moisissures dans les écoles

Les tests d’air remis en question

Le cas de l’école Harfang-des-Neiges, à Pierrefonds, est éloquent. Le personnel et les élèves de cet établissement de la Commission scolaire Marguerite-Bourgeoys (CSMB) se sont longtemps plaints de problèmes de santé qu’ils associaient aux moisissures. Les tests de prélèvement d’air ne révélaient pourtant rien.

Il aura fallu des années et des recherches poussées, dont l’intervention d’un chien renifleur, pour comprendre qu’il y avait bel et bien un problème de qualité de l’air.

Il n’est pas rare que les tests d’air entraînent des « faux négatifs ». Même s’ils sont populaires dans les écoles, ces tests sont remis en question par plusieurs. En effet, les experts n’ont pas tous la même qualification, l’interprétation des résultats varie d’une firme à l’autre, il n’existe pas de standardisation uniforme et, surtout, la fiabilité des tests est souvent mise en doute.

Que valent les tests d’air ?

« Les tests d’air ne devraient jamais être pris isolément. […] La littérature scientifique est claire à ce sujet. Il faut tenir compte d’un ensemble d’informations. L’historique d’un bâtiment, l’historique des plaintes, l’état de santé des gens, l’inspection du bâtiment et les mesures d’humidité des matériaux sont les éléments les plus déterminants. Tant que ces problèmes n’ont pas adéquatement été corrigés, on peut m’apporter n’importe quel test d’air qu’on voudra, je ne peux pas, scientifiquement, conclure qu’il n’y a pas de problème sur la base d’un simple test. »

– Dr Louis Jacques, médecin à la Direction de la santé publique de Montréal

« S’il y a des signalements, la Direction de la santé publique va faire une enquête avec un questionnaire de santé auprès de la population. Dans certaines situations, les prélèvements d’air peuvent être indiqués, mais pas comme première mesure. »

– Horacio Arruda, directeur national de santé publique du Québec

« Les tests d’air ne sont pas fiables. […] À la suite de travaux, il est préférable de faire une inspection visuelle pour s’assurer que tout ce qui devait être enlevé a été enlevé. »

– Anne O’Donnell, hygiéniste industrielle chez HSST Conseil, qui utilise notamment des chiens renifleurs de moisissures

Les moisissures cachées à l’intérieur des murs, invisibles, sont-elles nocives ?

« On entend dire que les moisissures cachées, ce n’est pas grave. C’est archifaux. [...] Même si l’eau a cessé de couler, elle peut avoir causé une contamination qui est restée à l’intérieur des structures, et les contaminants persistent dans une fine poussière. »

– Dr Louis Jacques, médecin à la Direction de la santé publique de Montréal

« Tout dépend s’il y a une circulation et une prise d’air qui fait en sorte que les champignons se retrouvent en contact avec l’air ambiant. Ils ont souvent tendance, avec le temps, à sortir vers l’extérieur. Le bois contaminé va finir par contaminer le plâtre et sortir. [...] Quand il y a un champignon dans le mur, il faut parfois démolir complètement le mur. »

– Horacio Arruda, directeur national de santé publique du Québec

« Des microtoxines peuvent quand même sortir des murs. »

– Anne O’Donnell, hygiéniste industrielle chez HSST Conseils

« La maçonnerie extérieure est presque toujours contaminée par des agents fongiques. Dans beaucoup de vieux immeubles, cette contamination peut pénétrer jusqu’à une certaine profondeur à l’intérieur de la maçonnerie, sans que ça génère une contamination par des spores de moisissures ou par des microtoxines à l’intérieur des zones habitées. Il y a des exceptions, mais ce n’est pas tous les cas, loin de là. »

– Jean-Pierre Gauvin, hygiéniste environnemental et directeur général de Contex Environnement

Les problèmes de santé peuvent-ils être causés par autre chose que les moisissures ?

« Ce qui nous saute aux yeux dans une école où il y a une bonne prévalence de plaintes, c’est une ventilation qui n’est pas suffisante pour évacuer tous les aérosols biologiques qui sont dégagés par tous les petits enfants qui toussent, qui respirent. La démonstration de cela est la mesure de concentration de dioxyde de carbone. Partout où je mesure des concentrations de dioxyde de carbone dans les lieux où les gens se plaignent (et qu’il n’y a pas de traces visibles de moisissures), je vois souvent une corrélation entre le taux de CO2 et le taux de plaintes qu’on a. »

– Jean-Pierre Gauvin, hygiéniste environnemental et directeur général de Contex Environnement

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