocoles déjà en place, qui prévoient 14 zones distinctes, avec leur entrée respective, entre lesquelles les spectateurs ne peuvent pas circuler.

Mme Bélanger a en outre rappelé qu’aucun cas de COVID-19 n’avait été rapporté à l’intérieur du Centre Bell depuis la reprise des activités du club, le 3 janvier dernier. Il importe néanmoins de préciser que les spectateurs n’ont eu accès à l’édifice que depuis le 29 mai dernier, soit depuis six matchs locaux.

Rappelant que le temps presse puisque l’équipe souhaite mettre en vente ses billets pour le match de vendredi, Mme Bélanger a dit s’attendre à une réponse « imminente » de Québec.

La nouvelle d’une entente entre le Canadien et la Santé publique avait fait le tour des réseaux sociaux, lundi après-midi, mais avait rapidement été démentie par le bureau du premier ministre puis par le club lui-même.

L’intervention d’une dirigeante de haut rang de l’organisation renvoie maintenant la balle dans le camp de la Santé publique.

Expertise

Pour étoffer sa demande, le Canadien a présenté une lettre d’appui rédigée par Benoît Mâsse, professeur titulaire à l’École de santé publique de l’Université de Montréal et expert fréquemment cité dans les médias de la province.

Dans cette missive, que le Tricolore a fournie aux membres des médias, M. Mâsse estime que le fait d’augmenter la capacité du Centre Bell pour deux ou trois matchs, et ce, pendant trois heures ou trois heures et demie chaque fois – sans prolongation –, aurait un « impact marginal sinon nul sur l’évolution de la pandémie au Québec » pour les mois à venir. À ce sujet, il cite en exemple des rassemblements sportifs en Europe qui n’ont entraîné que « très peu de transmission du virus ».

Il souligne également qu’au Centre Bell ou ailleurs, « les fans voudront se regrouper pour regarder les matchs ». Ainsi, « il est excessivement difficile de concevoir que de maintenir la limite à 3500 spectateurs mène à une réduction de contacts sociaux ». Il va encore plus loin en estimant que les contacts sociaux au Centre Bell « sont beaucoup plus encadrés que ceux qui ont lieu dans la sphère privée », par exemple dans une résidence.

M. Mâsse estime en outre que le Canadien de Montréal « est en mesure d’épauler la Santé publique du Québec afin d’augmenter la couverture vaccinale au Québec », et ce, alors que la province accuse du retard dans la vaccination des 18-35 ans.

Fait à noter : l’expert étaie ses arguments en fonction d’une « salle comble », et non d’un amphithéâtre à demi plein. Le Canadien a toutefois préféré limiter sa demande à 10 500 spectateurs plutôt que 21 300, prenant notamment en ligne de compte l’impact que l’exception réclamée pourrait avoir sur l’opinion publique.

Matchs du Canadien

La Ville tente toujours d’organiser une diffusion publique

La Ville de Montréal tente toujours de trouver une façon d’organiser une diffusion extérieure des matchs du Canadien de Montréal et la mairesse, Valérie Plante, mise sur le match de vendredi. « Mercredi, c’est ce que j’aimerais, mais on travaille surtout pour un scénario pour quand [le Canadien sera] chez nous, vendredi », a indiqué Mme Plante, lors d’un point de presse mardi. Elle a souligné être en discussion avec les responsables de la santé publique pour savoir si une telle diffusion publique de la finale de la Coupe Stanley sera possible.

— Isabelle Ducas, La Presse

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