Prolongement de la ligne bleue

« Cette fois-ci, c’est la bonne », jure Québec

Cette fois est-elle la bonne pour le prolongement de la ligne bleue du métro de Montréal ? Oui, jure Québec. Un budget de 5,8 à 6,4 milliards a finalement été alloué vendredi au projet, qui fait l’objet d’engagements gouvernementaux depuis plus de 30 ans. Les autorités se félicitent d’avoir dégagé des économies d’environ 1,1 milliard dans les derniers mois. Mais il faudra attendre à 2029 avant de pouvoir embarquer dans le métro à Anjou.

« La patience a ses limites »

« Je vous assure que cette fois-ci, c’est la bonne. Ça fait trop longtemps que les citoyens de l’Est l’attendent et la patience a évidemment ses limites. […] Le temps est venu de se mettre à l’ouvrage », a affirmé d’emblée la ministre déléguée aux Transports et responsable de la Métropole, Chantal Rouleau, en conférence de presse vendredi. Le gouvernement Legault versera dans un premier temps 577 millions de dollars au comptant, et d’autres sommes s’ajouteront par la suite. Ottawa, de son côté, a déjà annoncé injecter 1,3 milliard dans le projet. La date de livraison du prolongement est toutefois de nouveau reportée ; elle est maintenant fixée à 2029. En avril, Québec, inquiet de l’augmentation « pas acceptable » des coûts liés au prolongement de la ligne bleue, avait mis sur pied un groupe d’action. Jusqu’ici, ce groupe estime avoir dégagé jusqu’à 1,1 milliard d’économies dans les derniers mois, notamment grâce à la décision de construire la station Anjou sous l’autoroute 25 et non à l’ouest, comme il était initialement prévu, afin de minimiser les expropriations qui devront être faites aux Galeries d’Anjou.

Montréal « en mode rattrapage », dit Plante

Au côté de la ministre, la mairesse Valérie Plante a toutefois rappelé qu’il faudra aller plus loin, Montréal demeurant « en mode rattrapage » en matière de transports collectifs. « Depuis 1988, aucune station n’a été inaugurée sur l’île de Montréal. Trente-quatre ans, c’est long longtemps, ça. À travers le monde, les autres grandes métropoles ont développé en continu leurs transports collectifs. […] Il faut continuer à investir et développer le réseau », a-t-elle dit, alors que des différends existent toujours entre CDPQ Infra et son administration au sujet du Réseau express métropolitain (REM) de l’Est. Montréal déboursera 300 millions pour soutenir l’aménagement urbain autour du tracé. Mme Plante estime que de 12 000 à 13 000 logements pourront être construits le long du tracé. On ignore encore quelle sera la répartition de ces logements, par types ou par emplacement. « On est en train de livrer un patrimoine pour la mobilité durable à Montréal », a réagi le président du conseil d’administration de la Société de transport de Montréal (STM), Éric Alan Caldwell.

Cinq stations

Québec prévoit publier dans les prochaines semaines un « avis de qualification » pour des travaux impliquant l’utilisation d’un tunnelier, afin de creuser le tunnel du métro qui reliera Anjou à Saint-Michel. Il faudra environ 18 mois pour lancer les travaux avec le tunnelier, une fois que l’appel d’offres sera réalisé. Une série de mesures seront aussi prises pour réduire les coûts, dont la réduction du nombre d’ascenseurs, d’escaliers mécaniques ou d’édicules secondaires, comme l’avait recommandé le groupe de travail l’été dernier. Le scénario comprend toujours cinq stations, même si l’hypothèse d’un scénario comprenant quatre stations avait circulé (on éliminait la station Viau). Cette option n’a finalement pas été retenue. Aller de la station Jean-Talon à la station Anjou prendra 15 minutes, en moyenne. Le stationnement incitatif sera aussi retiré à Anjou, pour dégager d’autres économies importantes. Deux terminus additionnels de bus seront toutefois ajoutés le long de la ligne de métro et une interconnexion est prévue avec le SRB Pie-IX et le REM de l’Est. Le centre commercial Le Boulevard, à l’angle de Jean-Talon et de Pie-IX, pourra rester en activité, mais il sera redéveloppé.

Budget maximal de 6,4 milliards

À ce jour, le « budget maximal » prévu pour le projet est de 6,4 milliards. Un « ajustement » de 600 millions est prévu en fonction des taux d’intérêt et d’indexation « dans le contexte de la surchauffe du marché et de l’inflation ». Une vingtaine de sites devraient faire l’objet d’expropriations ; 30 % des acquisitions sont déjà conclues, alors que 50 % des acquisitions sont « en cours ». Le reste est à venir. En juin 2019, Québec avait approuvé un budget de 4,5 milliards pour le prolongement de la ligne bleue. Une annonce officielle avait même eu lieu en juillet 2019, avec le premier ministre Justin Trudeau. Mais la facture n’avait cessé de gonfler depuis, en raison du coût des expropriations.

Un accueil non sans critiques

« Le prolongement de la ligne bleue, ça veut dire plus de temps en famille. On va courir moins pour préparer le souper en revenant du travail », a affirmé le député libéral Pablo Rodriguez, soulignant que ce nouveau tronçon pourrait même permettre à des Montréalais « de ne plus avoir de voiture ». Dans les rangs de l’opposition à l’hôtel de ville, Aref Salem, chef d’Ensemble Montréal, a applaudi « un pas dans la bonne direction pour cet important projet de transports collectifs », en déplorant toutefois « l’immobilisme de l’administration Plante qui n’a pas exercé un contrôle serré sur l’avancement du projet auprès de la STM ». « Il aura fallu que le gouvernement du Québec reprenne le dossier en main pour qu’il avance enfin », a-t-il fustigé. Le président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Michel Leblanc, a de son côté réclamé que le prolongement de la ligne bleue s’inscrive « dans une nouvelle approche intégrée, où l’on peut planifier la construction progressive de nouvelles stations, le déploiement des REM sur l’île et dans la région métropolitaine et le prolongement éventuel de la ligne orange jusqu’à la gare Bois-Franc ».

25 000

Au total, plus de 25 000 usagers utiliseront le nouveau tronçon de la ligne bleue en heure de pointe et 5300 automobilistes seront ainsi retirés de la route, selon les estimations des autorités.

Source : Bureau de projet de la ligne bleue

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