La carte cachée
S’il fallait parier sur les chances de Kelly-Ann Nadeau d’être sélectionnée par une équipe de la LPHF dans quelques jours, il serait possible que les cotes ne lui soient pas favorables.
Dans un repêchage de 42 joueuses qui devrait être dominé par des vétéranes européennes et des joueuses issues de la NCAA, la défenseuse des Carabins de l’Université de Montréal, vu son jeu sobre, n’apparaît pas comme une tête d’affiche, à plus forte raison en ayant évolué pour une université canadienne.
Or, s’il fallait parier sur les chances de Kelly-Ann Nadeau de jouer dans la LPHF, la discussion serait différente. Car la native de Mont-Laurier suscite l’enthousiasme chez tous ceux et celles qui ont suivi son parcours des dernières années. C’est ce qui en fait l’une des Québécoises les mieux positionnées pour faire le saut chez les professionnelles.
Une sorte de carte cachée qui, choisie ou pas, entendra vraisemblablement son téléphone sonner rapidement, que ce soit au repêchage ou après, pour une invitation à un camp d’entraînement, par exemple.
« Je ne suis pas une joueuse flashy sur le plan offensif. Je suis plutôt une joueuse défensive, qui va jouer physique, bien se positionner et utiliser son bâton pour empêcher l’adversaire d’exécuter des jeux. »
— Kelly-Ann Nadeau
Bien qu’elle évoque aussi sa capacité à bien sortir la rondelle de sa zone et à « battre et anticiper la pression », elle insiste : « Ma force, c’est la défense. »
Sans la contredire, Philippe Trahan, entraîneur adjoint chez les Carabins, n’est « pas prêt à dire que c’est seulement une défenseuse à caractère défensif ».
« Si ses statistiques peuvent laisser penser ça, c’est parce qu’elle joue contre les meilleures joueuses adverses, nuance-t-il. Pour moi, c’est une défenseuse complète. »
Lui-même ajoute sa liste de qualités : son « excellent lancer » qui lui a donné du temps de glace en avantage numérique, ou encore ses feintes et son « imprévisibilité » en possession du disque en zone offensive qui se sont nettement améliorées au cours de la dernière saison.
En définitive, ses 15 points en 25 matchs l’ont placée au troisième rang chez les défenseuses du RSEQ, doublant essentiellement son rythme de production de 25 points à ses 76 premiers matchs universitaires en carrière. Cette campagne dominante lui a valu une place sur la deuxième équipe d’étoiles au Canada en 2023-2024.
« C’est une personne très humble », ajoute Trahan.
On l’aura en effet deviné.
« Prudente »
Interrogée sur ses succès offensifs de la dernière année, Kelly-Ann Nadeau préfère saluer le « travail d’équipe » et les « affinités » qu’elle a développées avec ses coéquipières au fil des années.
La saison perdue en raison de la pandémie en 2020-2021 ayant donné aux étudiants-athlètes la possibilité de disputer une campagne supplémentaire, elle se dit « vraiment contente » d’avoir choisi de porter l’uniforme bleu une année de plus.
« C’est vraiment là que je suis sortie de ma coquille. J’ai adoré ma carrière avec les Carabins. Je n’aurais pas pu choisir une meilleure équipe ou un meilleur endroit pour mon encadrement. »
— Kelly-Ann Nadeau
Son souci défensif, elle l’attribue notamment aux enseignements « stratégiques » de l’entraîneuse-chef Isabelle Leclaire, mais aussi à Éric Bouchard, son copain, entraîneur adjoint chez les Cataractes de Shawinigan, dans la LHJMQ, avec qui Nadeau travaille sur le plan individuel depuis des années.
Elle est consciente qu’au sein d’une cuvée très relevée, elle doit rester « prudente » quant à ses chances d’être repêchée la semaine prochaine. Son nom, toutefois, circule manifestement. Son entraîneuse s’assure que le « bouche-à-oreille » suive son cours. Et une autre entraîneuse-chef du circuit universitaire – Julie Chu, de Concordia – l’a spontanément complimentée, la semaine dernière, pendant une discussion au sujet d’une autre joueuse.
Sans se confondre en spéculations, on notera que deux directeurs généraux de la LPHF, Danièle Sauvageau à Montréal et Pascal Daoust à New York, sont des anciens des Carabins. Et Ottawa a pigé chez les Bleues en sélectionnant Audrey-Anne Veillette il y a un an. On pourrait aussi présumer que Toronto est en bonne posture pour avoir des antennes dans le hockey universitaire canadien.
Qu’à cela ne tienne, elle « reste quand même prudente », affirme Kelly-Ann Nadeau. Elle évoque un classement établi par le Hockey News, qui la place au 69e rang parmi les joueuses disponibles, donc hors du top 42. Elle regardera la séance de repêchage chez elle, avec sa famille, celle qui l’a toujours appuyée. « Je préfère ça », dit-elle.
Elle a eu des discussions avec des clubs européens, notamment en Suède et en Suisse. La LPHF demeure toutefois son « plan A », celui pour lequel elle se concentrera au cours de l’été. Elle travaillera à améliorer sa vitesse, notamment en contrôle du disque.
Si sa progression passée est garante de celle qui l’attend encore, le plan A est certainement à sa portée. Surtout vu la force de caractère qu’on lui attribue, personne ne pariera contre Kelly-Ann Nadeau.
Qui est Kelly-Ann Nadeau ?
Défenseuse
26 ans
Née le 30 mars 1998 à Mont-Laurier
40 points en 101 matchs avec les Carabins de l’Université de Montréal
Membre de la deuxième équipe d’étoiles USports en 2023-2024