Montréal

Au cœur du nouveau centre de production de vaccins

Le nouveau centre de production de vaccins de Montréal a été construit en seulement 10 mois. Un exploit, surtout en ces temps de pénurie de matériaux, selon l’ingénieur responsable du projet et concepteur de nombreux laboratoires dans le monde. Fier de cette réalisation, le ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne, a annoncé mardi la fin des travaux du centre qui servira à « répondre rapidement aux pandémies et aux crises sanitaires futures ».

Même si la production de vaccins contre la COVID-19, fabriqués avec la recette de l’entreprise américaine Novavax, arrivera trop tard pour les Canadiens, soit au printemps 2022, le ministre Champagne est convaincu que l’investissement de 126 000 millions de dollars sera bénéfique pour la population.

Tout d’abord parce qu’il s’agit d’un laboratoire public, et non privé, qui appartient à tous les Canadiens, dit-il, mais aussi parce que le laboratoire pourra fabriquer d’autres vaccins pour « répondre rapidement aux pandémies et aux crises sanitaires futures pour protéger l’ensemble de la population ». De plus, il faut encore vacciner les pays les moins nantis, et le Canada souhaite jouer un rôle majeur dans cette opération, a expliqué le ministre devant des employés du centre, des ouvriers et les médias.

L’approbation dudit vaccin par Santé Canada est attendue dans quelques mois, ainsi que la certification de l’édifice. Le prix de la fabrication n’est pas un enjeu non plus pour le ministre. Il s’agit de sécuriser la production ici, au Canada. Être prêt à fabriquer des vaccins contre de nouveaux variants, si la situation se présente.

Le défi de la construction rapide

Alors qu’il faut au moins deux ans et demi pour construire un centre de production de produits biologiques comme celui situé sur le site de Royalmount du Conseil national de recherches du Canada (CNRC), à Montréal, les équipes d’entrepreneurs, d’architectes et d’ingénieurs ont terminé le travail en 10 mois dans un contexte de pandémie et de pénurie de matériaux. Sans dépasser le budget.

Le directeur de projet André-Pierre Ghys affirme que ce tour de force a été possible grâce au logiciel SmartUse, avec lequel les équipes voient en temps réel la dernière version des dessins. Grâce aussi à la conception du projet en 3D qui permet d’assurer avant d’arriver sur le chantier que tous les morceaux vont s’assembler. La préfabrication a également joué un rôle crucial. « On a préfabriqué 90 % de tout ce qui est installé, explique l’ingénieur. Pendant qu’on faisait l’enveloppe, la structure, des gens faisaient et assemblaient la ventilation et la plomberie dans des usines extérieures. »

« Tout ça est arrivé ici, et on l’a installé comme un gros Lego. »

– André-Pierre Ghys, directeur du projet

Les équipes, qui ont travaillé 18 heures par jour, 7 jours par semaine, n’ont utilisé que des matériaux en stock. D’ailleurs, la pénurie de béton a ralenti les travaux, mais pas celle de 2 x 4 puisque les usines pharmaceutiques ne sont faites qu’avec des matériaux inertes, précise André-Pierre Ghys. « Il y a zéro bois, il n’y a aucun matériau vivant, sauf les bureaux, à cause des risques de contamination. »

Une technologie déjà dépassée ?

Aux détracteurs qui affirment que ce laboratoire tout neuf utilisera une technologie déjà dépassée – il ne fabriquera pas les vaccins à ARN messager comme Pfizer/BioNTech et Moderna, mais à base de cellules –, le ministre Champagne répond que la stratégie des pays du G7 est d’avoir une expertise dans toutes les familles de vaccins. « Ce qui est intéressant dans ce qu’on a fait ici, c’est qu’on a deux lignes de production, donc on peut s’associer avec un autre manufacturier à terme », soutient le ministre.

De l’avis de l’ingénieur André-Pierre Ghys, qui a conçu les laboratoires les plus modernes de la planète, le centre de Montréal n’a rien à envier à ceux des autres pays avec ses bioréacteurs et son équipement de purification high-tech. « J’ai construit des usines aux États-Unis, en Belgique, en Allemagne, en Chine, en Inde, à peu près partout, et je peux vous dire que celle-ci est à la fine pointe de la technologie. C’est vraiment le top niveau, affirme-t-il. J’en suis très fier. »

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