L’univers comme vous ne l’avez jamais vu

Des galaxies formées peu après le Big Bang, il y a plus de 13 milliards d’années : la première image du télescope James Webb a été dévoilée lundi. Le président des États-Unis, Joe Biden, a tenu à prendre part à l’évènement.

Le plus grand télescope spatial et le plus grand télescope naturel de l’Univers. C’est cette combinaison qui a été choisie par la Maison-Blanche pour illustrer, lundi soir, les capacités du télescope spatial James Webb.

« Ce sont des images fantastiques, incroyables », témoigne l’astrophysicien montréalais René Doyon, depuis le centre spatial Goddard au Maryland, où il se trouve pour le dévoilement d’autres images du Webb mardi matin.

Le président Joe Biden a choisi de scooper la NASA en diffusant l’une des photos, montrant un amas de galaxies situé à 4,6 années-lumière. Annoncé lundi matin, ce projet de relations publiques a fait maugréer la communauté scientifique qui préparait depuis des mois le dévoilement du 12 juillet. Pire, le dévoilement par la Maison-Blanche a eu lieu avec près de deux heures de retard.

« Avec le télescope spatial Hubble, on arrivait à un mur à 12,5, 13 milliards d’années-lumière. On ne pouvait pas aller plus loin. »

– René Doyon, directeur de l’Institut de recherche sur les exoplanètes de l’Université de Montréal

Quand on observe le ciel, plus un objet est situé loin de la Terre, plus il est vieux, parce que l’Univers est en expansion. Les objets les plus éloignés de son centre sont donc les plus vieux. Cela signifie que le Webb pourra examiner le moment où les premières galaxies sont apparues.

« On sait qu’il y a eu une période de quelques centaines de millions d’années où il n’y avait que de l’hydrogène et de l’hélium, dit M. Doyon. Peu à peu, il y a eu des fluctuations, puis des réactions nucléaires. On pense que les premières étoiles étaient très massives, de 200 à 300 fois notre Soleil, et qu’elles duraient peu de temps, quelques millions d’années. Puis il y a eu les premières galaxies. Avec le Webb, on va pouvoir comprendre exactement ce qui s’est passé. »

Un amas de galaxies qui sert de lentille

Cette première image scientifique du Webb a été obtenue en le pointant vers un amas de galaxies appelé SMACS 2073. SMACS 2073 est tellement massif que la lumière des objets qui sont situés derrière est courbée. Cet « effet lentille » permettra par la suite d’observer des régions très, très éloignées. Cela fait de SMACS 2073 le plus grand télescope naturel de l’Univers.

Mardi, les images de quatre autres cibles vont être dévoilées par la NASA, y compris une exoplanète, WASP-96b, située à 1000 années-lumière de la Terre. Il s’agit d’une planète de la taille de Jupiter dont l’orbite autour de son étoile ne dure que quelques jours.

« On va pouvoir observer des molécules », dit M. Doyon, dont il s’agit du champ d’expertise. Il a d’ailleurs dirigé la mise au point de l’un des instruments du Webb, un « imageur proche infrarouge et spectromètre sans fente » (ou NIRISS, selon l’acronyme anglais).

Le Canada a fourni un autre instrument pour le Webb et aura 5 % du temps d’observation.

Techniquement, ces premières images ont été précédées en mai d’un échantillon permettant d’apprécier la résolution du Webb. Il s’agissait d’une image du nuage de Magellan, une galaxie de la Voie lactée, avec des images du télescope spatial Spizer, lancé en 2003, en comparaison.

Sept fois plus puissant que Hubble

Webb, lancé le 25 décembre dernier, est sept fois plus puissant que le télescope spatial Hubble, lancé en 1989.

Il a fallu 30 ans pour compléter et lancer le Webb, nommé en l’honneur d’un administrateur de la NASA des années 1960.

Le Webb est situé à 1,5 million de kilomètres de la Terre, quatre fois plus loin que la Lune. Il se protège de la lumière (et donc de la chaleur du Soleil) par un écran de la taille d’un court de tennis, afin d’observer des étoiles très lointaines et très peu lumineuses.

L’endroit où le télescope est localisé est appelé « point de Lagrange L2 ». Il se caractérise par une force égale des gravités terrestre et solaire, ce qui signifie qu’il y aura très peu d’ajustements à faire sur le positionnement du télescope.


EN SAVOIR PLUS

9,6 milliards US
Coût prévu du télescope spatial James Webb

Source: SOURCE : NASA
178 millions CAN
Coût prévu de la contribution canadienne au télescope spatial James Webb en 24 ans

Source: SOURCE : AGENCE SPATIALE CANADIENNE

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