Ski

Mont Tremblant célèbre ses 75 ans

Tremblant, plus importante station de ski au Québec, célèbre aujourd’hui son 75e anniversaire. Son histoire se raconte en deux grands chapitres. 

Comme dirait possiblement le conteur Fred Pellerin, c’est l’histoire de deux « Joes ». Tout d’abord le « grand » Joe : Joe Ryan, qui faisait 6 pi 3 po, homme d’affaires de Philadelphie qui a construit la station en 1938-1939. Puis, le « p’tit » Joe : Joe Houssian, homme de petite taille (environ 5 pi 8 po) mais avec de grandes poches, président d’Intrawest, venu en 1991 achever le rêve de Joe Ryan et faire de Tremblant la station que l’on connaît aujourd’hui.

LE SKI AVANT LES REMONTÉES 

L’histoire de Mont Tremblant débute avant l’arrivée des premières remontées en 1939. C’est en 1932 que s’y déroule la première compétition de ski alpin au Canada. Au début de l’hiver, trois membres du Red Birds Ski Club (Université McGill) se rendent au sommet par la piste de la tour à feu et réalisent le potentiel qu’offre cette montagne pour le ski. En mars de la même année, on y tient la première Québec Kandahar, épreuve sanctionnée par le Club de ski Kandahar de Mürren, en Suisse. 

ACCIDENT DE PARCOURS 

C’est cependant un véritable accident de parcours qui mène à la création de la station de ski. Joe Ryan séjournait à l’Auberge Gray Rocks de Saint-Jovite durant ses visites de prospection. Un jour, il entendit deux hommes discuter de la possibilité de grimper en skis au sommet du mont Tremblant. Aventurier de nature et aussi skieur, Ryan a pu convaincre les deux skieurs de se joindre à l’expédition. Le lendemain, après une longue et difficile ascension avec peaux de phoque dans une neige profonde, le trio arrive au sommet et fait face à un paysage extraordinaire. C’est à ce moment que la randonnée prit un virage inattendu. Joe Ryan déclara à ses deux partenaires, Harry Wheeler, propriétaire de Gray Rocks, et Lowell Thomas, chef d’antenne de CBS News : « Je crois n’avoir jamais rien vu de si beau. Mais cette ascension est trop difficile. Je vais devoir trouver une solution. Je vais installer une remontée mécanique et bâtir ici la plus belle station en Amérique du Nord. » L’année suivante, une première remontée mécanique rend la montagne accessible aux skieurs. 

INTRAWEST TERMINE LE RÊVE DE JOE RYAN 

C’est avec l’arrivée de Joe Houssian et d’Intrawest, en 1991, que Mont Tremblant prendra son deuxième souffle. Après avoir métamorphosé Whistler, en Colombie-Britannique, la faisant passer d’une station locale à la plus importante destination ski en Amérique, Hussian et son équipe arrivent avec l’idée de faire de Tremblant la plus importante station dans l’est du continent. La suite est connue. Près d’un milliard est investi en 22 ans. Le village québécois au pied du versant sud est construit, deux nouveaux versants de ski s’ajoutent et font passer le nombre de pistes d’une quarantaine à 95. De nouvelles remontées et télécabines au goût du jour font aussi leur apparition. Tremblant est devenu le principal moteur économique des Hautes-Laurentides et attire maintenant des visiteurs de partout.

L’HISTOIRE PAR SES PISTES 

Au fil des ans, Mont Tremblant a su conserver son histoire par la nomenclature de ses pistes. 

Nansen. Nommée pour Kare Nansen, petit-fils du grand explorateur norvégien Fridtjof Nansen, le premier homme à traverser le Groenland en 1888. Kare, qui connaissait bien le ski, fut engagé par Joe Ryan pour superviser la construction de la station et en gérer l’auberge. Cette piste fut aussi tracée par une autre légende du ski canadien, Hermann « Jackrabbit » Johannsen, Norvégien d’origine et Québécois d’adoption, qui fut le premier grand promoteur de ski dans les Laurentides et ailleurs. 

Lowell Thomas. Membre de cette importante expédition au sommet de la montagne en 1938 avec Joe Ryan et Harry Wheeler. Thomas revenait régulièrement à Mont-Tremblant, d’où il diffusait en direct ses bulletins de nouvelles radio vers les États-Unis, contribuant ainsi à la notoriété nord-américaine de la station. 

Curé Deslauriers. Le curé Deslauriers de la paroisse de Saint-Jovite usa de son influence pour convaincre le premier ministre de l'époque, Maurice Duplessis, d’accorder à Joe Ryan les permis nécessaires à la construction de la station et ainsi créer de nombreux emplois pour ses paroissiens. 

Duncan. Charlie Duncan, employé de la première heure, fut durant de longues années gérant du Devil’s River Lodge, l’auberge du versant nord. Son fils Peter accédera à l’équipe nationale de ski et deviendra champion canadien. 

McCulloch. En l'honneur du plus élégant et du plus spectaculaire des directeurs de l’école de ski, Ernie McCulloch. Surnommé le roi de la montagne, il dirigea l’école de ski et accueillit les célébrités (entre autres Jackie Kennedy et Pierre Elliott Trudeau), de 1954 à 1969.

Les pistes Beauchemin, Charron et Desserres pour les trois propriétaires de 1965 à 1979 et la Fuddle Duddle du versant nord, un clin d’œil à cette phrase prononcée par Pierre Elliott Trudeau à la Chambre des communes, soupçonné d’avoir dit « f*** you » à un membre d'un parti de l’opposition. Il s’était repris en disant « fuddle duddle » ! 

Mont Tremblant célèbre aussi le succès des athlètes locaux dans la nomenclature de ses pistes. Notons entre autres la Marie-Claude Asselin, championne internationale de ski acrobatique. La Cossak, piste à bosses du versant nord qui a servi à la Coupe du monde, a été nommée pour cette manœuvre (cossak) rendue populaire par Jean-Luc Brassard. Et plus récemment, la Jasey-Jay Anderson et la Erik Guay, deux Tremblantois actuellement à Sotchi.

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