Gaz à effet de serre

Les émissions du Canada repartent à la hausse

Les émissions de gaz à effet de serre (GES) du Canada sont reparties à la hausse en 2021, deuxième année de la pandémie, montrent les plus récentes données officielles.

Le Canada a émis 670 millions de tonnes d’équivalent de dioxyde de carbone (Mt éq. CO2) cette année-là, contre 659 millions de tonnes en 2020, indique le Rapport d’inventaire national publié par Ottawa, vendredi, à la veille de la date limite du 15 avril pour le présenter à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.

Cette hausse de 1,8 % est attribuable essentiellement au secteur des transports et à celui de l’extraction de pétrole et de gaz, dont les augmentations ont été respectivement de 9 Mt (+5 %) et 4 Mt (+4 %), effaçant largement les légères diminutions enregistrées dans le secteur du chauffage résidentiel et celui de l’agriculture.

À 670 Mt, les émissions de GES du Canada de 2021 demeurent toutefois inférieures à leur niveau prépandémique ainsi qu’aux 732 Mt émises en 2005, année de référence utilisée par le Canada pour calculer son engagement de réduction de 40 à 45 % d’ici 2030.

Le Canada est le 10e émetteur de GES de la planète, avec 1,6 % des émissions mondiales, rappelle le document, citant les données du site spécialisé Climate Watch pour 2019.

Le Canada est par ailleurs l’un des plus grands émetteurs de GES par habitant, avec 17,5 tonnes d’équivalent de dioxyde de carbone (t éq. CO2) par personne en 2021 ; ce taux était de 22,7 t éq. CO2 en 2005.

Augmentation plus faible que prévu

L’augmentation des émissions de GES du Canada en 2021 est « plus faible que prévu, [ce qui] montre que la croissance économique du Canada continue d’être plus propre et moins polluante qu’auparavant », a déclaré le ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault, dans un communiqué.

L’inventaire souligne d’ailleurs que « l’intensité » des émissions de l’économie canadienne, soit la quantité de GES émise selon l’évolution du produit intérieur brut (PIB), a diminué de 29 % depuis 2005.

« Des progrès sont en cours, et le Canada s’est montré déterminé dans ses actions pour le climat », a ajouté le ministre, vantant notamment son plan de réduction des émissions.

« Nous avons déjà accompli près du quart de notre objectif de réduction des émissions de 2030. »

— Steven Guilbeault, ministre de l’Environnement et du Changement climatique

« On peut difficilement se féliciter d’un bilan qui montre qu’on est de retour dans nos vieilles habitudes prépandémiques », rétorque Andréanne Brazeau, analyste des politiques climatiques de l’organisation Équiterre, soulignant que la hausse des émissions est attribuable aux « mêmes mauvais élèves que d’habitude », le secteur des transports et de l’énergie.

Il n’y a pas eu au Canada de « changement structurel » permettant de réduire significativement les émissions de GES, analyse Normand Mousseau, directeur scientifique de l’Institut de l’énergie Trottier et professeur de physique à l’Université de Montréal.

Les émissions des deux plus gros émetteurs au pays, l’Alberta et l’Ontario, sont inférieures à ce qu’elles étaient avant la pandémie, mais l’économie et la production industrielle étaient encore au ralenti en 2021, souligne-t-il : « En Alberta, on a moins produit de pétrole, mais là, on va reprendre la production. »

« Il est temps de mettre l’industrie fossile au pas », ajoute Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie de Greenpeace Canada, voyant dans l’inventaire la preuve que c’est elle qui retarde les progrès au pays.

« Le gouvernement Trudeau doit être plus ferme et ambitieux et bonifier son plan d’action climatique, entre autres, en plafonnant et en réduisant rapidement les émissions liées à la production de pétrole et de gaz », affirme M. Bonin.

Autre préoccupation, les secteurs de l’économie qui n’ont pas ou ont peu été touchés par la pandémie, comme les déchets et l’agriculture, n’affichent pas de baisse à long terme de leurs émissions, constate Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal.

« C’est très préoccupant de constater que ces émissions se maintiennent ou sont en croissance depuis 1990. »

— Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal

M. Pineau estime par ailleurs qu’il y a lieu de s’inquiéter de la baisse des émissions du secteur ferroviaire, qui démontre que le train n’est encore pas privilégié comme mode de transport.

« Il faudrait plus utiliser le train, dit-il. Cela réduirait les émissions en transport routier dans une proportion beaucoup plus grande. »

188 millions de tonnes

Quantité de GES émis en 2021 au Canada par le secteur des transports

Source : Rapport d’inventaire national 1990 – 2021, Environnement et Changement climatique Canada

300 millions de tonnes

Quantité de GES émis en 2021 au Canada par les « sources de combustion fixes »

Source : Rapport d’inventaire national 1990 – 2021, Environnement et Changement climatique Canada

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