Stanley Février

S’ouvrir les yeux au MNBAQ

Réaliser la valeur et la fragilité de la vie. Être solidaire. S’armer de convictions plutôt que de fusils. S’activer pour l’environnement et l’équité sociale. Ces engagements sont le souffle de l’art de Stanley Février. De ses performances, sculptures, photographies, dessins, peintures, installations et vidéos. Le Longueuillois présente, à compter de vendredi, une exposition marquante d’œuvres à visée sociale au Musée national des beaux-arts du Québec.

Québec — C’est un grand moment pour Stanley Février. Après le vernissage de son expo Les vies possibles / Menm vye tintin au Musée d’art contemporain des Laurentides, à Saint-Jérôme, sur la détresse des artistes, l’exposition miroir menm vye tintin. les vies possibles est lancée sur les plaines d’Abraham. Une consécration méritée pour cet artiste boudé pendant trop d’années dans ce Québec où il vit depuis 30 ans. Merci au mouvement Black Lives Matter !

Lisez la critique de l’exposition de Stanley Février à Saint-Jérôme

Le déploiement au MNBAQ est un panorama exhaustif de ses créations réalisées depuis 2009. Stanley Février bénéficie d’un traitement muséal princier grâce au fait qu’il a remporté le Prix d’art actuel 2020 du musée national, soutenu par la Fondation RBC. Un soutien financier qui permet au MNBAQ d’acquérir des œuvres du lauréat pour 50 000 $. « C’est le temps d’acheter du Stanley Février avant que les prix ne montent ! », a d’ailleurs lancé, mardi, Jean-Luc Murray, directeur général du MNBAQ, lors de la visite de presse.

L’exposition en elle-même résulte d’un travail régulier entre l’artiste et Bernard Lamarche, le commissaire de l’exposition, responsable du développement des collections et conservateur de l’art actuel (de 2000 à maintenant) au MNBAQ. Une relation artistique qui a fonctionné grâce à leur potentiel commun d’empathie et à des échanges « transformateurs », dit Bernard Lamarche.

Dans l’entrée de la salle, on remarque la série photographique Le Travail d’Hercule. Une performance réalisée par Stanley Février dans son studio en 2014. Il y entre nu et en ressort vêtu d’un costume, une valise à la main. La mise en scène évoque son expérience de vie, mais aussi l’histoire des Noirs, avec un nœud coulant lugubre.

« Cette performance est intervenue dans une période de ma vie où je n’avais rien et cette intensité de précarité extrême – alors que je bouffais du pain, des sardines et des cans de soupe – m’a permis de prendre mon envol, de décider de mes choix artistiques, de définir comment j’allais réfléchir et transformer mon milieu, dit l’artiste. Avec l’art, un outil qui permet de créer des espaces de rencontres avec l’autre. »

L’expo fait le tour de l’âme artistique de Stanley Février. Bien scénographiée, elle permet de se faire une idée précise de ses champs d’intérêt, de ses objectifs. L’artiste de 45 ans a été très ému de voir ses efforts récompensés, après 12 ans de création et de batailles pour faire connaître son œuvre qui aborde des thèmes universels sous la loupe de ses expériences personnelles et de ses observations.

Stanley Février croit en la transformation sociale et en l’esprit citoyen. Il pense que les violences policières peuvent cesser. Que le racisme ou l’usage maladif d’armes à feu peuvent être atténués par l’éducation et l’équité sociale.

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Annie Gauthier, directrice des expositions et des relations internationales au MNBAQ, s’est adressée à l’artiste d’origine haïtienne, lors d’un discours, mardi, pendant la visite de presse. « Tes œuvres parlent de toi, mais aussi des autres, a-t-elle lancé. On y lit la dénonciation des actes violents, l’hommage aux victimes, la commémoration de la lutte de nos prédécesseurs. Tu nous incites à sortir du silence, à sortir de l’indifférence, à nous tenir debout pour nos convictions […], en pointant les inégalités sociales, en te faisant le porte-voix de ceux qui ne peuvent pas s’exprimer. »

Découvrez le site MAC invisible de Stanley Février

Annie Gauthier a dit admirer « la force de conviction et d’audace » qui anime cet artiste et le pousse « à dire haut et fort ce que d’autres taisent ». « Cette exposition existe pour nous ouvrir les yeux, a-t-elle ajouté. La fragilité humaine qui s’en dégage se pose comme une force vitale essentielle. Stanley nous invite à prendre soin du nous collectif, du soi individuel et de l’autre, quel qu’il soit. »

L’exposition menm vye tintin. les vies possibles est présentée au Musée national des beaux-arts du Québec, à Québec, du 10 décembre 2021 au 16 octobre 2022.

Consultez le site du Musée national des beaux-arts du Québec

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