Hécatombe dans les centres pour aînés

Trudeau blâme les provinces

Ottawa — Justin Trudeau jette la pierre aux provinces, qui ont, selon lui, failli à leur tâche de protéger les aînés, à la lumière d’un rapport accablant sur le nombre de morts survenues dans les centres de soins de longue durée au pays.

« C’est leur responsabilité et c’est eux qui ont échoué à bien protéger nos aînés pendant cette pandémie », a lancé le premier ministre fédéral, jeudi, en faisant référence à ses homologues provinciaux et territoriaux.

Il réagissait à un rapport de l’Institut canadien d’information sur la santé, qui place le Canada en position fort peu enviable en comparaison avec 16 autres pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques.

Selon cette analyse, la proportion de morts dues à la COVID-19 recensées dans les centres de soins de longue durée du Canada était environ le double de la moyenne des autres pays développés.

Alors qu’ils étaient chiffrés à moins de 10 % en Slovénie et en Hongrie, à 31 % aux États-Unis et à 66 % en Espagne, ils représentaient 81 % des morts au Canada, et ce, en date du 25 mai dernier.

« Je suis profondément préoccupé », a exprimé Justin Trudeau lors de sa conférence de presse à Rideau Cottage, exhortant les premiers ministres des provinces et des territoires à dire oui au transfert ciblé de 14 milliards de dollars que le fédéral a mis sur la table.

« C’est pour ça qu’on a offert 14 milliards, incluant de l’argent pour nos aînés […] pour améliorer la situation. Et on espère que les provinces vont accepter cet argent et faire les changements nécessaires », a-t-il plaidé.

Si le premier ministre canadien a déjà déploré, dans des allocutions antérieures, que le système de santé ait laissé tomber les aînés dans la crise de la COVID-19, il n’était jamais allé jusqu’à blâmer directement les provinces et les territoires.

« un certain échec », reconnaît Arruda

Il l’a fait à quelques heures de la 15e conversation téléphonique hebdomadaire avec ses homologues depuis le début de la pandémie. Une déclaration que digère mal le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford.

« Je suis un peu choqué par son commentaire, pour être franc », a laissé tomber celui-ci lors de son point de presse quotidien à Queen’s Park. « Nous sommes censés être tous dans le même bateau, soyons-y ensemble », a-t-il ajouté.

Du côté de Québec, le directeur national de santé publique, le DHoracio Arruda, n’a pu nier qu’échec dans les CHSLD il y avait eu. Selon les plus récentes données, 3497 des 5448 morts totales liées à la maladie, soit les deux tiers, s’y sont produits.

« Je ne peux pas dire qu’il n’y a pas eu un certain échec à la quantité de personnes qui sont décédées. Et là, la cause exacte de ça, elle est complexe. Elle est multiple. Je ne veux pas accuser [quiconque] ou quoi que ce soit », a-t-il soutenu en conférence de presse.

Au bureau du premier ministre Legault, on a répondu en ces termes :

« Si le premier ministre Trudeau se demande ce qu’il faudra faire à l’avenir pour éviter les drames dans les CHSLD au Canada, nous avons une première piste de solution pour lui : augmenter enfin les transferts fédéraux en santé. »

— Ewan Sauves, attaché de presse du premier ministre Legault, à La Presse

L’enjeu du financement de la santé s’est de nouveau imposé dans le contexte de la crise de la COVID-19. Face à une hécatombe, plusieurs provinces sont remontées au créneau afin de réclamer une bonification du Transfert canadien en matière de santé.

Le gouvernement québécois estime que de 50 %, la part du financement fédéral pour le réseau de santé est passée à 23 %. Si rien ne bouge, on dégringolera à 20,4 % dans une décennie environ, selon une évaluation faite en mars 2019 par Québec.

Jusqu’à présent, Ottawa n’a pas affiché d’intention de plier. En revanche, Justin Trudeau veut discuter de l’avenir du réseau avec ses partenaires, tout en insistant sur le fait qu’il respecte leur compétence en matière de santé.

— Avec La Presse canadienne et Ariane Lacoursière, La Presse

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