Environnement

Prendre le virage zéro déchet

Le mouvement « zéro déchet » fait son chemin partout sur la planète et gagne Montréal. Les 14 et 15 octobre prochains, la ville accueillera un premier festival consacré à cette tendance, où seront présentés des conférences, des tables rondes, des entreprises et ateliers visant une consommation écoresponsable. Réflexion en cinq points sur la question.

L’instigatrice

La Française Béa Johnson vivait à fond son rêve américain en Californie avant que la crise économique ne la force à revoir sa façon de consommer et ne la convainque de pousser plus loin sa démarche. En un an, sa famille a réussi à réduire sa production de déchets à un bocal par année, faisant la démonstration que vivre avec moins, c’est non seulement possible, mais peut-être mieux.

À travers son blogue, la papesse de l’antigaspillage a lancé le mouvement zéro déchet et fait des émules partout dans le monde. Sa pensée repose sur cinq principes – refuser, réduire, réutiliser, recycler et composter – décrits dans Zéro déchet, son livre traduit en 17 langues.

Refuser

Laure Caillot, auteure du blogue Lauraki, a adopté le mode de vie zéro déchet en famille il y a trois ans et n’aurait jamais pensé pouvoir réduire autant le contenu de sa poubelle. « Refuser, explique-t-elle, c’est surtout repenser les gestes de sa vie quotidienne et se demander si on a besoin de chaque objet qu’on utilise. En refusant les sacs d’emballage et les objets promotionnels, par exemple, on envoie le message aux entreprises de changer leur approche. »

La conférencière et consultante zéro déchet Mélissa de La Fontaine abonde dans le même sens. « Les entreprises ne produisent pas pour n’importe qui : elles produisent pour nous, affirme-t-elle. Si on crée une demande pour le bio, l’équitable, le zéro déchet, le seconde main, il y en aura davantage. »

Réduire

Dans une volonté de moins consommer, Béa Johnson a réduit sa garde-robe à une vingtaine de vêtements et l’aménagement de sa maison au strict minimum. L’exercice lui a permis de constater qu’une telle approche simplifie aussi sa vie.

La pensée zéro déchet est une porte d’entrée pour se pencher sur l’environnement et adopter des solutions très concrètes afin d’agir, souligne Mélissa de La Fontaine. « Pour ma part, ça a commencé avec une réflexion : chaque fois que je jetais une chose, je me questionnais sur sa nécessité. J’ai éliminé graduellement beaucoup de choses de ma consommation. »

Il y a quatre ans, elle s’est mise à la recherche de produits en vrac et s’est intéressée aux façons de confectionner elle-même certains produits, dont ses cosmétiques et ses produits d’entretien ménager. « Au début, je devais faire plusieurs magasins pour trouver ce dont j’avais besoin. Maintenant, les épiceries zéro déchet arrivent à répondre à une demande plus globale. »

Certains produits restent difficiles à trouver, convient-elle. C’est le cas pour les laits (d’origine végétale ou non) et les produits plus spécialisés comme les aliments asiatiques. « Dans ce cas, on peut opter pour des produits offerts dans des emballages recyclables », suggère-t-elle.

Réutiliser

Réutiliser, c’est donner une seconde chance à tout ce qui peut avoir une seconde vie ou être acheté d’occasion, explique Béa Johnson sur son blogue. « Il faut comprendre que ce que nous retenons chez nous, ce sont des objets qu’on empêche d’être utilisés par d’autres. »

Au cours de sa première année zéro déchet, Mélissa de La Fontaine a justement investi dans des objets réutilisables plutôt que jetables. Les dépenses ont été plus élevées au départ, mais lui permettent d’économiser en fin de compte sur les cosmétiques, notamment, et les produits d’entretien qui se limitent désormais au vinaigre blanc et au bicarbonate de soude. Pour l’alimentation, le constat est cependant moins tranché, puisqu’elle a depuis opté pour le bio et des options santé.

L’offre pour le zéro déchet est en croissance. N’y a-t-il pas un danger de tomber dans la consommation de l’anticonsommation ? « C’est sûr que quand on a déjà des choses à la maison, on commence par utiliser ce qu’on a, répond Laure Caillot. Rien ne sert d’avoir des sacs recyclables à ne plus savoir quoi en faire. » Le but n’est pas de tout racheter en zéro déchet, fait-elle valoir, mais d’évaluer d’abord ce qu’on a pour le remplacer, en bout de vie, par un choix écoresponsable, ou en le faisant circuler et en achetant d’occasion.

Recycler

L’idée est de réduire sa consommation à la source : le recyclage arrive toujours à la fin du processus avec le compostage, quand on n’a pu donner une seconde vie à un objet.

« Le recyclage n’est pas assez, estime Mélissa de La Fontaine. Parfois, on a tendance à ne considérer que ce qu’on voit dans notre poubelle à nous, mais avant d’arriver là, l’objet a créé des déchets, a pollué, a demandé des ressources, a été transporté. On dit que le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas. Oui, le recyclage est important, mais ce n’est pas ça qui va sauver le monde. »

Composter

Avant de jeter un aliment au compost, questionnez-vous, suggère Stéphanie Faustin, auteure du livre de recettes La cuisine zéro déchet : ces « rebus » peuvent-ils encore être utilisés ? Des pelures de légumes font des chips au goût rustique, des peaux d’orange parfument le sucre, le pain rassis fait un excellent pudding.

Le zéro déchet n’est pas une religion, précise Mélissa de La Fontaine, mais un objectif vers lequel tendre. « C’est beaucoup de changements. C’est pour ça que je dis souvent aux gens d’en faire un à la fois. Une fois que c’est intégré, il n’y a plus moyen de revenir en arrière parce qu’on comprend pourquoi on le fait et on découvre d’autres avantages. » Ce qu’elle y a gagné ? Une vie plus simple, plus saine, plus économique, mais surtout « une incroyable cohérence » avec les valeurs qu’elle avait déjà.

749 kg

C’est la quantité de déchets produits par chaque Québécois en une année. La province se classe sur ce point parmi les plus polluantes au pays, selon Statistique Canada.

Faire son épicerie en vrac

De nouvelles épiceries visant à réduire la consommation d’aliments emballés émergent dans différents quartiers. On y apporte ses propres contenants et sacs d’emballage.

Loco : Dans cette épicerie située dans le quartier Villeray, on offre une gamme complète de produits alimentaires secs, frais et congelés, et d’usage courant.

Chez NousRire : On passe une commande en ligne, puis on récupère ses produits (en apportant ses propres bocaux) à un point de chute.

Méga Vrac : Cette épicerie de la Promenade Masson propose plus de 700 produits en vrac, dont des huiles, du miel et des épices.

Vrac & Bocaux : Une gamme de produits bio y sont offerts en vrac, au cœur de la Petite-Patrie.

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