Un (pas si) improbable duo

Les Tchèques Dominika Lásková et Tereza Vanišová joueront à Montréal

Toronto — Lorsque le nom de Dominika Lásková a résonné au repêchage de la LPHF, un mélange d’euphorie et de surprise a envahi la salle.

L’euphorie, c’était celle du groupe de joueuses tchèques sur place, survoltées de voir l’une des leurs être sélectionnée aussi tôt qu’au 19rang. C’est un peu ce qui alimentait aussi la surprise quasi générale, alors que des olympiennes canadiennes et américaines étaient encore disponibles.

En mettant le grappin sur Lásková, Montréal a pourtant donné le ton : quatre autres Tchèques ont été repêchées dans le top 50. Notamment Tereza Vanišová, qui rejoindra sa compatriote dans la métropole.

Pour l’observateur non averti, ces choix peuvent apparaître étonnants. Pour les joueuses présentes à Toronto, cela semblait autrement plus naturel, surtout sachant que les Tchèques sont médaillées de bronze des deux derniers Championnats du monde.

« On a pu voir à quel point elles jouent bien, a reconnu Marie-Philip Poulin. Ce n’est pas une surprise pour moi de voir des filles de partout [être repêchées]. »

« La Tchéquie a beaucoup de discipline, a abondé la gardienne Ann-Renée Desbiens. Elles travaillent fort, avec cohésion, et sont très physiques. Je suis certaine que ces deux joueuses vont amener cet aspect avec elles à Montréal. »

Cette « cohésion », c’est un peu (beaucoup) le legs de Carla McLeod. Cette Canadienne, double médaillée d’or olympique, est passée derrière le banc après les Jeux de Vancouver, en 2010. Elle a pris la tête du programme tchèque il y a deux ans. Et les résultats ont été saisissants.

« C’est une grande leader, je la suivrais n’importe où, a lancé Dominika Lásková. C’est un grand modèle pour moi. Malheureusement, je vais maintenant jouer contre elle. »

Car oui, McLeod est aujourd’hui dans la LPHF, après avoir accepté le poste d’entraîneuse-chef de l’équipe d’Ottawa.

« Nous n’avons pas de ligue élite en Tchéquie, alors les joueuses doivent s’exiler pour jouer, a pour sa part noté Tereza Vanišová. Alors de voir comment se développe notre équipe nationale, ça démontre à quel point Carla accomplit des choses incroyables. »

Même si Lásková et Vanišová évoluaient la saison dernière pour le Six de Toronto, dans la PHF, c’est bel et bien dans l’uniforme de leur pays natal qu’elles ont attiré l’attention de l’équipe montréalaise.

La directrice générale Danièle Sauvageau, qui s’intéresse depuis des années au développement des athlètes européennes, a expliqué avoir particulièrement apprécié la manière dont ses deux nouvelles joueuses se sont comportées contre le Canada et les États-Unis dans les derniers rendez-vous internationaux.

De longue date

Aujourd’hui réunies à Montréal, Dominika Lásková et Tereza Vanišová se connaissent depuis l’adolescence. Les deux se sont suivies à tous les échelons du programme national junior puis sénior. Elles ont traversé l’Atlantique pour étudier et jouer dans la NCAA – à Merrimack et au Maine, respectivement – avant de se retrouver à Toronto.

Les deux se sont longuement étreintes lorsque Montréal a sélectionné Vanišová au septième tour.

« Nous étions bien sûr surprises, mais à quel point nous pouvons être chanceuses ! », s’est exclamée Vanišová, une attaquante qui a participé au match des Étoiles de la PHF l’an dernier.

Toutes deux membres de l’équipe olympique tchèque qui a pris part aux Jeux de Pékin en 2022, elles s’enorgueillissent de pouvoir faire rayonner le hockey féminin européen au Canada et aux États-Unis. « Un jour, ce ne sera plus ces deux pays-là qui joueront pour l’or ! », a prédit Lásková. Cette défenseure à caractère offensif, qui évoluait d’ailleurs en attaque dans la PHF, se décrit comme une fabricante de jeux qui aime distribuer la rondelle.

Alternant entre un faciès sérieux, presque grave, et un sourire rayonnant, elle aime se voir comme le clown de son équipe. Celle qui agace ses coéquipières pour détendre l’atmosphère. Et qui leur souligne, à l’occasion, « qu’on est là parce qu’on aime ce jeu plus que tout ».

« Je veux juste m’assurer que tout le monde se le rappelle », conclut-elle.

Des Québécoises à New York, à Montréal et à Ottawa

Toronto — Il aura fallu un peu de patience, mais sept Québécoises ont finalement été repêchées par trois clubs de la Ligue professionnelle de hockey féminin (LPHF).

Élizabeth Giguère a été la première native de la Belle Province à entendre son nom. Elle poursuivra sa carrière à New York. Jade Downie-Landry et Alexandra Labelle, des anciennes de la Force de Montréal, l’y suivront. Le directeur général Pascal Daoust connaît particulièrement bien les deux dernières, qu’il a croisées lorsqu’il était entraîneur adjoint sur le circuit universitaire québécois.

Giguère, elle, n’avait jamais rencontré son nouveau DG, mais elle se réjouit à l’idée d’amorcer ce chapitre de sa carrière. Après avoir évolué à Boston, dans la PHF, la saison dernière, elle venait de déménager à Montréal afin d’y jouer avec la Force. Or, la ligue a été rachetée et dissoute pour créer la LPHF. Elle devra donc repartir pour les États-Unis.

La native de Québec aborde l’idée d’un deuxième déménagement en quelques mois avec philosophie. Même si « c’est un peu tough pour le moral », sa copine et elle étaient préparées à cette éventualité.

« On a hâte de trouver notre place et d’y rester, mais mon travail implique de bouger. Ça fait partie de la game d’être une professionnelle. Et je suis bien à l’aise avec ça ! », a ajouté Giguère en riant.

Aux anges d’être à Montréal

À peine rentrées chez elles après avoir terminé leur parcours universitaire dans la NCAA, Gabrielle David et Maude Poulin-Labelle étaient elles aussi prêtes à refaire leurs valises. Elles pourront toutefois s’en passer et commencer à se chercher un appartement à Montréal.

Les deux ont en effet été sélectionnées aux neuvième et dixième tours, respectivement, par l’équipe de la métropole.

« J’étais prête à aller n’importe où, mais c’est sûr que Montréal avait une plus grande place dans mon cœur », a avoué Gabrielle David. Après quatre années passées à l’Université Clarkson, dans l’État de New York, la route sera un peu moins longue pour que ses parents, établis à Drummondville, puissent la voir jouer.

Elle aura en outre l’occasion de renouer avec Marie-Philip Poulin et Ann-Renée Desbiens, entre autres, qu’elle a côtoyées au récent camp de sélection de l’équipe canadienne, son premier avec le club sénior. « Ce ne sont pas juste les meilleures joueuses du monde, ce sont aussi de bonnes personnes en dehors du hockey, a dit l’attaquante. Elles vont prendre soin de moi, c’est sûr, et me pousser en même temps. »

David et Poulin-Labelle font partie de la trentaine de joueuses qui, pour la première fois, passeront directement de l’université à une grande ligue professionnelle.

« J’en ai souvent rêvé, mais ce n’était jamais concret dans ma tête. »

— Gabrielle David

« Pendant longtemps, je me préparais à aller jouer en Suède, a renchéri Maude Poulin-Labelle. Alors de se retrouver dans un repêchage aussi beau et professionnel, c’est assez incroyable. Ce sont les filles avant nous qui ont pavé ça. Je me trouve chanceuse. »

La création de la ligue elle-même l’emballe, cela va de soi. Mais aussi ce qu’elle impliquera au quotidien.

Une défenseure à caractère offensif comme elle aura la chance d’amorcer sa carrière professionnelle « sous l’aile » – l’expression est la sienne – d’Erin Ambrose, quart-arrière de l’équipe nationale.

« Je vais pouvoir pratiquer avec elle tous les jours », s’est émue la volubile native de Sherbrooke.

« C’est ça qui va être exceptionnel. Jouer avec elle pour de bon, pas juste pendant une semaine et demie dans un camp d’entraînement. Je sais que je vais apprendre beaucoup plus vite vu qu’elle est là. C’est comme ça qu’on va pouvoir se développer. »

Ancienne des Canadiennes et de la Force, Ann-Sophie Bettez a complété le trio de sélections québécoises de Montréal, qui compte ainsi sur un fort contingent avec la présence déjà acquise de Poulin et de Desbiens dans la formation.

Audrey-Ann Veillette, des Carabins de l’Université de Montréal, a quant à elle été l’avant-dernière joueuse sélectionnée au repêchage de lundi. L’une des meilleures joueuses du circuit canadien l’an dernier, l’attaquante rejoindra l’équipe d’Ottawa.

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