Montréal

La fin du plastique à usage unique approche

La Ville de Montréal a déposé mercredi son règlement visant à bannir les plastiques à usage unique dans la métropole à partir du 1er mars 2023 et les sacs de plastique dès le 1er septembre 2022.

« On annonce la fin du plastique à usage unique à Montréal. Pas question pour nous d’attendre les autres [ordres] de gouvernement. […] L’objectif est nécessaire et il faut l’atteindre », a déclaré d’emblée la mairesse de Montréal, Valérie Plante, en conférence de presse.

La liste complète des produits qui seront touchés par cette interdiction a été dévoilée mardi. Les gobelets et contenants à emporter en mousse de polystyrène, les barquettes en polystyrène pour les fruits ou les légumes de même que les ustensiles en plastique figurent tous dans cette réglementation.

Les articles à usage unique qui sont vendus à l’étalage ne seront pas touchés. Ainsi, les pailles en plastique continueront à être commercialisées, mais ne seront plus distribuées lors de l’achat de nourriture prête à consommer.

Les articles à usage unique dans un organisme à but non lucratif, dont la mission inclut la distribution d’aliments, ne sont pas visés.

« Malgré leur utilité apparente, l’ensemble de ces produits ont un impact environnemental majeur. Vous n’êtes pas sans savoir que le plastique met des centaines, parfois des milliers d’années à se décomposer, alors qu’on sait très bien que des alternatives existent », a indiqué la responsable de la transition écologique et de la résilience au comité exécutif, Laurence Lavigne Lalonde.

Le règlement entrera en vigueur le 1er mars 2023.

« On a prévu des délais pour permettre aux commerces et aux restaurants de se concentrer sur la reprise de l’activité économique et d’écouler leurs [stocks]. »

— Valérie Plante, mairesse de Montréal

Les entreprises qui ne respectent pas le règlement pourraient recevoir une amende entre 400 $ et 2000 $ et jusqu’à 4000 $ en cas de récidive.

Les sacs d’emplettes

Dès le 1er septembre 2022, la distribution de certains sacs d’emplettes à usage unique dans les commerces de détail et les restaurants sera également interdite. Le règlement s’applique à tous les sacs à usage unique, quelle que soit leur épaisseur.

Les sacs d’emballage qui sont utilisés pour transporter des denrées alimentaires, comme les fruits et les légumes, jusqu’à la caisse, demeureront autorisés.

Ce règlement entrera en vigueur dans un an. Les spécialistes estiment que le temps requis pour que les entreprises écoulent leurs réserves de sacs est d’environ six mois.

Les Montréalais jettent aux ordures 15 000 tonnes de plastique à usage unique par an. Le seul centre d’enfouissement de la région de Montréal atteindra sa pleine capacité en 2029.

Une réglementation bien accueillie

« Souvent, les municipalités vont émettre un règlement sans consulter les parties prenantes. Ce qu’on trouve intéressant, c’est que la Ville a pris le temps de nous consulter. [Elle a] pris le temps de voir quels étaient les enjeux et [a] pris en considération certaines de nos demandes », a affirmé Stéphane Lacasse, directeur des affaires publiques et relations gouvernementales de l’Association des détaillants en alimentation du Québec.

L’association avait notamment demandé le maintien des sacs en vrac et des barquettes en polystyrène pour la viande crue, ce qui a été fait.

Franck Henot, copropriétaire de l’Intermarché Boyer, dans l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal, est très satisfait de cette nouvelle réglementation. « Je suis très content. La démarche d’aujourd’hui, on l’applaudit. » L’Intermarché Boyer a déjà amorcé un virage écoresponsable il y a un an et demi.

« On a eu une très bonne réaction des clients, nos employés étaient très fiers et j’ai beaucoup économisé. »

— Franck Henot, copropriétaire de l’Intermarché Boyer, à propos du virage écoresponsable de son commerce

« On est somme toute favorables à l’approche réglementaire désirée par l’administration Plante. Plusieurs exploitants sont prêts à aller vers des solutions alternatives et sont dans des recherches pour verdir leurs exploitations et être plus écoresponsables », a renchéri Martin Vézina, responsable en communication et affaires publiques à l’Association Restauration Québec.

Remi Cain, assistant-gérant du Bistro Chez Roger, dans l’arrondissement de Rosemont–La Petite-Patrie, est du même avis. « Cette mesure nous convient. Il faut penser à la planète. Elle est déjà en assez mauvais état comme ça. Si on peut contribuer, on va le faire. »

« La Ville envoie un message clair en interdisant les sacs de plastique, et ce, peu importe leur épaisseur », a déclaré Amélie Côté, analyste en réduction à la source chez Équiterre. Elle se désole toutefois que les gouvernements provincial et fédéral n’aient pas encore emboîté le pas « pour obtenir des résultats à bien plus large échelle », soutient-elle.

De son côté, l’équipe Coderre déplore que cette annonce n’ait pas été faite plus tôt. « Une chance que les élections municipales approchent pour inciter l’administration Plante à passer à l’action : ça fait trois ans qu’Ensemble Montréal la talonne à ce sujet, notamment avec le dépôt d’une motion en mai 2018 pour que Montréal adopte une stratégie de réduction du plastique sur son territoire », a déclaré Francesco Miele, porte-parole de l’opposition officielle en matière d’environnement.

Loi fédérale

« C’est une belle preuve de leadership de l’administration de Valérie Plante. Par contre, on aurait aimé voir ce même genre de leadership du gouvernement fédéral », a affirmé Alexandre Boulerice, député de Rosemont–La Petite-Patrie, à Montréal, en entrevue avec La Presse.

En octobre 2020, Ottawa avait également annoncé qu’il souhaitait interdire différents articles en plastique à usage unique dès 2021.

Le gouvernement fédéral avait proposé d’interdire six types d’objets, soit les sacs en plastique, les pailles, les bâtonnets à mélanger, les porte-canettes, les ustensiles et les récipients alimentaires faits de plastiques difficilement recyclables. Ces mesures n'ont toujours pas été mises en place.

Le ministre du Patrimoine canadien et ancien militant écologiste Steven Guilbeault avait indiqué vouloir bannir ce qui ne peut être recyclé et recycler le reste.

« Il parle du plastique depuis quelques années, mais il traîne les pieds et ça force les municipalités comme la Ville de Montréal à prendre les devants », soutient M. Boulerice.

Lors du sommet des pays du G7 tenu en 2018, le Canada avait signé une charte s’engageant à ce que tout le plastique produit dans chaque pays soit réutilisé, recyclé ou brûlé pour produire de l’énergie d’ici 2040.

En chiffres

3 millions

Nombre de tonnes de déchets de plastique jetés chaque année au Canada

9 %

Proportion des déchets de plastique qui sont recyclés au pays

Source : gouvernement du Canada

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.