COVID-19

trop tôt pour évoquer une flambée

Malgré trois nouveaux décès et une forte hausse du nombre de cas de COVID-19 enregistrés au Québec au cours des deux derniers jours, les experts sont formels : il est précipité de conclure que la province est plus touchée qu’ailleurs. « Ça risque d’être la plus grande bataille de notre vie », a lancé le premier ministre François Legault dans un appel à l’unité. 

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Attention aux comparaisons, préviennent des experts

La forte hausse du nombre des nouveaux cas de COVID-19 enregistrés au cours des deux derniers jours a créé un certain choc au Québec, mais les experts préviennent qu’il est trop tôt pour en conclure que la province est plus touchée qu’ailleurs ou qu’elle connaît une flambée particulière.

Mardi, l’ajout de 385 nouveaux cas confirmés en une seule journée a fait bondir les statistiques québécoises. Des graphiques ont montré la courbe du Québec dépasser celles des autres provinces, établissant un record canadien. Les chiffres montrent aussi que le Québec a franchi le cap des 1000 cas six jours à peine avoir atteint celui des 100 cas, alors qu’il a fallu 14 jours à l’ensemble du Canada, 21 jours aux États-Unis et 30 jours à l’Italie pour afficher cette progression.

Les 326 nouveaux cas annoncés mercredi représentent une hausse moins spectaculaire que la veille, même si elle reste importante. Les experts incitent toutefois à prendre les chiffres avec un grain de sel.

« Il est très difficile de comparer des pays, et même des provinces, sur la base des cas détectés, car les tests ne sont pas faits avec la même intensité dans chaque région. »

— Benoît Mâsse, professeur à l’École de santé publique de l’Université de Montréal

Plusieurs observateurs ont déjà souligné que la hausse du nombre de cas québécois pouvait s’expliquer, au moins en partie, par la hausse de la capacité de test. Le fameux changement de méthodologie est aussi invoqué – tous les cas devaient auparavant être confirmés par le Laboratoire de santé publique, ce qui n’est plus le cas. Notons par ailleurs que les chiffres québécois comprennent les cas confirmés et les cas probables, alors que seuls les cas confirmés sont publiés sur le site de l’Agence de la santé publique du Canada pour plusieurs provinces, dont l’Ontario et la Colombie-Britannique.

Pour éviter ces biais, Benoît Mâsse garde plutôt l’œil sur l’évolution du nombre d’hospitalisations.

« Ça, c’est le reflet direct de l’épidémie en cours, avec un recul de deux semaines. Tous les cas graves se retrouvent à l’hôpital et sont bien comptabilisés », dit-il. La courbe montre une hausse importante, avec un ralentissement de la croissance observée mercredi (11 nouveaux cas, contre 22 la veille).

« Il faudra attendre plusieurs jours pour voir si on passe d’une croissance exponentielle à une croissance linéaire, ce qui montrerait un ralentissement », dit l’expert, qui rappelle qu’on est encore bien tôt dans l’épidémie pour dégager des tendances.

« On s’attend à ce que la courbe continue d’augmenter. Ça ne veut pas dire que tous les sacrifices reliés à notre confinement collectif ne servent à rien. Mais les personnes restent hospitalisées longtemps : en moyenne 10 jours pour les cas moins sévères et jusqu’à trois semaines pour celles aux soins intensifs, selon les données chinoises. Il va donc nécessairement y avoir un délai avant que nos efforts de contrôle de la COVID-19 se reflètent sur le nombre d’hospitalisations », commente Mathieu Maheu-Giroux, épidémiologiste à McGill.

Un effet de la relâche scolaire ?

Est-ce que la COVID-19 frappe plus fort ici qu’ailleurs  ?

« Je n’ai pas la réponse définitive », répond Anne Gatignol, professeure-chercheuse en microbiologie au département de médecine de l’Université McGill. L’experte estime qu’il est possible qu’on vive actuellement l’effet à retardement de la relâche scolaire. De nombreux Québécois sont alors partis à l’étranger, ce qui suggère qu’ils ont pu rapporter le virus de pays où l’épidémie était plus avancée. À leur retour, ces voyageurs se sont mêlés à l’ensemble de la population puisque les mesures de confinement n’étaient pas encore en place.

Anne Gatignol dit aussi craindre des « bombes à retardement » héritées du manque de réactivité observé selon elle aux États-Unis et en Ontario. « Or, peut-être qu’elle n’est pas à retardement et qu’elle a déjà sauté, la bombe », dit-elle. Elle estime qu’on aura une meilleure idée de l’effet du confinement autour du 30 mars, soit deux semaines après le début de son instauration.

Pendant ce temps, en Ontario…

En Ontario, la semaine de relâche commençait plutôt le 16 mars. « Plusieurs personnes ont annulé leur voyage d’elles-mêmes pour la semaine de relâche, mais pas tous », dit Marc-André Langlois, épidémiologiste à l’Université d’Ottawa. Lui-même a retiré ses enfants de la garderie et de l’école avant que le gouvernement ne les ferme et il a demandé à ses parents de revenir de Floride le 12 mars, parce qu’il suivait la situation au Québec et prévoyait que ça s’en venait. « Mais mon voisin d’en arrière est parti en Floride avec sa famille. »

La disparité des règles entre les deux provinces pose-t-elle problème  ? « On a pas mal les mêmes règles, mais elles n’ont pas été introduites en même temps, dit le Dr Langlois. Ça a pu être un problème pour les Québécois qui travaillent à Ottawa. La moitié des employés de mon université, par exemple, habitent au Québec. Ils ont peut-être pris moins au sérieux les recommandations québécoises en voyant que ça ne se passait pas de la même manière en Ontario. »

La capacité des laboratoires de diagnostic a-t-elle été aussi lente à augmenter  ? « À Ottawa, on fait les tests diagnostiques ici depuis le début de la semaine du 16, dit l’épidémiologiste d’Ottawa. Mais à Gatineau, ils envoyaient encore cette semaine leurs échantillons à Montréal. »

Les descriptions de cas publiés sont aussi plus précises qu’au Québec : pour chaque cas, on indique l’âge approximatif, le sexe, la région de domicile, l’endroit où le virus a été contracté et si l’individu est en isolement.

Autre différence : les parcs pour enfants ne sont pas fermés en Ontario. « Ça s’en vient, mais on a tous été surpris quand le parc de la Gatineau a été fermé. Beaucoup de gens vont s’y promener, c’est très grand, et il ne reste plus grand-chose d’autre à faire », observe le Dr Langlois.

Le nombre d’employés des hôpitaux infectés est aussi élevé. « On vient d’avoir des cas à Ottawa ; à Toronto, ils sont nombreux, dit le Dr Langlois. Maintenant, tous les travailleurs de la santé sont contrôlés avant leur quart de travail. »

Le Dr Langlois est inquiet : le chiffre de 4000 cas réels circule dans le réseau de la santé à Ottawa. « Si c’est exact, les hôpitaux vont avoir de gros problèmes, étant donné que 20 % des patients doivent être hospitalisés. »

Les chiffres en Ontario

688 cas

36 635 personnes testées

24 458 résultats négatifs

9 morts

8 patients infectés ne sont plus positifs (2 tests négatifs à 24 heures d’intervalle)

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« La plus grande bataille de notre vie »

François Legault a lancé un appel à l’unité mercredi : la pandémie de COVID-19 « risque d’être la plus grande bataille de notre vie ». À ce jour, le Québec compte trois nouveaux morts, portant le bilan à sept. Et même si la province demeure la plus touchée au pays, avec maintenant 1339 cas confirmés de la maladie, les résultats « sont encourageants », selon le premier ministre.

Une guerre à gagner

François Legault a confirmé mercredi que deux nouvelles personnes âgées qui habitent des régions rurales, dont l’une revenait de voyage ou avait été en contact avec un voyageur, sont mortes de la COVID-19. Un troisième décès – le premier à Montréal –, a été annoncé plus tard en après-midi. Au moment de publier, le Québec comptait 1339 cas confirmés, en augmentation de 326 cas en une journée ; 78 personnes sont désormais soignées dans les hôpitaux en raison du coronavirus, dont 35 aux soins intensifs. Parmi ceux qui ont subi un test pour la COVID-19, 26 600 cas se sont avérés négatifs et 3000 tests sont toujours en attente de résultat. « On a actuellement une espèce d’armée de 8,5 millions de personnes pour combattre le virus. Ça risque d’être la plus grande bataille de notre vie. On va en parler longtemps. Nos petits-enfants, dans 20 ans, dans 50 ans, vont se rappeler comment le peuple québécois a réussi, ensemble, à gagner la bataille », a déclaré d’un ton solennel le premier ministre du Québec.

Peut-on se comparer avec les autres provinces ?

Le Québec se classe en position de tête du nombre de cas de COVID-19 au pays. Il est toutefois difficile de comparer les provinces sur cette base, a prévenu mercredi François Legault. « Même moi, avec les ressources que je peux avoir pour avoir des statistiques, je ne suis pas capable de faire cette comparaison », a-t-il dit. D’abord, les provinces n’appliquent pas les mêmes critères avant de faire un test. Le Québec teste depuis mercredi les citoyens qui présentent des symptômes, alors qu’il ne testait avant que ceux qui revenaient de voyage et leurs proches. Chaque province ne teste pas non plus à la même vitesse. « L’hospitalisation, les cas sévères, c’est un bon indice de comparaison [entre les provinces], parce que c’est les gens qui finissent par se retrouver à l’hôpital, qu’ils soient en Ontario ou ici, ils finiraient par se retrouver à l’hôpital », a précisé le directeur national de santé publique, Horacio Arruda. M. Legault soutient que le Québec, « toute proportion gardée », a effectué plus de tests que la moyenne canadienne.

Appel aux snowbirds

François Legault avait un mot mercredi pour les milliers de snowbirds québécois qui reviennent de la Floride : « Vous devez vous isoler pour deux semaines. C’est très, très important. Vous êtes à risque, donc vous restez à la maison. » M. Legault a par ailleurs affirmé qu’il n’était pas permis pour eux de sortir faire une marche. À Ottawa, le gouvernement a invoqué la Loi sur la mise en quarantaine qui ordonne aux voyageurs de se mettre en isolement 14 jours. Des arrangements ont été pris avec des hôtels des quatre villes canadiennes, dont Montréal, où atterrissent encore des vols internationaux afin que les voyageurs fassent leur quarantaine sur place si nécessaire.

De l’équipement médical suffisant

Devant l’inquiétude du personnel de la santé, le gouvernement Legault doit revenir constamment sur la question de l’approvisionnement du matériel médical lors de ses points de presse quotidiens. Mercredi, il a une fois de plus assuré que le matériel était disponible en quantité suffisante pour les prochaines semaines. Il a toutefois admis qu’il y avait eu des « petites difficultés » dans la distribution et « peut-être dans les directives » aux établissements de santé. « On y a vu, on va corriger. On corrige la situation, puis on veut le savoir », a affirmé la ministre de la Santé, Danielle McCann. Elle a aussi assuré qu’il sera possible pour les infirmières de faire laver leurs uniformes à l’hôpital pour éviter de rapporter des vêtements contaminés à la maison.

De la patience pour les loyers

Avec l’économie qui tourne au ralenti et la majorité des entreprises qui ont cessé leurs activités jusqu’au 13 avril, François Legault a demandé un peu d’empathie aux propriétaires de logements locatifs. « Il y a le loyer qui s’en vient, le 1er avril, puis les chèques du gouvernement fédéral devraient arriver à compter du 6 avril. Je veux faire un appel aujourd’hui à tous les propriétaires, d’être compréhensifs, d’être capables d’attendre quelques jours avant de recevoir le loyer », a-t-il plaidé mercredi. Pour les sans-abri qui passent la nuit dans des dortoirs, le premier ministre a reconnu qu’il y avait un enjeu pour freiner la transmission du virus. Québec tentera au cours des prochains jours de les loger à l’extérieur de ces salles communes, notamment dans l’ancien hôpital Royal Victoria à Montréal.

De l’aide avant le 6 avril ?

Ottawa a confirmé mercredi que le nouveau système pour gérer le fort volume de demandes de prestation d’assurance-emploi sera bel et bien en place autour du 6 avril. Or, le gouvernement Legault évalue ce qui peut être fait, en collaboration avec le ministre du Travail, Jean Boulet, pour venir en aide aux Québécois qui ne seront pas en mesure de tenir financièrement jusqu’à cette date. « On est en train de se préparer effectivement à ce qu’il y ait des cas, d’ici le 6 avril, qui vont avoir besoin d’argent pour de la nourriture, pour le loyer […] », a indiqué M. Legault mercredi. « On essaye de voir ce qu’on peut faire pour aider les cas exceptionnels. »

Pas d’amendes aux récalcitrants… pour l’instant

Si les règles pour les entreprises sont strictes et que l’isolement des Canadiens rentrant de voyage est obligatoire, François Legault ne compte pas demander aux policiers d’appliquer des dispositions législatives qui leur permettraient d’imposer des amendes aux récalcitrants. « Ce que j’ai dit à [la ministre de la Sécurité publique] Geneviève Guilbault, c’est que nous voulons informer la population [des règles en vigueur]. Nous ne sommes pas encore rendus à l’étape où l’on doit donner des amendes », a-t-il affirmé. Québec sera également attentif ces prochaines semaines à l’évolution du nombre de nouveaux cas confirmés de COVID-19. Si la courbe ne s’aplanit pas, le gouvernement pourrait être « obligé de poursuivre » ses mesures draconiennes au-delà de la mi-avril.

« La vie continue »

Sur une rare note un peu plus personnelle, le premier ministre François Legault a indiqué mercredi qu’il « se sent bien » physiquement et qu’il fait « attention à [lui] » et à ceux qui l’entourent. Il a par ailleurs précisé qu’il s’accordait une journée de congé samedi et que la vice-première ministre Geneviève Guilbault prendrait la relève. « La vie continue. Il y a de bonnes nouvelles. J’en ai eu moi aussi comme des naissances dans ma famille. Il faut essayer de voir après la crise. Notre défi sera de raconter tout ça un peu comme une grosse anecdote. […] On est capables de passer au travers. C’est sûr que je ne vois pas mes deux fils qui sont à Montréal, mais je me sens bien », a-t-il expliqué.

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16 cas à la résidence EVA

Le Centre intégré de santé et de services sociaux (CISSS) de Lanaudière a confirmé, mercredi après-midi, que la résidence EVA de Lavaltrie comptait maintenant 16 cas confirmés de COVID-19. Sept de ces résidants sont hospitalisés. Le premier décès lié à la COVID-19 au Québec, survenu la semaine dernière, concernait une résidante de cet établissement. Trois autres occupants de la résidence EVA sont aussi morts des suites de la maladie la semaine dernière. Plusieurs ressources ont été mises en place pour éviter la propagation de la maladie et assurer la sécurité des résidants, explique le CISSS dans son communiqué. Deux agents de sécurité sont entre autres sur place en tout temps « afin de voir au respect des consignes et du contrôle des portes ». Un patrouilleur de la Sûreté du Québec est aussi stationné à l’entrée du stationnement et peut venir prêter main-forte aux agents de sécurité. Alors que les résidants sont censés être confinés, certains ne respectent pas les règles. « Une démarche a été réalisée auprès des instances concernées afin de connaître l’identité de ces personnes. La Direction du CISSS pourra procéder à une intervention personnalisée auprès de ces personnes, s’il y a lieu », est-il écrit dans le communiqué.

— Ariane Lacoursière, La Presse

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Concentration de cas dans le centre-ouest de Montréal

Plus de 42 % des 603 cas d’infection à la COVID-19 à Montréal sont concentrés dans le centre-ouest de l’île, ce qui correspond notamment aux villes de Westmount, Mont-Royal et Côte-Saint-Luc et aux arrondissements d’Outremont et de Côte-des-Neiges–Notre-Dame-de-Grâce.

C’est le constat fait par la Dre Mylène Drouin, de la direction régionale de santé publique de Montréal, lors d’une conférence de presse vidéo mercredi. Selon elle, « il y a vraiment quelque chose qui se passe » sur le territoire du CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal, même si à proprement parler, aucune éclosion n’a été relevée.

« C’est assez difficile à ce stade-ci de trouver les raisons. Est-ce qu’il y a eu plus de dépistage, plus de voyages, plus de gens qui sont revenus de l’extérieur, des snowbirds, par exemple ? »

— La Dre Mylène Drouin

La directrice régionale de santé publique a expliqué que ses équipes qui font les enquêtes épidémiologiques cherchent actuellement des réponses. Ces enquêtes sont au cœur des interventions de la santé publique. « À mesure qu’on va avancer dans nos investigations, probablement qu’on va arriver à comprendre un peu plus le phénomène », a-t-elle affirmé.

253 personnes infectées

Ainsi, 253 personnes sur les 603 cas répertoriés sont des résidants du centre-ouest. Il faut toutefois souligner que les patients atteints de la COVID-19 soignés à l’Hôpital général juif ne sont pas comptabilisés dans les statistiques puisque certains proviennent d’autres régions.

Le vaste territoire du CIUSSS du Centre-Ouest-de-l’Île-de-Montréal compte environ 350 000 habitants. Comme le montre un document émanant du CIUSSS faisant le portrait du territoire, on note « une forte présence de la population favorisée matériellement et socialement ». « En 2015, 9,0 % des ménages du CIUSSS avaient des revenus totaux avant impôts de plus de 200 000 $ », peut-on lire. Sur la carte, ces secteurs nantis sont voisins de poches de défavorisation comme les quartiers de Parc-Extension et de Côte-des-Neiges.

Dans le territoire du CIUSSS, on retrouve 77 écoles primaires et secondaires du secteur public, contre 56 écoles privées, dont le Collège Jean-de-Brébeuf, où deux cas de contamination au coronavirus ont été détectés.

Le secteur montréalais le plus touché après le centre-ouest de l’île est le centre-ville, où l’on compte 20 % de tous les cas confirmés en date de mercredi après-midi. Les secteurs Nord, Ouest et Est de l’île se partagent les autres cas, respectivement entre 12 % et 15 % du total.

Profil

La Dre Drouin a dressé le profil des personnes infectées à Montréal. Ce sont majoritairement des hommes qui sont infectés (56 %). La moitié des personnes qui ont eu un résultat positif de leur test ont plus de 50 ans. De ce nombre, 27 % sont des personnes âgées de plus de 60 ans. C’est d’ailleurs dans cette catégorie d’âge que la COVID-19 a fait sa première victime à Montréal.

Une personne sur deux a voyagé au cours des dernières semaines, a souligné la Dre Drouin. 

On compte également des cas qui ont été en contact avec des gens ayant voyagé. Par ailleurs, des cas de contamination communautaire dont la santé publique ne parvient pas à déterminer la source sont apparus.

Le message d’isolement pendant 14 jours aux voyageurs qui sont de retour à Montréal a été réitéré. Depuis deux jours, ce sont 14 000 personnes en provenance des États-Unis ou d’outre-frontière qui sont rentrées. « Nous ne pouvons pas nous permettre d’importer de nouveaux cas à Montréal et dans le reste du Québec », a dit la Dre Drouin.

Le bilan de la Dre Mylène Drouin fait état également de l’infection de 31 personnes parmi le personnel soignant.

Trois cas de COVID-19 aux Îles-de-la-Madeleine

Le maire et la famille infectée en appellent au calme

La confirmation de trois cas de COVID-19 au sein d’une même famille mardi a suscité inquiétudes et conjectures aux Îles-de-la-Madeleine. Le maire Jonathan Lapierre a lancé un appel au calme, et la mère de la famille touchée a accepté de témoigner publiquement pour rassurer la population.

Déjà, le traversier qui fait la navette entre Souris, à l’Île-du-Prince-Edouard, et les Îles-de-la-Madeleine, au Québec, avait commencé à faire jaser sur les réseaux sociaux mardi. Un commentaire suggérait que des résidants de l’Île-du-Prince-Edouard et du Nouveau-Brunswick venaient se réfugier massivement aux Îles.

« Trente minutes après, la Santé publique a annoncé trois cas. Le système téléphonique de la mairie a sauté », a raconté le maire des Îles-de-la-Madeleine, Jonathan Lapierre, en entrevue téléphonique avec La Presse mercredi.

La société CTMA, qui exploite le traversier, lui ayant confirmé qu’au moins 90 % des passagers étaient des Madelinots qui rentraient chez eux, il s’est tourné vers la radio locale.

« Oui, il y a peut-être des gens de l’extérieur qui arrivent aux Îles, mais ce sont des gens qui viennent travailler dans des entreprises qui offrent probablement des services essentiels. De là l’appel au calme », a déclaré M. Lapierre sur les ondes de CIFM mardi.

Les trois personnes infectées « collaborent pleinement », a ajouté le maire en invitant à la population à « les soutenir de façon virtuelle » et à « les encourager ». 

« Il ne faut surtout pas leur faire un procès d’intention ou [un procès] sur la place publique. »

— Le maire Jonathan Lapierre

L’histoire de cette famille revenue de voyage à l’étranger a néanmoins continué à grossir sur les réseaux sociaux de cet archipel de 13 000 habitants – au point que la famille a décidé de rompre l’anonymat.

« C’est pas vraiment de gaieté de cœur », a confié Valérie Landry en entrevue à CIFM mercredi après-midi.

« Mais je pense que c’était une nécessité en fonction de tout ce qui s’est dit, ce qui s’est parlé hier sur les réseaux sociaux », a poursuivi cette mère de famille.

« Pas le temps de paniquer »

Mme Landry, qui est dentiste à Fatima, a atterri aux Îles le 17 mars après un séjour en République dominicaine avec son conjoint et leurs deux enfants. Son conjoint, leur fils et elle ont commencé à ressentir des symptômes après un délai de plus de trois jours. Leur fille en est exempte. Mais hormis une personne à l’aéroport, ils n’ont eu aucun contact aux Îles depuis leur arrivée, puisqu’ils se sont immédiatement isolés, a assuré Mme Landry.

« Étant une professionnelle de la santé, c’était obligatoire. Et de mon propre chef, j’avais obligé mes enfants et mon conjoint à le faire parce que si lui se promène, c’est un peu n’importe quoi. »

— Valérie Landry

La dentiste a appelé les Madelinots à respecter les consignes de santé publique et à se faire tester s’ils ressentent des symptômes. « Ce n’est surtout pas le temps de paniquer. »

Tout en disant comprendre pourquoi ses concitoyens avaient mis autant d’énergie à tenter d’identifier sa famille, elle les a appelés à consacrer plutôt cette énergie « à [se] protéger, à protéger [leurs] familles ».

Comme dans plusieurs régions, le respect des consignes de santé publique est loin d’être universel aux Îles.

« Je pense que les gens ne réalisent pas encore la gravité de la situation. Ils font encore des rassemblements familiaux et amicaux », nous a indiqué une personne travaillant dans le réseau de la santé qui n’a pas souhaité être identifiée.

Préoccupations pour l’approvisionnement

Malgré l’isolement de l’archipel, le maire Lapierre dit ne pas être inquiet de la réponse du système de santé. Les cas nécessitant une hospitalisation seront transférés à Québec, et si jamais cette région n’était plus en mesure de les accueillir, l’organisation de santé locale « a la commande de développer une capacité d’hospitalisation », dit-il.

Ce qui le préoccupe davantage, c’est l’approvisionnement. « On a besoin d’avoir une liaison maritime et aérienne continue pour les médicaments, la poste, le gaz, le mazout, les pièces de bateaux et de véhicules… » Voyant qu’Air Canada arrêtera ses vols en avril et que Pascan réduira les siens de moitié, il a fait des représentations à Québec pour que le transport aérien régional soit reconnu comme essentiel, et soutenu financièrement. « Si Pascan Aviation tombe, c’est une partie de la chaîne d’approvisionnement des Îles qui tombe », prévient Jonathan Lapierre.

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