Pandémie de COVID-19

Le Canada a fait bonne figure, mais à quel prix ?

Le Canada, qui a le taux de vaccination contre la COVID-19 le plus élevé au monde, est devenu un modèle pour sa gestion de la pandémie. Grâce à des mesures de santé publique rigoureuses et à une forte solidarité tout au long des confinements et de la campagne de vaccination, le Canada a obtenu de meilleurs résultats, sur le plan de la santé, que de nombreux pays similaires, dont les États-Unis, le Royaume-Uni et la France. 1

Les Canadiens ont de quoi être fiers de ces résultats. Toutefois, nous ne devons pas oublier le coût extraordinaire des deux dernières années et demie.

Le fardeau de la dette sera long à alléger

La pandémie a causé l’une des plus graves perturbations jamais connues par l’économie canadienne. En avril 2020, alors que les confinements et les exigences de distanciation physique ont forcé les entreprises à fermer leurs portes, le chômage a grimpé à 14,7 % et les revenus des entreprises se sont effondrés. 2 Le taux de croissance du PIB du Canada est passé sous la barre du zéro pour la première fois depuis 2009.

La réponse fiscalement libérale du gouvernement était nécessaire et elle a sauvé l’économie d’une véritable récession – cependant, nous avons accumulé des dettes substantielles.

Le Canada a terminé l’année 2020 avec un fardeau de la dette inférieur seulement à celui de Hong Kong et du Japon, et le déficit budgétaire pour l’exercice 2020-2021 a atteint le chiffre record de 371,5 milliards de dollars. 3 Comme les prévisions indiquent qu’il faudra attendre la fin de la prochaine décennie pour rembourser cette dette, le moment est venu de nous concentrer sur notre relance économique, ainsi que sur l’augmentation de la résilience et de l’état de préparation de nos systèmes médicaux.

Des lacunes révélées

En mars 2020, le Canada et le reste du monde ont été pris au dépourvu. Alors que nous observions l’évolution de la situation aux quatre coins du monde, les lacunes de notre propre système de santé se sont révélées de manière tragique. Nos hôpitaux ont atteint un point de rupture malgré des taux d’hospitalisation liés à la COVID-19 de quatre à cinq fois inférieurs à ceux d’autres pays comme les États-Unis et le Royaume-Uni. Malheureusement, cette situation n’est pas surprenante, étant donné que le Canada est au deuxième rang pour le plus petit nombre de lits de soins actifs par habitant parmi ses homologues. Nous voyons encore aujourd’hui les échos de cette fragilité.

La pandémie a également mis en évidence la fragilité de nos chaînes d’approvisionnement face à une crise urgente. Nous avons pris du retard par rapport aux autres pays dans notre capacité à fournir des vaccins. Lorsque les premiers vaccins contre la COVID-19 ont été approuvés, d’autres pays ont été en mesure de les produire sur place en réoutillant les installations de fabrication de vaccins existantes. Compte tenu de notre infrastructure limitée de fabrication de vaccins, nous n’avions pas cette option. Nous avons maintenant la population la plus vaccinée au monde, bien que nous ayons été l’un des derniers pays avancés à commencer à administrer des vaccins, ce qui nous a coûté des vies supplémentaires et a prolongé la pression sur notre système médical.

Besoin de vaccins fabriqués au Canada

La pandémie a souligné l’importance fondamentale de notre secteur des sciences de la vie et la nécessité de faire preuve d’agilité dans le développement de nouveaux médicaments, vaccins et traitements.

Dans l’immédiat, nous devons continuer à renforcer la capacité de fabrication nationale et l’approvisionnement en médicaments et en dispositifs médicaux nécessaires.

Cette orientation est un aspect clé des stratégies relatives aux sciences de la vie publiées par Ottawa et de nombreuses provinces au cours des derniers mois. Ce travail est bienvenu et conforme aux conseils de nombreux experts externes avant et pendant la pandémie.

Les dernières années ont illustré le prix élevé de la complaisance. Et c’est pourquoi nous ne pouvons pas nous arrêter maintenant. Il est également nécessaire d’adopter une approche de politique publique plus large et mieux coordonnée à l’égard du secteur des sciences de la vie, éclairée par le leadership du secteur lui-même et ancrée dans les besoins fondamentaux des Canadiens.

Une stratégie de premier ordre pour le Canada consiste notamment à investir dans le recrutement des talents et des compétences nécessaires, à continuer d’améliorer l’agilité réglementaire, à offrir un traitement fiscal favorable et d’autres incitations aux fabricants de médicaments et de technologies médicales pour qu’ils investissent et innovent au Canada, à soutenir la commercialisation des innovations canadiennes et à mieux intégrer les entreprises canadiennes dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. Nous devons également investir dans la future main-d’œuvre formée aux STIM et supprimer les obstacles qui empêchent nos entreprises de sciences de la vie d’accéder aux plus grands spécialistes étrangers. Les gouvernements doivent donner suite aux engagements existants dans leurs stratégies récemment publiées et introduire des structures de gouvernance qui garantissent l’atteinte des objectifs.

Se préparer au pire

La pandémie a braqué les projecteurs sur l’importance de la préparation aux situations d’urgence et de la santé publique en tant que piliers de notre sécurité nationale et de notre bien-être économique. Nous devons profiter de cette occasion pour combler les lacunes de nos systèmes de santé qui ont été exposées au grand jour pendant la pandémie. En plus d’améliorer la sécurité des Canadiens, nos décisions d’investissement peuvent favoriser la mise en place d’un écosystème de classe mondiale dans le domaine de la biofabrication, des biotechnologies et des technologies médicales, ce qui contribuera à la reprise après la pandémie et à la croissance économique future.

Beaucoup de pays comme le Canada progressent dans leurs stratégies pour devenir des leaders mondiaux de l’innovation médicale. Dans un monde concurrentiel, les Canadiens s’attendent à ce que l’on continue de mettre l’accent sur ce secteur, même si la pandémie touche à sa fin.

Nous pouvons et devons faire beaucoup plus pour rendre le Canada plus résilient grâce à un secteur des sciences de la vie dynamique, ou alors nous risquons d’être laissés pour compte dans une chaîne d’approvisionnement de plus en plus mondialisée.

Gardons notre calme. Continuons notre chemin. Mais assurons-nous que le Canada fasse le nécessaire pour être prêt à affronter la prochaine pandémie.

1. Lisez le texte de CBC (en anglais)

2. Consultez l’étude du Canadian Medical Association Journal (en anglais)

Consultez le budget 2021 du gouvernement canadien

* Gordon McCauley est président et chef de la direction d'adMare BioInnovations ; Lesia Babiak est chef des affaires gouvernementales et de la politique chez Johnson & Johnson Canada.

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