Finale de la Coupe Stanley

Les Oilers et l’ombre de Bobrovsky

Sunrise — Sergei Bobrovsky n’était pas dans la pièce au moment où des membres des Oilers d’Edmonton sont venus prendre la parole, dimanche midi, mais on aurait pu croire qu’il était là tellement il a fait parler de lui.

Pendant que des joueurs des Panthers patinaient sur la glace du bas, dans le centre d’entraînement du club à Fort Lauderdale, quatre joueurs des Oilers étaient amenés dans une petite salle mal ventilée juste en haut pour faire face à un paquet de questions. Sur la vie en général, mais aussi au sujet du gardien du club de la Floride, qui a un peu volé le premier match de cette finale, samedi soir à Sunrise.

Peut-on croire que les Oilers demeurent optimistes, malgré ce retard de 0-1 dans la série ? Ça dépend. D’un côté, les quatre joueurs qui sont venus faire un tour au micro en ce dimanche trop chaud – Ryan Nugent-Hopkins, Leon Draisaitl, Connor Brown et Mattias Ekholm – ont répété la même chose, à savoir que s’ils continuent comme ça, eh bien, ça va finir par rentrer.

De l’autre, ces quatre jeunes hommes, avec leur air sévère et leurs réponses plus ou moins enthousiastes, ne respiraient pas exactement la confiance.

« La façon dont on a joué [samedi soir], c’est encourageant, a commencé par dire Nugent-Hopkins. Évidemment qu’on veut une victoire rapidement, mais c’est une série quatre de sept… on a fait de bonnes choses lors de ce premier match, je pense qu’on peut trouver une façon. »

Comment ? Ça, c’est le bout plus compliqué. À ce sujet, Nugent-Hopkins nous a expliqué combien Bobrovsky excelle sur les tirs bas, combien il se déplace bien de gauche à droite, et aussi qu’il est bon sur pas mal tous les types de tir, ce qui veut dire qu’il ne reste plus grand-chose, si on a bien compris.

« Mais on va avoir nos occasions, a ajouté Draisaitl. On sait qu’il va effectuer des gros arrêts, on sait qu’il va en faire, et c’est important d’en être conscient. Mais on doit continuer à jouer notre style de jeu. »

Malgré tout ça, l’avance des Panthers dans cette finale n’est que de 1-0, et les Oilers ont aussi beaucoup insisté sur leur propension à se replacer dans le coup. Parce que de leur propre avis, ils sont habitués à se retrouver dans des situations compromettantes pour mieux en sortir.

C’est ce qu’on appelle « rebondir » dans le langage complexe du hockey sur glace.

« C’est notre marque de commerce, a ajouté Nugent-Hopkins. Cette habileté à se replacer après un mauvais départ. On a été en mesure de faire ça plusieurs fois cette saison, et même dans les séries. On sait qu’ils vont jouer mieux la prochaine fois, mais nous aussi, on va mieux jouer lors du prochain match. On a fait ça pendant toute la saison, c’est un bon signe. »

« On se prépare pendant toute une année pour ces moments-là. »

— Ryan Nugent-Hopkins

Lors du deuxième tour des présentes séries, les Oilers ont accusé un retard de 0-1 après le premier match. Lors du troisième tour, ils avaient un retard de 1-2 après trois matchs. Brown a tenu à rappeler que lui et sa bande n’en sont pas à leur premier rodéo. « Il n’y a pas de panique dans ce vestiaire », a-t-il insisté pour dire.

Alors voilà. Le prochain match de cette finale aura lieu lundi soir, et si on a bien compris, les Oilers peuvent faire mieux, mais les Panthers aussi, ce qui, au final, va donner deux clubs qui vont pouvoir faire mieux.

« On a bien joué lors du premier match, on a créé de bonnes occasions de marquer, a ajouté Draisaitl. Leur gardien a eu une très bonne soirée, et ces choses-là arrivent parfois. Si on peut répéter ce genre de performance, je crois qu’on va se donner une bonne chance de gagner. »

L’attaquant vedette des Oilers admettra également ceci, à la fin : « Ils ont une bonne équipe. »

Les membres des Oilers ont ensuite pu quitter ce centre d’entraînement qui n’est pas le leur pour retourner dans la chaleur floridienne, en passant devant des chandails de Bobrovsky bien en évidence dans les vitrines de la boutique souvenir située à l’entrée. Un peu comme si le gardien des Panthers, ou à tout le moins son effigie, les suivait partout.

Finale de la Coupe Stanley

Les Panthers ne veulent même pas regarder le trophée

Sunrise — Au hockey, c’est bien connu, on ne touche pas à la coupe avant de l’avoir gagnée. Mais il appert aussi qu’il ne faut pas non plus la regarder.

Samedi soir à Sunrise, le plus célèbre de tous les trophées est apparu sur la glace, avant la première mise en jeu de cette finale. Bien installés sur la ligue bleue en attendant que le match commence, Aleksander Barkov et Gustav Forsling ont tenté de ne pas tourner la tête en direction du bol de lord Stanley.

« J’ai essayé de ne pas trop la regarder, a raconté Forsling dimanche midi au centre d’entraînement des Panthers. Je voulais seulement me concentrer sur le jeu… »

Son collègue Barkov, assis à sa droite, a discrètement opiné du bonnet. « Même chose ici », a-t-il lancé.

Les Panthers de la Floride en sont là. Dans un monde, celui du hockey de la LNH, où les superstitions et les petites habitudes sont nombreuses, vaut mieux ne pas trop bomber le torse et parler d’un trophée qui est encore bien loin, surtout avec une avance de 1-0 dans cette série finale.

Si les Panthers en sont là, à ne pas vouloir trop parler ni trop pavaner, c’est sans doute parce qu’ils étaient à la même place il y a un an, en finale, et que les Golden Knights de Vegas avaient fini par se pousser avec le gros prix.

Alors ça donne ce qu’on a vu dimanche à Fort Lauderdale, ce qu’on verra jusqu’à la fin, sans doute : des joueurs très prudents, qui ne veulent pas trop faire de grandes déclarations, qui vont tout faire pour ne pas énerver les dieux du hockey, quitte à ignorer du regard ce trophée qui est pourtant magnifique, comme chacun le sait.

En fait, à écouter certains membres des Panthers parler à leur centre d’entraînement de Fort Lauderdale, on avait même l’impression qu’ils avaient perdu le premier match de la série.

« On sait qu’on doit être meilleurs que ça, a tenu à dire Barkov d’un air sévère. Il faut continuer à bâtir sur ce qu’on a pu faire jusqu’ici. Parce que les Oilers [d’Edmonton] ont une équipe incroyable. Ils ont tant de talent, ça va être difficile, c’est sûr. »

« Alors maintenant, c’est une bonne journée pour se ressourcer et pour se sentir bien, mais lundi, c’est le retour au travail, et il va falloir se retrousser les manches. »

— Aleksander Barkov

Peut-être aussi que les Panthers ont l’impression d’avoir pu éviter le pire samedi soir en match d’ouverture. Les gros canons des Oilers ont été blanchis, tout comme l’avantage numérique et puis finalement, tout comme le reste de l’équipe en entier.

Par ici, il n’y a personne d’assez fou pour croire que ça va durer.

« On veut jouer à notre meilleur, on veut dicter le tempo, parce qu’un match comme celui de samedi soir, ça ne va pas arriver à chaque fois, a dit Barkov avec prudence. Ils vont avoir la rondelle souvent, on sait aussi qu’ils vont avoir leurs occasions, mais nous, on doit continuer à faire ce qu’on fait. Dans cette ligue, chaque équipe désire pouvoir dicter le rythme du jeu, et c’est la même chose avec nous. »

Avant de subir un zéro samedi soir, les Oilers avaient réussi à marquer 10 buts lors de leurs trois matchs précédents, les derniers de la finale de l’Association de l’Ouest face aux Stars de Dallas. Les Panthers se doutent bien que, tôt ou tard, Connor McDavid va finir par faire quelque chose.

« On sait qu’il va réussir des gros jeux et qu’il va arriver à fond de train, et c’est pourquoi on a un Bobby », a ajouté le défenseur Niko Mikkola, en hommage à son gardien Sergei Bobrovsky.

Ensuite, l’entraîneur Paul Maurice a pris la parole, d’un ton très prudent lui aussi, au point de nous mettre en garde en parlant de McDavid et de son pote Leon Draisaitl.

« On en vient à être trop habitués à ces deux-là, et à quel point ils sont bons… Je comprends pourquoi. On le voit chaque soir, ils sont si dynamiques, si spéciaux, et après un temps, on devient habitués, au point de se demander pourquoi ils ne font pas ça à chaque présence sur la glace. Ils le font presque… »

On présume que Paul Maurice n’a pas regardé la coupe Stanley lui non plus.

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