Acquisition des actifs porcins de F. Ménard

Le géant Olymel grossit encore

Acteur de premier plan de l’industrie porcine québécoise, Olymel prend du galon en faisant l’acquisition de F. Ménard, une entreprise spécialisée dans la transformation du porc.

Cette acquisition, qui place Olymel dans une position de quasi-monopole, selon tous les intervenants interrogés, est tout de même perçue comme une bonne nouvelle par les Éleveurs de porcs du Québec. Selon le syndicat, l’entreprise sera encore mieux outillée pour se tailler une place sur le marché international. Rappelons que la Belle Province exporte 70 % de son porc.

La Coop fédérée ainsi que ses divisions Olymel et Sollio Agriculture ont annoncé, hier, la conclusion de cette acquisition dont le prix n’a pas été dévoilé. Celle-ci permet de mettre la main sur tous les actifs porcins de F. Ménard. Les fermes porcines, l’établissement d’abattage, de découpe et de désossage, l’usine de transformation, deux boucheries, deux meuneries ainsi que des installations d’entreposage et de séchage du grain sont inclus dans la transaction, qui faisait l’objet de rumeurs depuis l’automne dernier. L’entente, qui n’implique pas les activités de production de volailles de F. Ménard, a été soumise au Bureau de la concurrence. Elle est donc en attente d’approbation.

« Cette transaction, c’est un pas de plus vers une concentration de l’industrie de la transformation. Olymel devient un très gros joueur au Québec et au Canada. »

— David Duval, président des Éleveurs de porcs du Québec

Devant ce géant, craint-il que les éleveurs perdent leur pouvoir de négociation ? « Il faut savoir que chaque abattoir au Québec paie le même prix pour ses cochons », explique M. Duval. Il souligne que la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec fixe le prix du porc, basé sur le marché américain. Une entreprise ne peut donc pas décider à elle seule de la somme qu’elle est prête à débourser.

Par ailleurs, en prenant de l’expansion, Olymel pourra mieux répondre à la demande internationale, estime David Duval. « C’est une très bonne nouvelle. »

Une position partagée par Pascal Thériault, agronome et économiste à l’Université McGill. Selon lui, ce genre de transaction, « c’est ce qu’on a un peu partout dans le monde ». « Si Olymel veut rester compétitive à l’échelle mondiale, elle n’a pas le choix, analyse-t-il. Olymel est une marque très forte. F. Ménard est un gros producteur. C’est une belle continuité. »

Et au bout de la ligne, cette transaction ne devrait pas avoir d’incidence sur le coût du filet de porc que les consommateurs mettront dans leur panier d’épicerie, estime l’expert.

« F. Ménard est un fleuron de l’industrie agroalimentaire québécoise, et dans le contexte où l’entreprise désirait vendre ses actifs, nous accueillons favorablement qu’elle soit acquise par une entreprise d’ici afin de demeurer au Québec », a pour sa part mentionné Laurence Voyzelle, porte-parole du ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec, André Lamontagne.

Dans le communiqué publié hier par La Coop fédérée, on mentionnait que F. Ménard représentait « plus de 15 % de l’ensemble de la production québécoise ». Du côté d’Olymel, selon des chiffres fournis en 2007 dans un mémoire présenté devant la Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois, l’entreprise mentionnait qu’elle détenait 30 % des parts de marché du porc au Canada et 55 % des parts de marché au Québec. Olymel, qui a fait plusieurs acquisitions depuis, a refusé de nous donner une mise à jour, hier.

Olymel et F. Ménard refusent de commenter la transaction tant que le Bureau de la concurrence ne se sera pas prononcé.

DuBreton

Du côté de l’Union paysanne, ce changement dans le paysage de l’industrie porcine est plutôt vu d’un mauvais œil. 

« Le marché va être de plus en plus contrôlé par quelques joueurs qu’on appelle un cartel. On uniformise la production. Tôt ou tard, ils [Olymel] vont avoir le gros bout du bâton pour négocier. »

— Maxime Laplante, président de l’Union paysanne

« Et Olymel pourrait avoir un impact sur duBreton dans le biologique », ajoute M. Laplante.

À Rivière-du-Loup, l’entreprise de transformation porcine duBreton, qui se spécialise notamment dans les produits biologiques, n’a pas été surprise par la nouvelle annoncée hier matin. « Ça nous donne une raison de plus de continuer dans le biologique », mentionne Julie Lamontagne, conseillère en communications chez duBreton.

Selon elle, l’entreprise, qui compte environ 1000 employés au Québec, a les capacités de faire face à cet acteur devenu plus gros. « Il y aura l’alternative duBreton, souligne Mme Lamontagne. C’est David contre Goliath. C’est l’entreprise familiale contre la multinationale. »

7 millions

Nombre de porcs abattus par an au Québec

Source : Les Éleveurs de porcs du Québec

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