Le masque en classe à la rentrée

Le port du masque en tout temps à l’école, y compris en classe, sera imposé aux élèves des écoles primaires et secondaires du Grand Montréal et de nombreuses autres régions lors de la rentrée, a appris La Presse. Une mesure déjà en vigueur dans les cégeps, où les étudiants ont fait un retour en présentiel, lundi, à leur plus grande joie.

Masque en classe à la rentrée

Une majorité d’élèves touchés

Québec — Les élèves des écoles primaires et secondaires du Grand Montréal et de nombreuses autres régions devront porter le masque en tout temps à l’école, y compris en classe, a appris La Presse.

Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, en fera l’annonce ce mardi, à 13 h, à l’occasion d’une mise à jour de son plan de la rentrée scolaire.

Dans les échanges des derniers jours entre le gouvernement et la Santé publique, le déploiement de tests rapides de dépistage de la COVID-19 dans les écoles a également été évoqué. L’objectif serait de tester rapidement les élèves symptomatiques, de prévenir les éclosions et de réduire le risque de fermeture de classes. Il n’était pas certain, tard lundi soir, que cette mesure serait confirmée dès maintenant.

Le port du masque en classe sera imposé à une majorité d’élèves, alors que les régions les plus populeuses seront touchées.

La mesure serait en vigueur à Montréal, à Laval, en Montérégie, dans Lanaudière, dans les Laurentides, dans la Capitale-Nationale, en Outaouais, en Estrie et en Mauricie, selon une liste qui faisait partie des échanges entre la Santé publique et le gouvernement, et qui devait être finalisée en matinée, ce mardi.

Plan chamboulé

L’émergence de la quatrième vague de la pandémie et l’essor du variant Delta, plus contagieux et virulent, ont chamboulé le plan du gouvernement en prévision du retour à l’école.

En juin, le ministre Roberge prévoyait que la rentrée scolaire serait « normale », sans masque. Mais le 11 août, il a annoncé que les élèves du primaire et du secondaire devraient porter le masque dans les aires communes, mais pas en classe. Il a par la suite indiqué que le port du couvre-visage dans les classes était envisagé pour certaines régions et que le gouvernement avait demandé un avis de la Santé publique à ce sujet. Cette dernière a préféré attendre que la rentrée soit plus imminente pour trancher, ce qui explique l’annonce de ce mardi.

Québec et la Santé publique se sont entendus pour adopter une approche prudente, alors que la quatrième vague de la pandémie vient de commencer. Les moins de 12 ans ne sont pas vaccinés ; aucun vaccin n’a encore été approuvé pour eux.

Pour justifier la mesure au secondaire, on rappellera que les étudiants des cégeps et des universités devront eux aussi porter le masque dans les salles de cours par mesure de précaution, en vertu d’une décision rendue la semaine dernière.

Québec ne remettra pas en question le choix d’éliminer le concept de bulle-classe. Il ajoutera toutefois des mesures pour encadrer les activités parascolaires, en particulier les sports impliquant davantage des contacts physiques.

Déploiement de tests rapides

Le déploiement de tests rapides de dépistage dans les écoles fait également partie des discussions entre la Santé publique et le gouvernement.

Utilisés de façon plutôt limitée jusqu’ici, les tests rapides sont revenus au menu des échanges à Québec à l’approche de la rentrée scolaire. Ce pourrait être un outil retenu dans le protocole sanitaire et le guide de gestion des cas positifs que le ministre Roberge doit également présenter ce mardi.

Les tests rapides ne seraient pas utilisés de façon aléatoire, mais viseraient plutôt à détecter rapidement des cas positifs et à prévenir les éclosions. On réduirait les risques de fermeture de classes, ont indiqué des sources impliquées dans les discussions qui n’avaient pas l’autorisation de parler publiquement du dossier.

Selon la Dre Caroline Quach, microbiologiste-infectiologue et épidémiologiste au CHU Sainte-Justine, les écoles doivent être équipées de trousses de dépistage rapide pour détecter sans délai les élèves symptomatiques, briser la chaîne de transmission et éviter des absences inutiles. Ce serait une bonne façon d’affronter le variant Delta.

« Il faut que ça fasse partie des outils qu’on déploie à la rentrée pour permettre aux enfants d’être le plus possible à l’école. »

— La Dre Caroline Quach, microbiologiste-infectiologue et épidémiologiste au CHU Sainte-Justine

Recommandations

La Dre Quach a par ailleurs dirigé une étude sur les tests rapides de dépistage en milieu scolaire, le printemps dernier.

À la fin des travaux, l’équipe de recherche a d’ailleurs recommandé au ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) de déployer les tests antigéniques rapides à l’échelle du réseau scolaire pour tester les élèves et le personnel symptomatiques. On recommande aussi de les utiliser pour tester rapidement les contacts rapprochés.

Les recommandations soumises en avril sont encore pertinentes, a fait valoir la Dre Quach, alors qu’on « n’aura pas le choix de continuer » les efforts de dépistage à l’automne : les vaccins ne sont « pas efficaces à 100 % », et les autres virus respiratoires hivernaux sont présents, cite-t-elle en exemple. « Et donc, oui, les gens vont avoir des symptômes, et pas nécessairement causés par la COVID-19. »

« Être capable de faire une différence rapidement, ça va être hyper important, autrement, les enfants n’iront pas à l’école, jamais, et les parents ne pourront pas aller travailler parce que les enfants ne seront pas à l’école. »

— La Dre Caroline Quach, microbiologiste-infectiologue et épidémiologiste au CHU Sainte-Justine

Offrir une « flexibilité »

Le gouvernement Legault a maintes fois exprimé le souhait de conserver le plus longtemps possible les élèves à l’école. Pour l’automne, il espère éviter la fermeture de classes, pendant deux semaines, comme on l’a vu le printemps dernier.

« Quand un enfant toussote ou a le nez qui coule un peu, je pense que ça vaudrait la peine d’avoir accès à un test qui nous donne une réponse très rapidement », illustre la Dre Quach. Par exemple, un enfant déclaré négatif pourrait retourner en classe plutôt que d’être renvoyé à la maison.

Si son test rapide est négatif, c’est qu’il n’a pas une charge virale élevée, et il peut à tout le moins terminer sa journée, explique la Dre Quach. On pourrait demander que l’enfant soit soumis à un test PCR traditionnel en soirée ou qu’il subisse un deuxième test rapide le lendemain. Cela dépendra des protocoles que dictera la Santé publique.

Par exemple, si les autorités plaident pour le maintien des classes ouvertes, malgré la confirmation d’un cas positif, on pourrait soumettre la classe à un dépistage rapide le surlendemain. « Ce n’est pas encore clair et c’est difficile à dire tant et aussi longtemps que les protocoles ne sont pas dévoilés », affirme-t-elle.

Des trousses de dépistage pourraient même être distribuées aux parents pour qu’ils testent leur enfant dès l’apparition d’un symptôme, dit l’épidémiologiste.

« Il faut réfléchir et être créatifs », ajoute la Dre Quach, expliquant que les tests rapides offriraient aux écoles une « flexibilité qu’on n’a pas actuellement ».

L’étude pilotée par la Dre Quach a permis de démontrer l’utilité des tests rapides pour détecter la COVID-19 chez les cas symptomatiques et leurs contacts rapprochés. Mais l’équipe de recherche ne recommande pas leur utilisation de façon aléatoire. « Pour les asymptomatiques, ça ne sert pas à grand-chose », a résumé la Dre Quach.

Le test rapide de marque Panbio – utilisé lors de l’étude – donne un résultat entre 15 et 30 minutes. « C’est assez facile à faire », selon la Dre Quach.

Les élèves peuvent faire eux-mêmes le prélèvement nasal (pas aussi profond qu’un test PCR). Une personne désignée par l’établissement et qui a suivi une formation dispensée par le MSSS doit superviser l’opération.

Rentrée scolaire au collégial

« Ça fait du bien de revenir ici »

C’est fait. Après un an et demi d’études à distance, les élèves ont finalement mis les pieds au cégep lors de la rentrée scolaire en présentiel lundi, à leur plus grand bonheur.

« Ma rentrée s’est très bien passée ! », s’est exclamé Édouard Cretiu, 17 ans, qui entamait lundi la technique en médecine nucléaire au Collège Ahuntsic. « Même si c’est la COVID, ils ont trouvé la façon de bien s’arranger. La cafétéria est ouverte quand même, et tout le monde porte le masque, alors je suis content. »

Rencontrée à la sortie du collège, Marilou Bray s’est réjouie que les cours soient en présentiel. « On peut avoir un contact direct avec le professeur et c’est vraiment mieux si on a besoin d’aide. Ça nous permet de rencontrer les élèves sur place aussi », a dit l’élève en biotechnologie.

Léa Bélanger, qui étudie en technique en délinquance, est du même avis. « C’est vraiment plus facile pour se concentrer quand on est en classe. J’ai de meilleures notes aussi », a-t-elle dit.

Elle n’est pas seule. Les cours à distance et les restrictions imposées par la COVID-19 ont nui à la motivation et à la concentration de nombreux élèves.

Yves de Repentigny, vice-président de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), souligne que la CSN s’est réjouie, il y a quelques semaines, de savoir que la rentrée allait être en personne.

« À distance, on ne voit pas toujours le non-verbal des gens, on ne sait pas toujours si les élèves comprennent ou non », a-t-il affirmé.

« La vie sociale est importante aussi pour avoir un équilibre dans notre vie professionnelle ou autre. »

— Yves de Repentigny, vice-président de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec

L’impact de la pandémie sur le parcours des élèves au collégial est toutefois difficile à évaluer, puisque les ministères de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur ont autorisé la mention « incomplet » aux élèves qui en ont fait la demande. Cet assouplissement a permis aux cégépiens d’abandonner un cours sans que cela soit considéré comme un échec.

Recommencer à étudier

« Ça fait du bien de revenir ici, de marcher dans l’école et de retrouver la vie étudiante normale et vivante et de ne pas rester en pyjama toute la journée devant son ordinateur », a lancé Jade Lachambre, qui profitait du soleil entre ses cours en compagnie de sa cousine Rosalie Lachambre.

Le défi qui l’attend ? Recommencer à étudier, soutient-elle. « À la maison, on n’étudiait pas vraiment. Tous les examens étaient à livre ouvert, donc il va falloir recommencer à étudier et apprendre les choses par cœur. C’est un peu stressant », témoigne-t-elle.

« Tout le monde est prudent »

La semaine dernière, le gouvernement Legault a annoncé que le port du masque allait être obligatoire en tout temps dans tous les cégeps et toutes les universités. « Il faut porter le masque en tout temps, mettre du gel désinfectant en entrant dans le cégep, et plusieurs tables à la cafétéria ont été enlevées pour qu’il y ait moins de personnes », a énuméré Jade Lachambre, qui étudie au Collège Ahuntsic.

« Tout le monde est prudent, et j’ai eu mes deux vaccins aussi, alors je suis plus protégé », a renchéri Arthur John Devilla, qui se rendait au cégep pour la première fois lundi, après avoir terminé son secondaire en juin.

Malgré les mesures en place, les préoccupations demeurent présentes avec la montée du variant Delta. « On est loin d’être sortis de l’auberge », craint M. de Repentigny. Il espère que la montée du variant n’entraînera pas un retour en mode à distance.

« On s’inquiète notamment pour la ventilation, qui est très variable d’un cégep à l’autre et même d’un local à l’autre. »

— Yves de Repentigny, vice-président de la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec

Les premiers échos font aussi état de respect très inégal des consignes sanitaires d’un cégep à l’autre. À certains endroits, on est très sévère, dit-il, tandis que dans d’autres cégeps, « les étudiants s’entassent dans les classes ».

Le retour en canicule

L’extrême chaleur actuelle est aussi difficile à vivre, a souligné M. de Repentigny. « Les cégeps n’ont pas tous l’air climatisé. Dans les locaux, par endroits, il peut faire jusqu’à 42 °C. C’est vrai que le masque n’empêche pas de respirer, mais avec cette chaleur, il est loin d’être confortable. »

Les élèves rencontrés ne s’en sont toutefois pas plaints. Ils considèrent plutôt le masque comme un bon compromis pour pouvoir assister aux cours en présentiel. « On était habitués de porter le masque au secondaire, alors ce n’est pas si pire », dit Isabelle Nélisse, qui étudie en sciences de la santé.

— Avec Louise Leduc, La Presse

Directives pour le retour en classe

Le réseau scolaire s’impatiente

À quelques jours du début des classes au primaire et au secondaire, bien des acteurs de l’éducation se désolaient lundi de devoir attendre à la dernière minute avant d’avoir des informations sur cette deuxième rentrée en pandémie.

« C’est comme si l’on n’avait pas tiré de leçons de la gestion de la dernière année. » La présidente de l’Association montréalaise des directions d’établissement scolaire (AMDES), Kathleen Legault, ne s’explique pas pourquoi les jours menant à cette rentrée se déroulent encore une fois sous le signe de l’incertitude.

En ce début de semaine, bien des membres du personnel des écoles sont déjà à pied d’œuvre et, pourtant, nombre de questions subsistent, portées par la quatrième vague et le variant Delta : y aura-t-il des bulles-classes ? Utilisera-t-on le passeport sanitaire ? Qu’en est-il des élèves qui auront reçu une seule dose ?

Les attentes étaient « élevées », et le réseau scolaire « mérite mieux », a estimé Kathleen Legault, de l’AMDES. Aux questions qui demeurent sans réponse, elle en ajoute deux. « On se demande : “Où est le ministre de l’Éducation ? Comment expliquer qu’on n’ait aucune consigne écrite sur la rentrée ?” »

La Fédération des syndicats de l’enseignement se demande, elle aussi, pour quelles raisons les « balises claires » du gouvernement n’ont pas encore été énoncées.

« On ne peut pas me dire qu’on ne pouvait pas prévoir [avant lundi]. »

—  Josée Scalabrini, présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement

À la mi-août, le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, a présenté un plan de retour à l’école, mais certains éléments devaient être précisés selon l’évolution de la situation sanitaire. Ce sera fait à l’occasion d’un point de presse que doit tenir le ministre ce mardi après-midi.

Comme d’autres, le président de la Fédération des établissements d’enseignement privés, David Bowles, estime qu’il faudra en priorité préciser de quelle façon se fera l’isolement des élèves et des groupes-classes si un cas de COVID-19 se déclarait dans une école.

« Y aura-t-il une procédure différente pour les élèves selon qu’ils sont vaccinés ou non ? Les familles et le personnel nous demandent des réponses », dit-il.

De l’avis de beaucoup, revenir au concept des bulles-classes au secondaire serait l’idée la moins désirable. « Au secondaire, c’est presque impensable tellement c’est complexe. On ne peut pas s’imaginer qu’on va faire ça à si peu de jours de la rentrée », dit Kathleen Legault.

Le président de la Fédération des établissements d’enseignement privés estime que ce serait carrément « impossible ».

L’ambiguïté dénoncée

Ce sentiment d’« improvisation » de la part de Québec devient une « distraction » pour ceux qui doivent préparer le retour des élèves, fait observer Kathleen Legault, de l’AMDES.

Les rumeurs aussi vont bon train.

« Vu que rien n’a été annoncé, on a peur que ça reste tel quel. Je suis loin d’être confiante », a déploré lundi une mère dont le fils entamera la semaine prochaine sa cinquième année.

Les parents veulent savoir à quoi s’en tenir, mais ne savent pas vers qui se tourner, constate quant à lui Kévin Roy, président de la Fédération des comités de parents du Québec.

« On ne peut pas mettre ça sur le dos des centres de services scolaires : ils n’ont même pas l’information. »

— Kévin Roy, président de la Fédération des comités de parents du Québec

Du côté de la Fédération des centres de services scolaires du Québec, on ne jette pas la pierre au ministre de l’Éducation.

« L’ambiguïté ne vient pas du plan du Ministère : il est très clair », affirme sa présidente-directrice générale, Caroline Dupré. Or, explique-t-elle, certaines directions régionales de santé publique ont envoyé des directives aux écoles qui semblaient plutôt tenir compte des mesures de juin dernier. « Il faut que la position de la Santé publique nationale descende pour que tout le monde applique les mesures de la même façon », croit Caroline Dupré.

Quitte, ajoute-t-elle, à ajuster les mesures en cours de route, selon l’évolution de la pandémie. À pareille date l’an dernier, le Québec recensait un peu plus de 70 nouveaux cas de COVID-19 par jour. Lundi, on en a recensé 376.

— Avec la collaboration de Louise Leduc, La Presse

Vaccination obligatoire pour les enseignants 

Les syndicats refusent de se prononcer

Vaccination obligatoire pour les enseignants 

Les syndicats refusent de se prononcer

Les syndicats représentant les enseignants ont refusé de dire s’ils étaient d’accord ou pas avec l’idée d’imposer la vaccination aux enseignants. En conférence de presse lundi matin au sujet de la rentrée, Éric Gingras, président de la Centrale des syndicats du Québec, a dit qu’avant de se prononcer, « le gouvernement a beaucoup de réponses à donner » quant aux conséquences que cela aurait pour les enseignants qui refuseraient de se faire vacciner. Au surplus, il a souligné qu’une éventuelle obligation aurait ses conséquences sur un milieu déjà aux prises avec d’importantes pénuries. Les syndicats n’ont pas de statistiques précises sur le taux de vaccination des enseignants, le gouvernement n’en ayant pas, a aussi indiqué M. Gingras.

— Louise Leduc, La Presse

Vaccination obligatoire des enseignants

« Le temps presse », plaident des experts

Les experts sont unanimes. Après le réseau de la santé, c’est dans le réseau de l’éducation que la vaccination du personnel doit être obligatoire. À quelques jours de la rentrée scolaire, le gouvernement du Québec n’a toujours pas pris de décision. « Le temps presse », disent-ils tous.

L’idée de la vaccination obligatoire ailleurs que dans le réseau de la santé fait son chemin. La Ville de New York, par exemple, a décidé de l’imposer aux employés de son réseau scolaire à compter du 27 septembre. Les grandes universités canadiennes, sauf au Québec et en Colombie-Britannique, exigeront aussi une preuve de vaccination. Ottawa fera de même avec ses employés et a fortement recommandé aux industries de compétence fédérale de l’imiter, ce que les grandes banques ont fait.

Au Québec, la décision du gouvernement d’imposer la vaccination aux soignants sera discutée en commission parlementaire jeudi et vendredi, mais il n’est toujours pas question d’élargir la mesure aux employés du réseau de l’éducation.

« Agir de manière proactive »

« Il faut aller de l’avant, on veut sortir de cette crise sanitaire », insiste Roxane Borgès Da Silva, professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal.

« Les enseignants ont un très grand contact social tous les jours, ils voient plein d’élèves. En plus, ils sont en contact avec des enfants qui ont moins de 12 ans et qui n’ont pas pu se faire vacciner. Pour ces raisons-là, il faut agir de manière proactive et imposer la vaccination, comme le font les grandes banques, d’ailleurs, et les employés de la Ville de Toronto. »

Mme Borgès Da Silva convient que le personnel soignant a affaire à des gens plus vulnérables que les élèves. N’empêche, dit-elle, « on se doit de donner une prestation non risquée aux jeunes ».

« Les parents confient leurs enfants à des enseignants dans un environnement qui doit être sécuritaire. Et on sait que dans une crise sanitaire, ne pas être vacciné, c’est porter atteinte à la sécurité des gens autour de nous, principalement aux enfants non vaccinés. »

— Roxane Borgès Da Silva, professeure à l’École de santé publique de l’Université de Montréal

« On n’a pas beaucoup de temps »

Nimâ Machouf, épidémiologiste à la Clinique de médecine urbaine du Quartier latin, abonde dans le même sens.

« Le gouvernement, qui nous avait promis qu’il allait prendre en charge la question de la ventilation dans les classes, n’a rien fait, dénonce celle qui est aussi candidate néo-démocrate dans Laurier–Sainte-Marie. Le variant Delta court et on est à la veille de la quatrième vague. Donc, on n’a pas le choix. Si on veut offrir un milieu sécuritaire pour l’enseignement, il faut que les gens se sentent en sécurité. »

Elle ajoute : « Il y a des parents qui sont déjà en panique, surtout d’élèves d’âge primaire, dont les enfants ne sont pas vaccinés. Aujourd’hui, ceux qui s’infectent sont essentiellement des non-vaccinés. Donc, leurs jeunes font partie de ce lot. »

« [Les parents] redoutent encore le cauchemar des fermetures, des ouvertures. »

— Nimâ Machouf, épidémiologiste

Le temps presse, selon la Dre Machouf, parce que la quatrième vague menace de déferler sous peu. « C’est encore le temps de pouvoir la supprimer, croit-elle, mais on n’a pas beaucoup de temps. Il faut vraiment rendre la vaccination obligatoire le plus rapidement possible, étant donné qu’on veut favoriser l’école en présentiel. »

Une obligation

Alain Lamarre, professeur-chercheur spécialisé en immunologie et en virologie à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS), est aussi en faveur de la vaccination obligatoire dans les écoles.

« Moi, je pense que tout le monde devrait se faire vacciner, surtout les gens qui seront en contact avec des enfants qui ne seront pas vaccinés, dit-il. Est-ce qu’il faut aller jusqu’à l’obligation ? Je pense qu’il n’y aurait pas un gros tollé dans la population. Je pense que les gens sont, en général, en faveur de la vaccination obligatoire pour certains métiers. Après les travailleurs de la santé, même avant les travailleurs de l’État, ce sont les enseignants qui devraient être obligatoirement vaccinés. »

« On arrive à un point où il faut rendre la vaccination obligatoire », affirme pour sa part Donald Vinh, infectiologue et microbiologiste au Centre universitaire de santé McGill et chercheur clinicien.

« Un moment donné, on arrête de le faire de la façon volontaire, il faut l’imposer. Donc, toutes les personnes qui occupent des emplois qui nécessitent des contacts avec d’autres personnes devraient être vaccinées. »

— Donald Vinh, infectiologue et microbiologiste

Cependant, même s’il est convaincu que la grande majorité des enseignants est vaccinée, le DVinh déplore le manque de données du ministère de l’Éducation à ce sujet.

« Le problème, c’est qu’on n’a pas de données, déplore-t-il. Ce qui me dérange, c’est que ça fait un an et demi qu’on combat cette pandémie. On a eu deux, trois mois d’été pendant lesquels on savait qu’il y aurait, à la fin août, un retour à l’école, et on n’a rien fait pour se préparer à la rentrée. On n’a pas collecté de données sur l’état de vaccination de nos enseignants. On n’a pas amélioré la ventilation, on ne s’est pas dotés de lecteurs de CO2. On a pris des vacances de la pandémie au lieu de se préparer, et ça, c’est incompréhensible. »

Imposition du passeport vaccinal

De son côté, Benoit Barbeau, professeur au département des sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal et expert en virologie, plaide pour l’instauration d’un passeport vaccinal, « surtout au primaire où les enfants ne sont pas vaccinés ». « Le personnel devrait être vacciné ou subir un test plusieurs fois par semaine », dit-il.

André Veillette, professeur de médecine et directeur de l’Unité de recherche en oncologie moléculaire à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM), va plus loin : « Le principe de base devrait être que tout emploi où les individus ont des contacts directs avec d’autres individus devrait nécessiter une vaccination obligatoire. »

« On sait que les vaccins marchent, que les vaccins protègent, poursuit-il. Alors, je pense qu’on a une responsabilité comme employeur de protéger les gens avec qui on est en contact. Je pense que c’est encore le temps de corriger le tir. Mieux vaut tard que jamais. »

Pour Richard Gold, professeur de droit et de science politique à l’Université McGill, signataire avec une trentaine d’autres juristes d’une lettre réclamant l’instauration du passeport vaccinal ou de tests hebdomadaires dans son établissement, l’imposition de la vaccination ne fait pas de doute. « C’est la seule façon, en fait, qu’on va atteindre nos objectifs de vaccination », dit-il.

Vaccination obligatoire pour les enseignants 

Les syndicats refusent de se prononcer

Vaccination obligatoire pour les enseignants 

Les syndicats refusent de se prononcer

Les syndicats représentant les enseignants ont refusé de dire s’ils étaient d’accord ou pas avec l’idée d’imposer la vaccination aux enseignants. En conférence de presse lundi matin au sujet de la rentrée, Éric Gingras, président de la Centrale des syndicats du Québec, a dit qu’avant de se prononcer, « le gouvernement a beaucoup de réponses à donner » quant aux conséquences que cela aurait pour les enseignants qui refuseraient de se faire vacciner. Au surplus, il a souligné qu’une éventuelle obligation aurait ses conséquences sur un milieu déjà aux prises avec d’importantes pénuries. Les syndicats n’ont pas de statistiques précises sur le taux de vaccination des enseignants, le gouvernement n’en ayant pas, a aussi indiqué M. Gingras.

— Louise Leduc, La Presse

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