Critique de danse  Emmac Terre Marine

Mémoire océane

Emmac Terre marine nous entraîne dans un univers imagé et poétique qui raconte le voyage initiatique d’une jeune fille-poisson qui a perdu son père. Une traversée océane entre la vie et la mort, signée Emmanuelle Calvé.

Inspiré du conte inuit La femme squelette et de l’histoire personnelle de Calvé, qui a perdu des êtres chers, Emmac Terre marine est une création à mi-chemin entre l’art de la marionnette, la danse et le conte narré théâtral.

Emmanuelle Calvé a su bien s’entourer. D’abord, la chorégraphe et interprète a convaincu Richard Desjardins d’écrire et de narrer sur scène, de sa voix caverneuse, un conte mariant l’histoire de la créatrice et la trame du conte inuit. Puis, Jorane a accepté de signer la musique, qui accompagne magnifiquement bien cet univers à la fois féerique et contemplatif, où la connaissance de soi devient la quête ultime.

Sur une scène évoquant une nuit étoilée nordique habillée d’aurores boréales, Calvé incarne une jeune fille qui sera accompagnée dans son voyage initiatique par deux interprètes, Jean-François Blanchard et Jody Hegel. À la fois danseurs et marionnettistes, ces derniers font preuve d’une belle sensibilité dans la manipulation des divers objets scéniques, se mettant totalement au service de l’histoire.

De la vie à la mort

Les cycles de la vie, accompagnés par les interventions de Desjardins, sont imagés dans divers tableaux se succédant dans une belle fluidité, grâce à quelques objets aux multiples usages utilisés avec beaucoup d’ingéniosité. De l’exploration ludique et naïve de l’environnement par l’enfant, en passant par l’envol du nid familial, les incertitudes de la vie adulte et le deuil d’un père morse qui a choisi la mort plutôt que la vie.

Un deuil profond, increvable, que la jeune fille ira vivre au fond des eaux tumultueuses de l’océan, égarée dans les abysses de sa mémoire meurtrie, devenant femme-poisson. La mer devient ici symbole de mise à mort, d’oubli, mais aussi de limbes et de renaissance à soi.

Emmanuelle Calvé passe de la candeur de l’enfance à la souffrance devant l’irrémédiable. Sa gestuelle, naïve et candide, fait souvent sourire, mais manque parfois de nuance et de profondeur, malgré l’environnement scénique lui offrant un terreau fertile.

Ceci dit, Emmac Terre marine est une œuvre réussie, qui transcende la frontière des genres. Émouvante et philosophique, la pièce se pose comme un miroir poétique de la quête existentielle humaine, et saura résonner autant chez les adolescents que les adultes.

Au Théâtre rouge du Conservatoire (4750, rue Henri Julien) du 12 au 15 mars.

DANSE DANSE 2014-2015

Le Québec en vedette

Dévoilée hier, la programmation 2014-2015 de Danse Danse mettra le Québec à l’honneur à travers les œuvres de Ginette Laurin, Benoît Lachambre et Danièle Desnoyers, trois chorégraphes montréalais, mais consacrera aussi deux soirées à de jeunes talents d’ici. Cette 17e saison accueillera aussi de grands noms, dont la très attendue compagnie Tanztheater Wuppertal de Pina Bausch. Coup d’œil sur la programmation.

Danse Danse 2014-2015

L’héritage de Pina Bausch

Près de 30 ans après son dernier passage à Montréal, la compagnie de renommée mondiale Tanztheater Wuppertal Pina Bausch est de retour avec Vollmond, une œuvre majeure de la regrettée chorégraphe allemande Pina Bausch. Dans un décor dominé par un monumental rocher, 12 danseurs-acteurs traversent des émotions extrêmes… L’eau y est omniprésente : elle tombe du ciel en pluie fine, forme une rivière sur la scène, provoquant un véritable déluge. Du 12 au 15 novembre 2014.

Danse Danse 2014-2015

Le centenaire du Sacre du printemps

Après avoir présenté le magnifique Vertical Road, le Britannique d’origine bangladaise Akram Khan est de retour avec iTMOi (in the mind of igor). S’inspirant de la personnalité fantasque de Stravinsky, le chorégraphe plonge dans une épopée dantesque menée tambour battant par 11 danseurs. Le créateur s’associe à trois compositeurs et ajoute au thème du sacrifice présent au cœur du Sacre du printemps ceux de l’amour et de la foi, gardant seulement l’essence de la partition et les structures rythmiques qu’il applique aux mouvements inspirés du Kathak. Du 30 octobre au 1er novembre 2014.

Danse Danse 2014-2015

Tango avec Sidi Larbi Cherkaoui

Véritable habitué de la programmation de Danse Danse, Sidi Larbi Cherkaoui est de retour à la Place des Arts avec M¡longa. Accompagné de dix maîtres du tango argentin, d’un couple de danseurs contemporains, de cinq musiciens sur scène et des images de Buenos Aires, le chorégraphe d’origine belgo-marocaine célèbre l’essence du tango tout en le revisitant dans un décor de salle de bal. Du 17 au 21 février 2015.

Danse Danse 2014-2015

Pleins feux sur le Québec

Trois piliers de la danse contemporaine québécoise sont au programme. Ginette Laurin ouvrira cette 17e saison en célébrant les 30 ans de sa compagnie O Vertigo. Soif, une pièce pour huit danseurs, brosse le portrait d’une humanité imparfaite. Danse Danse offre aussi au public la reprise de Prismes, créée en 2103 par Benoît Lachambre, lauréat du Grand Prix de la danse de Montréal. Enfin, dans Paradoxe Mélodie, Danièle Desnoyers peaufine le dialogue entre mouvement et son, profitant du grand plateau que lui offre Danse Danse.

Danse Danse 2014-2015

La relève à l’honneur

Danse Danse réaffirme sa vocation d’incubateur de talents en offrant une vitrine à trois compagnies de la relève. Emmanuelle Lê Phan et Elon Höglund – le tandem de Tentacle Tribe – métissent danses urbaines et danse contemporaine dans la version finale de Nobody Likes a Pixelated Squid, tandis que Sasha Kleinplatz, cofondatrice de Wants & Needs Danse, revisite dans la même soirée Chorus II avec six danseurs et un musicien. Quant au créateur pluridisciplinaire Alan Lake, révélation de la scène émergente de Québec, il croise danse, arts visuels et film dans sa nouvelle création Ravages.

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