Perte de revenus en raison de la COVID-19

Des coopératives étudiantes poursuivent leur assureur

Plus d’une vingtaine de coopératives étudiantes poursuivent leur compagnie d’assurance, Co-operators, qui refuse de les indemniser pour les pertes financières causées par leur fermeture en mars 2020, ordonnée par le gouvernement du Québec au début de la pandémie.

Elles soutiennent que leur police comporte des protections contre les pertes de revenus liées notamment à une interruption d’activités prononcée « par les autorités civiles » ou à la suite de la « propagation d’une maladie contagieuse ».

Ces coopératives étudiantes, qui vendent livres, ordinateurs et autres fournitures scolaires, ne sont pas les seules à mener ce combat. Plusieurs entreprises assurées pour « pertes d’exploitation » ont également tenté d’être indemnisées par leur assureur, sans succès, confirme Jasmin Guénette, vice-président aux affaires nationales de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI).

Ainsi, dans la poursuite déposée en Cour supérieure le 29 mars 2022, 26 coopératives étudiantes, dont celles de l’Université du Québec à Montréal, de HEC Montréal, du collège de Rimouski et du cégep de Saint-Jean-sur-Richelieu, réclament à leur assureur une somme totale de plus de 1,5 million de dollars en raison des pertes encourues par l’arrêt de leurs activités.

À partir de mai 2020, elles ont envoyé à tour de rôle – selon le moment où leur police d’assurance venait à échéance – « un avis de réclamation visant à obtenir une indemnisation pour les pertes financières subies en raison des circonstances liées à la pandémie de COVID-19, le tout conformément aux dispositions de la police », peut-on lire dans la poursuite. On y souligne que la police offre « diverses protections contre les pertes réelles de revenus pouvant résulter notamment d’une interdiction d’accès aux lieux assurés prononcée par les autorités civiles, ou encore d’une interruption des activités commerciales par suite de la propagation d’une maladie contagieuse ou infectieuse à déclaration obligatoire ».

Or, Co-operators leur a répondu par la négative. La compagnie d’assurance n’a pas l’intention de les indemniser. Elle reconnaît que « la COVID-19 est une maladie contagieuse ou infectieuse à déclaration obligatoire ».

Toutefois, pour expliquer sa décision, elle « prétend qu’à sa connaissance, il n’y a pas eu de cas de la COVID-19 dans les lieux assurés des demanderesses ou à proximité ». « Par conséquent, il n’y a pas eu d’interruption totale ou partielle des activités de l’entreprise engendrée par un cas localisé de la COVID-19. Bref, la défenderesse soutient que l’interruption des activités des demanderesses résulte de la prise de mesures générales aux fins de lutter contre la pandémie et non d’un cas isolé de la COVID-19 dans [les] lieux assurés », indique-t-on dans la poursuite.

« Il y avait une couverture qui était précise. On est assez convaincus qu’on a raison d’intenter la poursuite. »

— MDominique Gilbert et MJulien Dubois, avocats représentant les coopératives

Co-operators a refusé de s’exprimer davantage à ce sujet, « car il s’agit d’un litige actif », nous a-t-on répondu par courriel.

Plusieurs réclamations

S’il n’était pas en mesure de donner son avis sur la poursuite des coopératives étudiantes, Jasmin Guénette, de la FCEI, qui représente notamment des entreprises dans le commerce de détail, confirme que beaucoup de membres qui avaient une protection contre les « pertes d’exploitation » ont tenté de se faire indemniser par leur assureur au début de la pandémie.

« Il y a beaucoup d’entreprises qui pensaient que cette clause allait leur permettre d’être dédommagées. Mais elles n’ont pas réussi. Les pandémies ne sont pas couvertes par ces contrats-là. »

— Jasmin Guénette, vice-président aux affaires nationales de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante

« Normalement, lorsqu’on parle d’assurance de dommage, les couvertures pour interruption des affaires sont généralement liées à un dommage physique », explique Pierre Babinsky, directeur des communications au Bureau d’assurance du Canada. Il cite notamment le cas d’un incendie qui empêcherait un commerce de poursuivre ses activités.

« C’est possible que certaines polices d’assurance contiennent du langage qui couvre les ordres du gouvernement, mais de façon générale, ce qu’on voit le plus, ce sont des clauses vraiment liées à des pertes d’exploitation causées par un dommage physique, insiste-t-il. La majorité des polices d’assurance d’entreprise ne sont pas spécifiques au point de mentionner des ordres du gouvernement. »

Après deux ans de pandémie, M. Babinsky n’était pas en mesure de dire si certains assureurs offraient désormais des protections pour les entreprises en lien avec des maladies comme la COVID-19.

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