Récipiendaire de la Médaille de l'Assemblée nationale

Normand Brathwaite, l’allié des musiciennes

Depuis le début de sa carrière, Normand Brathwaite a toujours fait une place de choix aux musiciennes et pour souligner cet apport, l’équipe de Belle et Bum lui a réservé toute une surprise lors de l’enregistrement de l’émission qui sera diffusée samedi soir. Nous avons assisté à ce segment haut en émotion.

Une Médaille de l’Assemblée nationale remise par la ministre responsable de la Métropole, Chantal Rouleau, pour sa contribution au rayonnement du talent des femmes en musique. Et un band exclusivement féminin formé d’une dizaine de musiciennes et de chanteuses qui ont joué à Belle et Bum depuis 18 ans – de la pianiste et ex-directrice musicale Nadine Turbide à la jeune bassiste Gabrielle Gélinas en passant par la vétérane saxophoniste Marie-Josée Frigon.

C’est ce qui attendait Normand Brathwaite jeudi soir dernier. Un hommage qu’il a reçu avec fierté.

« Ç’a été tellement difficile de vous faire entrer dans la taverne ! », s’est-il exclamé en entrevue avec sa coanimatrice Mélissa Lavergne. « Mais si ça a marché, c’est parce que vous êtes talentueuses. » Ce message, Normand Brathwaite tenait à le transmettre. C’est pour cette raison qu’il a fait de gros efforts pour contenir ses émotions, nous a-t-il confié après l’enregistrement.

« Ça faisait beaucoup à assimiler, mais il ne fallait pas que je pleure parce que quand je commence, je n’arrête plus ! »

— Normand Brathwaite

Il a donc fui le regard des chanteuses et est resté stoïque le plus possible. « J’ai eu beaucoup d’honneurs dans ma carrière, mais s’il y avait un trophée ou une médaille que je voulais, c’est pour ça. C’est la seule chose pour laquelle je veux vraiment qu’on se souvienne de moi. Parce que ça n’a vraiment pas été facile et que j’ai travaillé fort pour ça. »

Taverne ou boys club, toutes les expressions sont bonnes pour décrire la chasse gardée masculine qu’était le monde de la musique à l’époque de Beau et chaud. Il se souvient d’ailleurs de l’hostilité qu’il avait rencontrée lorsqu’il avait engagé la guitariste Kat Dyson et la bassiste Rhonda Smith… qui sont par la suite allées jouer avec Prince !

« Les gars ne voulaient pas jouer avec elles parce qu’ils disaient qu’elles ne savaient pas lire la musique ! Moi, je disais : “Quand je vais au resto, je ne veux pas savoir si le cuisinier a étudié à Paris ou dans un institut culinaire ! Si c’est bon, j’aime ça.” »

En fait, toutes les excuses étaient bonnes, et la résistance venait tant des musiciens que des producteurs. « Ma mère est blanche et mon père est noir, et les mots “ça ne se fait pas”, ça ne me rentre pas dans la tête. Au contraire, ça me motive. Là, on a la parité dans le band, et c’est merveilleux parce que chaque sexe amène à l’autre bien des affaires. Le résultat n’est pas juste musical, il est humain aussi. »

Hommage mérité

La coanimatrice de Belle et Bum, la percussionniste Mélissa Lavergne, était aussi bien émue par cette surprise concoctée pour son ami. « J’avoue que j’ai un peu craqué pendant la répétition, nous a-t-elle raconté par la suite. Parce que ces femmes représentent plusieurs époques de Belle et Bum, de la vie de Normand et de ma vie de musicienne. »

Pour elle comme pour toutes les musiciennes et les chanteuses à qui nous avons parlé, Normand Brathwaite mérite amplement cet honneur. « Il a fallu qu’il combatte, qu’il mette son pied à terre », dit Mélissa Lavergne, qui explique que l’animateur a offert aux musiciennes un magnifique terrain de jeu. « On a pu trébucher, se tromper, se forger une expérience à laquelle on n’avait pas droit. »

Quand elle a vu toutes les générations de femmes réunies sur scène jeudi, la chanteuse Geneviève Jodoin, qui a été choriste de la troisième à la neuvième saison, s’est aussi réjouie de voir que Normand n’avait « jamais lâché ».

« C’est ce qui est beau dans son histoire. Ce n’est pas un buzz qu’il a eu à un moment ; il a toujours tenu son bout. Ç’a l’air normal en ce moment, mais au début, comme quand il a fait rentrer Mélissa dans l’équipe, on voyait que c’était difficile de faire accepter ça. »

— Geneviève Jodoin, ex-choriste de Belle et Bum

Normand Brathwaite donnait aussi souvent un coup de pouce comme entremetteur, rappelle Nadine Turbide, dont la présence jeudi était bien émouvante. « Il voyait et appréciait notre vrai talent et il a toujours cru en nous. En plus, il me recommandait à des gens, à René Simard, à Denise Filiatrault… »

« Normand a eu cette grande qualité de permettre les apprentissages et de sentir le potentiel de talent, ajoute Mélissa Lavergne. Mais il sait que la lumière des autres le met en lumière, que si des gens rayonnent, ça va l’élever, lui aussi. »

Normand Brathwaite est conscient qu’il a fait « quelque chose de spécial ». Et s’il est fier de cette médaille, c’est parce que « ce n’est pas tout le monde qui est au courant ».

« Je ne l’ai pas fait pour ça, mais c’est devenu mon trademark. Ces filles m’ont aidé autant que je les ai aidées et c’est pour ça que, ce soir, je suis vraiment content. »

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