Critique d’Alicia Moffet au MTELUS

Ravissante performance

Pour le spectacle de lancement de son minialbum Intertwine, Alicia Moffet a misé sur une judicieuse sobriété, laissant sa voix toujours juste et ses habiles musiciens briller. Ce concert au MTELUS, jeudi, a donné le départ à sa toute première tournée en salle, qui la mènera partout au Québec.

C’est comme si elle avait fait ça toute sa vie. C’est un peu le cas d’ailleurs, puisque ses premiers pas dans le milieu de la musique sont arrivés tôt, avec des vidéos YouTube d’abord, à l’adolescence, et des participations à des émissions de chant également. Mais à 24 ans seulement, Alicia Moffet se tient sur scène comme celles qui ont du métier du métier depuis longtemps.

On a senti d’abord l’inévitable nervosité, lorsque l’auteure-compositrice-interprète s’est présentée devant un MTELUS plein à craquer. Elle était émue lorsqu’elle a pris la parole pour la première fois, pour annoncer notamment que des invités se joindraient à elle, parce que pour un lancement, « on ne niaise pas ».

On avait de la peine à circuler dans la salle de la rue Sainte-Catherine, où se trouvaient de nombreuses jeunes femmes, plusieurs jeunes hommes (Moffet a d’ailleurs salué la présence des « chums qui se sont fait forcer ») et quelques influenceurs populaires, anciens candidats d’Occupation double et autres.

L’artiste au disque d’or (pour la chanson Lullaby) leur a offert une prestation aussi bien réfléchie qu’exécutée, mise en scène par Alex Perron et dont la direction musicale était assurée par le talentueux Gabriel Thibault (également au clavier durant le spectacle).

Le talent vocal d’Alicia Moffet est remarquable, elle et son micro suffisent à donner une très bonne prestation. Mais il était flagrant jeudi que les arrangements (signés Gabriel Thibault et Richard Bynon), la direction musicale et la performance des musiciens qui accompagnaient la chanteuse haussaient grandement le niveau.

Côté instrumental, c’était impeccable et percutant.

Pour enrober le tout, une ambiance vaporeuse, sobre et efficace : un peu de fumée, une simple bande de lumière en arrière-scène s’éclairant selon l’humeur, quelques pirouettes sur le plan des éclairages aux moments opportuns. Il ne fallait rien de plus. Alicia Moffet a une belle prestance sur scène, elle captive. Ses morceaux, une pop qui emprunte au R&B et parfois à l’électro, sont convaincants.

Une foule conquise

Elle a chanté la plupart des chansons de son répertoire (tirées de son premier album Billie Ave. et de l’EP Intertwine). La foule connaissait tous les mots. Lorsqu’elle a commencé Body High, en début de spectacle, elle a elle-même été surprise par l’ardeur avec laquelle les spectateurs l’ont accompagnée pour chanter le premier couplet. Entre chaque chanson, Alicia Moffet a pris un moment pour parler à son public, franche et drôle dans ses interventions.

Premier invité de la soirée, Zach Zoya l’a rejointe pour la pièce Addicted. On a ensuite sorti des tabourets pour un « petit vibe cozy », un « feu de camp pas de feu ». Un medley acoustique très bien reçu s’est conclu avec la populaire Strangers. Pendant Hard Feelings, les spectateurs des premières rangées ont tous brandi des feuilles de papier sur lesquelles des cœurs étaient dessinés.

Ryland James, qui assurait la première partie, est monté sur scène pour une reprise en duo de Hold On, de Drake. L’Ontarienne Jamie Fine est arrivée ensuite pour Never Wanted This.

Plus tard, Moffet a présenté un autre medley, cette fois construit avec des chansons qu’elle reprenait sur YouTube à ses tout débuts. « Si vous vous souvenez de ça, vous êtes des vétérans », a-t-elle lancé.

Plus tard, on a eu droit à une chanson en exclusivité, Didn’t Try, inspirée de sa récente séparation.

Pour la chanson Ciel, qui a marqué l’été 2020, FouKi s’est joint à Alicia Moffet pour l’un des temps forts de la soirée.

Le spectacle a aussi été ponctué de quelques moments un peu moins efficaces. Mais une chose est restée constante : l’enthousiasme de la foule. Durant le concert, la chanteuse de 24 ans l’a souvent remerciée. « On ne montre pas tout sur les réseaux sociaux, a-t-elle dit en milieu de spectacle. En ce moment, il y a des choses qui me font chier. Mais ce soir, vous êtes tous là et ça n’a pas de bon sens. […] Merci de vous être déplacés. »

Instagram et TikTok s’en mêlent

C’est sur les réseaux sociaux qu’Alicia Moffet s’est surtout fait connaître et l’auteure-compositrice-interprète aux 430 000 abonnés Instagram a pleinement assumé son appartenance à cet univers.

Il n’était donc pas surprenant de voir une toile aux couleurs de l’EP Intertwine dans l’entrée du MTELUS. Le décor, qui a servi au tapis rouge avant le spectacle, semblait aussi être une invitation ostensible à prendre la pose et à publier le résultat sur ses plateformes sociales.

Personne n’a semblé trop étonné non plus lorsqu’au beau milieu du concert, l’artiste a proposé de filmer une vidéo TikTok. Il était un peu étrange d’attendre en silence qu’Alicia Moffet se munisse de son téléphone, donne ses instructions et mette en place sa mise en scène pour une vidéo reprenant la très populaire Flowers, de Miley Cyrus. Mais la chanteuse connaît ses admirateurs, la plupart de la génération TikTok, et se doutait certainement qu’ils seraient partants.

Alicia Moffet sait ce qu’elle fait et elle le fait bien. Cette maîtrise de son art la mènera sûrement loin.

Alicia Moffet sera en tournée partout au Québec jusqu’à la fin mars.

Consultez le site d’Alicia Moffet (en anglais)

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