Le bonheur est dans le scooter

Cap à l’est

Quoi de mieux qu’un scooter pour découvrir la ville, ses rives et ses mille secrets ? Après avoir arpenté le Sud-Ouest, la Petite (et moyenne) Italie et la Rive-Sud l’an dernier, nos journalistes repartent à l’aventure cet été. Cette semaine, Silvia Galipeau met le cap sur l’est, dans un parcours imaginé par Pierre-Marc Durivage. Récit.

C’est reparti pour une virée sur deux roues ! Quand nos patrons nous ont demandé de récidiver, avec différentes balades en scooter, disons que nous n’avons pas hésité longtemps. Il y a pire comme affectation à l’usine, soyons franche. Nous voilà donc, un petit lundi matin ensoleillé, de nouveau sur notre bécane, les cheveux au vent et le sourire au cœur, pour mieux vous servir, amis lecteurs. Pincez-nous, quelqu’un.

Notre voyage dans la ville et le temps nous amène cette fois vers l’est : à travers Hochelaga-Maisonneuve, jusqu’à l’« Extrême-Orient montréalais », selon les indications fournies par notre inspiré collègue. Pour ne pas être prise au dépourvu, on commence la journée par un petit détour à la station-service, lieu duquel on sort rarement en chantant ces jours-ci. Sauf là. Ô joie : c’est notre premier petit bonheur de la journée. Un plein pour un total de 7,05 $, qui dit mieux ? La journée sera belle ou ne sera pas.

Rue Ontario

Direction ensuite rue Ontario, pour un café aux 3 Patapoufs (3227, rue Ontario Est), devant la magnifique église (et son parvis !) d’Hochelaga. À notre arrivée, la file est déjà longue. De toute évidence, le lieu est couru. On se promet de revenir un jour essayer leur pain maison. Et leurs gâteaux, surtout.

Deuxième bonheur (oui, déjà) : on se stationne ici, et malgré le casse-tête du nettoyage de rue, entre deux voitures, sans vraiment chercher. Ni trop y penser. Un autre luxe en ville par les temps qui courent, et pour n’importe quel conducteur, avouez.

Pas le temps de (trop) flâner (malgré la terrasse invitante), on met ensuite le cap davantage sur l’est, vers le marché Maisonneuve cette fois. Nouveau bonheur (on arrête de compter, promis) : la rue Ontario est fermée par endroits, on le sait. Mais où exactement ? Mystère. Pas de GPS avec nous, on y va au flair. C’est la joie de la Vespa, la liberté incarnée, qui prend tout son sens devant ce premier (et non le dernier) cône orange croisé. Comme il est savoureux de « zigonner » dans les petites rues (Rouen et Adam, nos coups de cœur du jour), ou via les ruelles, pour éviter les bouchons et fermetures à la circulation !

Ex-ville de Maisonneuve

Nous voici dans l’ex-ville de Maisonneuve (fondation en 1883). Plusieurs monuments, style Beaux-Arts, témoignent d’une époque prestigieuse révolue, alors qu’on espérait voir naître dans ce coin industriel une grande bourgeoisie francophone. Savourez l’architecture du marché (1912-1914), où a chanté La Bolduc (le saviez-vous ?), descendez Morgan (aux allures de petits Champs-Élysées, vous ne rêvez pas), sans rater le magnifique bain public (1916), jusqu’au parc, devant le très beau Théâtre Denise-Pelletier (style Beaux-Arts toujours, jadis un cinéma !).

Un secret bien gardé se cache en prime par ici : toujours plus à l’est, et tout au bout de la rue Adam, plongez dans cet autoproclamé « parc nature » insoupçonné, le boisé Vimont, protégé grâce au militantisme actif des citoyens du coin. Un dédale de rails de chemin de fer témoigne de nouveau d’un passé pas si lointain (assurément moins vert).

Du parc Bellerive au Far Est

C’était écrit. On allait rouler à l’est, encore vers l’est. Direction rue Hochelaga cette fois, étonnamment agréable, tout à coup, dans ce coin de la ville, vers Tétraultville. On se croirait sur un petit boulevard urbain, loin de la rue industrielle qu’on connaît. Après un bref arrêt au M café (9079, rue Hochelaga) pour un pique-nique à emporter (essayez leur bol mexicain), on file vers le fleuve, au parc Bellerive.

Autre secret bien gardé : dans ce joli parc, où passe la fameuse Route verte (sacrée plus belle route cyclable au monde par le National Geographic), se cache aussi une plage sauvage. Si la mairesse Valérie Plante a promis l’an dernier de l’aménager (on parlait même d’y construire un Biergarten !), à vue de nez, le projet est loin de se concrétiser. On se doit d’y retourner pour savourer ce point d’eau méconnu (et ô combien bienvenu !).

Ce n’est pas fini, retour sur le scooter, pour un ultime arrêt, au Far Est de notre parcours : au Vieux Moulin de Pointe-aux-Trembles (11 630, rue Notre-Dame Est). Il s’agit ici de l’un des derniers moulins à vent du Québec (et de l’un des plus hauts). Avis aux intéressés, le moulin (1719) fait partie du circuit historique du Vieux Pointe-aux-Trembles (une application téléchargeable sur place permet d’y accéder).

Sur le chemin du retour

C’est le temps du retour. En rentrant vers la ville (par Hochelaga, puis Rouen, nos nouveaux axes de prédilection), le collègue Pierre-Marc a pensé à nous.

On s’arrête d’abord pour un affogato (molle à la vanille sur espresso) au Hocheglacé (2225, avenue Bennett). Puis, enfin, à deux pas de là, un dernier secret à vous dévoiler : la terrasse cachée du Salon de dégustation de l’Espace Public (2287, avenue Letourneux). Ici, et depuis un an seulement, se réunissent les amateurs de bière du quartier, familles et travailleurs confondus, pour des créations originales (des bières sures telles la Terrasse Mangue ou la Creamsicle, à essayer), ou pourquoi pas une bien nommée Kölschlaga (appréciez le jeu de mots), blonde et bien fraîche, en toute intimité. L’art de finir la journée en beauté. Et quelle belle journée ce fut !

Mot de l’auteur du parcours

Contrairement à l’an dernier, avec le circuit concocté sur la Rive-Sud pour Sylvain, je n’envoyais pas Silvia en terrain connu. J’ai donc fait appel à mon réseau de contacts, ma foi fort bien garni, dans l’est de Montréal. Tout ce beau monde s’est empressé de me communiquer plein de suggestions et de trouvailles originales qui témoignent que le bonheur est non seulement à scooter, mais probablement aussi dans l’Est ! Cette fois, c’est donc davantage Silvia qui défriche à ma place, mais la lecture de son périple donne franchement le goût de retourner y jeter un coup d’œil approfondi ! À deux roues, bien sûr !

— Pierre-Marc Durivage, La Presse

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