Grand Prix du Canada

Alonso et Stroll font bonne figure sous la pluie

Deux séances d’essais libres, autant de séances perturbées par la pluie.

Les pilotes ont eu toutes sortes de difficultés à dompter la piste tantôt mouillée, tantôt sèche, du circuit Gilles-Villeneuve, vendredi. Les deux coureurs d’Aston Martin, réputés être à l’aise sous la pluie, s’en sont toutefois bien sortis, alors que Fernando Alonso a été le plus rapide de la deuxième séance de la journée, deux rangs devant Lance Stroll.

L’Espagnol a réussi le tour le plus rapide de l’après-midi en 1 min 15,810 s, devant George Russell (+0,463 s), de Mercedes, et Stroll (+0,654 s). Malgré quelques averses, la deuxième séance de la journée a été autrement plus efficace que la première, dominée par Lando Norris (McLaren) en 1 min 24,435 s.

Après coup, le Montréalais s’est montré satisfait de sa journée, malgré le faible nombre de tours parcourus. Les intempéries ont donné l’occasion à son équipe d’ajuster ses plans et de valider le comportement des pneus, a-t-il fait remarquer pendant une courte apparition à la télé.

« C’était un vendredi compliqué, a abondé Fernando Alonso. On est un peu dans l’inconnu. Ce sera un bon week-end pour ceux qui nous regardent, mais pour nous, il faudra faire les bons paris, notamment par rapport au choix des pneus. »

Charles Leclerc, chez Ferrari, a bien fait dans les deux cas, réalisant les troisième et quatrième temps, respectivement. En début de soirée, il a été convoqué par la FIA pour rencontrer les commissaires de course parce qu’il a utilisé des pneus intermédiaires alors que la piste n’avait pas été officiellement déclarée mouillée. Le pilote monégasque a finalement été mis à l’amende, pour un montant de 5000 euros.

La première séance d’essais libres avait été particulièrement houleuse. Elle s’était amorcée avec près d’une demi-heure de retard en raison d’une violente averse de pluie et de grêle, si bien que la piste était encore trempée lorsque les bolides sont sortis des puits. La chaussée avait toutefois séché pendant les tours d’entraînement des coureurs.

La deuxième séance a été problématique pour le champion du monde en titre et meneur du classement général Max Verstappen, qui a dû s’extraire de sa monoplace après avoir senti de la fumée, d’après ce qu’on a pu entendre sur les ondes radio.

Son écurie, Red Bull, croit qu’un problème électrique pourrait s’être produit. Une situation « non idéale », a dit le Néerlandais, qui aurait bien sûr préféré rouler davantage.

« Ce n’est certainement pas la manière dont j’aurais voulu que ça se passe, mais je crois que le plus important est de déterminer ce qui est arrivé et les impacts que ça peut avoir ce week-end, voire pour le reste de la saison », a-t-il ajouté, selon ce qu’a rapporté le site officiel de la Formule 1.

Six changements et mille questionnements

La Fédération internationale de l’automobile (FIA) a annoncé, jeudi, une série de changements réglementaires qui auront un effet majeur sur les voitures en piste à compter de 2026. Alors que l’organisation promet des bolides « plus agiles, compétitifs et durables », les pilotes, eux, se posent beaucoup de questions.

Ce qui changera

L’annonce de la FIA concerne principalement six éléments. Certains auront peu d’effet aux yeux du public, par exemple des mesures de sécurité accrues ou l’augmentation du nombre de motoristes (six, désormais). D’autres changements, toutefois, sont significatifs.

Des voitures plus petites et moins lourdes

Les dimensions des bolides seront réduites de 20 centimètres en longueur et 10 en largeur. Les pneus seront aussi légèrement plus petits. Surtout, on retranche 30 kg au poids des monoplaces, qui pèseront désormais 768 kg. On s’attend ainsi à voir des véhicules plus « agiles » et moins collés au sol.

Des moteurs plus écolos

La proportion électrique des groupes motopropulseurs sera plus importante – atteignant 50 % –, et on s’attend à ce que les carburants utilisés soient à 100 % d’origine renouvelable. La FIA travaille ainsi à respecter l’objectif de carboneutralité qu’elle s’est fixé pour 2030.

Des améliorations aérodynamiques

On remplacera le système de réduction de la traînée (DRS, en anglais) par un nouveau système d’ailerons mobiles, à l’avant et à l’arrière, qui une fois déployé aura un impact sur les accélérations dans les virages et les lignes droites. On croit ainsi que les courses seront « plus serrées ».

De nouvelles possibilités de dépassement

Un nouveau « mode de dépassement » conférera de la puissance supplémentaire aux pilotes qui suivent un adversaire à l’intérieur d’un écart d’une seconde ou moins. Les « suiveurs » pourront ainsi activer une impulsion de puissance générée par leur batterie.

Ce que redoutent les pilotes

Bien que les pilotes aient salué l’effort de la FIA concernant sa future réglementation, celle-ci amène son lot d’interrogations. Seuls quelques-uns des coureurs ont pu tester les nouveautés sur simulateur, tandis que les autres devront attendre l’hiver 2025 pour s’asseoir dans les premiers prototypes. A priori, leurs doutes se sont concentrés sur trois thèmes : le poids des voitures, le gain réel en compétitivité et une possible perte de vitesse.

Le poids

C’est ce qui semblait le plus retenir l’attention au sein des pilotes, jeudi. Fernando Alonso, d’Aston Martin, croit carrément que l’objectif de retrancher 30 kg est utopique.

« Si tu mets l’unité de puissance à 50 % électrique, avec des batteries qui supportent ça, la voiture sera plus lourde, a-t-il estimé. Elle va avoir 30 kg de plus en raison de l’unité de puissance, donc pour descendre de 30 kg, il faut réellement diminuer le poids de 60 kg. Ça semble une cible impossible. »

Un avis partagé par son coéquipier Lance Stroll, qui semble trouver l’avenue des « carburants écoresponsables » plus porteuse que celle des « grosses batteries ». Le Québécois aurait préféré voir une réduction de poids plus importante que ce qui a été annoncé.

« Malheureusement, c’est juste 30 kg, a-t-il dit. Je préférerais 300 kg ! Ce sont des bateaux, maintenant. Des voitures de 600 kg, ce serait vraiment cool. »

L’écart entre les équipes

Est-ce que la nouvelle réglementation permettra réellement de réduire l’écart entre les équipes de pointe et les autres, ou est-ce que, à l’inverse, cet écart sera encore plus grand ? Les opinions divergent.

« Chaque fois que la réglementation a changé, un grand écart s’est creusé, surtout avec les moteurs, a noté Oscar Piastri (McLaren). La dernière fois, c’était en 2014, et ç’a mené à une longue période de domination. »

« Je pense qu’il y a de grosses chances que les équipes soient plus séparées qu’elles ne le sont maintenant. Mais nous verrons bien. »

— Oscar Piastri

Même son de cloche du côté de Sergio Pérez qui, chez Red Bull, est bien placé pour rappeler qu’« il y a toujours la possibilité qu’une équipe réussisse à trouver la bonne formule » avant les autres. « Après ça, c’est très difficile. Ça prend quelques années pour les rattraper », croit-il.

Valtteri Bottas, lui, n’est pas inquiet. « Je pense que le peloton est très serré, que les courses sont intéressantes. Je ne pense pas que c’est un problème. Il devrait y avoir plus d’action. »

La vitesse

Lewis Hamilton a discuté avec des pilotes qui ont testé les modifications sur simulateur, et les échos qu’il a entendus ne semblent pas l’emballer : « Ils ont dit que c’est assez lent, a-t-il noté. Nous devons simplement nous assurer que les voitures soient efficaces, rapides et que ces nouveautés constituent un pas en avant naturel, que la course soit réellement améliorée. »

Stroll abonde : il craint que les changements en matière d’aérodynamique rendent les voitures « plus lentes que les Formule 2 ».

À l’inverse, Bottas semblait presque déjà convaincu. « C’est bien d’avoir du changement. »

« Si ça donne plus de liberté, ça peut changer les tactiques de course. Je ne vois pas de drapeaux rouges. »

— Valtteri Bottas

Daniel Ricciardo (RB) est aussi apparu optimiste, affirmant garder « confiance en la Formule 1 » dans sa volonté de remplacer le système de réduction de la traînée. « Disons qu’il y a suffisamment de personnes intelligentes pour se pencher là-dessus. Si ce n’est pas idéal ou parfait au début, il y a assez de cerveaux pour résoudre le problème. »

Pas de doute là-dessus.

Ce que redoutent les dirigeants

Il n’y a pas que les pilotes qui sont dubitatifs : leurs patrons aussi.

« Je crois que personne ne pourra se conformer au poids », a prédit James Vowles, de Williams, lors du traditionnel point de presse des chefs d’équipe, vendredi.

Après quelques expériences en simulateur, il appert que « les voitures ne sont pas assez rapides dans les virages et sont trop rapides en ligne droite », a rapporté Andrea Stella, de McLaren. Même s’il salue « l’intention et les objectifs » des changements proposés, il s’inquiète de la capacité des écuries de les honorer.

« Si ça fonctionne, la Formule 1 sera en bonne posture, mais il nous faudra du temps pour livrer un produit qui atteigne ces cibles », a-t-il poursuivi.

Mike Krack, d’Aston Martin, a quant à lui noté la grande complexité des futurs systèmes. « Je crois qu’on doit garder en tête le produit qu’on propose aux spectateurs, a-t-il insisté. En 2026, je crains qu’on entende des pilotes ne parler que d’éléments techniques et que le public perde intérêt parce qu’il ne comprend pas tous ces détails. On ne doit pas perdre ça de vue. »

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