Vers une salle de bains sans papier

L’une des nombreuses choses que la pandémie nous a apprises, c’est que le papier hygiénique est perçu comme un essentiel en temps de crise. La nouvelle salle de bains est appelée à s’en passer pour des raisons écologiques, mais aussi pour le confort et le coût.

Que faisions-nous avant l’arrivée du rouleau triple épaisseur plus soyeux qu’un chat persan ? On prenait ce qu’on avait sous la main. Du papier journal, entre autres choses. Voudrait-on retourner à cette époque pour l’environnement ? Le fait que les informations nous proviennent maintenant sur tablette et en ligne nous donne un excellent prétexte pour répondre : impossible !

Il existe fort heureusement d’autres options. Le papier hygiénique fait de fibres recyclées en est une. Mais s’il est possible de faire un pas de plus en gagnant au change, la réflexion en vaut la peine, selon Marie-Eve Lupien. L’entrepreneure s’est penchée sur la question en 2019, un an après avoir lancé des mouchoirs lavables. Pour sa petite entreprise, Bateau bateau, la transition vers le papier hygiénique lavable était la suite logique.

« À l’époque, ce que le marché offrait, c’était des carrés de flanelle qui s’accrochent pour en faire un rouleau. D’une part, je n’avais pas envie de m’essuyer avec un tissu à snaps, et ça ne m’intéressait pas de passer du temps à remonter des rouleaux de papier lavable. » Après plusieurs tests pour développer une approche efficace et simple, l’entrepreneure a lancé son produit à la fin de 2020.

« Le blocage psychologique à utiliser du papier de toilette lavable est la propreté, constate-t-elle. Le bidet vient régler la question en amenant une notion d’hygiène. » Qui voudrait prendre une douche à sec ? C’est pourtant ce que propose le papier de toilette alors que le bidet permet un nettoyage à l’eau. Est-il plus écologique ? Pour avoir une intimité « spic and span », on n’utilisera pas plus d’un demi-litre d’eau avec un bidet à chaque utilisation. En comparaison, un rouleau de papier hygiénique aura exigé environ 140 L pour sa fabrication, selon le Worldwatch Institute.

Le nec plus ultra de la toilette

Dans bien des coins du monde, le bidet et la toilette intelligente font partie des mœurs. Qui a eu l’occasion de voyager au Japon n’a pas oublié le luxe des cuvettes technos qui limitent au maximum toute source d’inconfort dans ce moment d’intimité.

Avec une lunette chauffée, un jet d’eau toujours tiède et quelques options qui varient en fonction des modèles – séchoir à fesses, fonctions personnalisées pour chaque utilisateur, ambiances sonores et lumineuses –, les toilettes intelligentes permettent une rencontre avec soi-même quasi plus zen qu’au spa. La tendance est à la hausse depuis l’arrivée de la COVID-19. À un coût oscillant entre 1200 $ et plus de 22 000 $, la toilette intelligente demeure toutefois accessible à une minorité.

Le bidet écono

La solution économique et rapide pour passer à la formule hybride ou sans papier est le bidet amovible, offert dans les boutiques spécialisées et quincailleries, qui est relativement facile à installer.

siège-bidet (de 45 $ à 550 $)

Sous forme de siège qu’on dépose sur la cuvette ou d’un anneau qu’on glisse sous la lunette, il agrémente la toilette existante de un ou deux jets d’eau qui fusent de l’arrière vers l’avant. Des commandes permettent d’en contrôler l’intensité et la température, selon le modèle choisi.

douchettes de toilette (de 25 $ à 230 $)

Plus rudimentaires, puisque sans intensité de jet ou de choix de température, hormis pour de rares modèles thermostatiques, elles doivent être contrôlées manuellement. Elles facilitent en revanche le prénettoyage des couches, lingettes ou serviettes hygiéniques lavables.

« Le choix de l’une ou l’autre des formules repose sur les particularités de chaque installation, indique Marie-Eve Lupien. Si on ne peut démonter la lunette de sa toilette [chose qui arrive, on confirme] ou que la forme de sa toilette n’est pas compatible avec l’ajout d’un siège-bidet, la douchette est une solution moins luxueuse, mais efficace. » Ces deux options se connectent à l’arrivée d’eau du réservoir de la toilette. À noter : jouer avec une plomberie désuète complique les choses et risque de modifier un équilibre parfois précaire.

bidet portatif (de 15 $ à 35 $)

Les moins manuels et les irréductibles ont toujours l’option du bidet de voyage. Son avantage le plus évident est qu’il peut être utilisé partout – en camping, en roulotte, en bateau – et qu’on le remplit d’une eau à la température de son choix.

Eau chaude ou eau froide ?

Avec un bidet sans eau chaude, l’expérience saisit désagréablement lorsque le mercure affiche -20 °C dehors et que la tuyauterie est glaciale. Certains modèles plus douillets offrent une fonction eau chaude à température réglable, mais le temps que le jet se réchauffe par temps froid, la besogne est déjà terminée. À moins d’avoir préalablement fait couler l’eau à faible débit par le nettoyeur de buse, par exemple. Pour les installer, la toilette devra être située près d’une arrivée d’eau chaude, donc à proximité du lavabo.

Homme, femme : même expérience ?

Le jet d’un bidet est directement orienté vers la zone arrière. Pour atteindre l’avant, les dames de la maison devront bouger stratégiquement sur leur siège et positionner leur bassin dans le bon angle, à moins de disposer d’un bidet à deux buses dont l’une vise plus loin vers l’avant. Deux points bonus pour le modèle à deux buses, donc ! Les hommes risquent, quant à eux, de voir certains inconvénients à la douchette qu’il faut glisser entre les jambes pour atteindre l’arrière.

Apprivoiser la bête

L’attachement à ses habitudes et au papier hygiénique est variable selon les utilisateurs et exige un temps d’adaptation pour trouver sa zone de confort. Avant d’éliminer complètement la présence de papier dans la salle de bains, pensez aux invités. « Comment ça fonctionne ? » n’est peut-être pas la question qu’ils souhaiteront vous poser au cours du souper.

Le lavable : en formule hybride ou à sec

« Ma fille de 5 ans n’utilise toujours pas le bidet parce que ça lui fait peur. Elle utilise carrément les rouleaux lavables qu’elle dépose dans le sac imperméable, et c’est sans odeurs », assure Marie-Eve Lupien. Certains les déconseillent à sec pour les œuvres plus consistantes. « Pour ma part, je les dépose directement du sac imperméable à la laveuse, sans prérinçage. Et ça lave ! Mais si on a des scrupules, on peut toujours y aller en mode hybride, propose-t-elle. L’un des problèmes avec le papier de toilette, c’est que c’est fin. Pour se protéger la main, on s’en fait des mitaines. En déposant un seul carré à la fois sur une lingette, on enlève le plus gros. Après, franchement, il ne reste plus grand-chose à nettoyer. »

130

Un Nord-Américain utilise en moyenne 130 rouleaux de papier de toilette par année.

Source : World Wide Fund (WWF)

270 000

Chaque jour, dans le monde, l’équivalent de 270 000 arbres prend le chemin des égouts.

Source : World Wide Fund (WWF)

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