Santé psychologique

Entraîner l’esprit comme le corps

Les recommandations sont unanimes : il faut bouger au quotidien – ou au moins quelques fois par semaine. Mais devrions-nous soigner tout autant notre santé mentale ? La psychologue Sylvie Boucher acquiesce. « On peut faire des exercices pour prévenir, maintenir et augmenter notre santé psychologique, comme on le ferait avec les exercices physiques. »

Les psychologues sont très sollicités et ils ne suffisent malheureusement pas à combler la demande. Bien qu’ils ne remplacent pas l’aide psychologique, des exercices peuvent être faits afin d’acquérir des aptitudes essentielles pour la santé mentale.

Ce sont huit personnes sur dix qui, dans leur vie, vont rentrer dans un « tunnel noir », explique Sonia Lupien, professeure titulaire au département de psychiatrie de l’Université de Montréal et directrice du Centre d’études sur le stress humain. « Les troubles de santé mentale sont communs », dit-elle.

Il est donc d’autant plus important de se bâtir une routine pour soigner notre santé mentale. Sonia Lupien, par exemple, ne rate jamais sa marche quotidienne, où elle « déconstruit et reconstruit ses stresseurs ».

« Je crois que les gens attendent encore la pilule miracle. »

– Sonia Lupien, professeure titulaire au département de psychiatrie de l’Université de Montréal

Or, les bons outils pour prendre soin de sa santé mentale sont encore méconnus, croit-elle. « On sait quoi faire pour muscler une telle partie de notre corps, mais en santé mentale, personne ne sait vraiment quoi faire », indique la chercheuse.

Par où commencer ?

La psychologue Sylvie Boucher indique qu’il existe plusieurs aptitudes à développer. La première : la gestion du stress. Plusieurs exercices peuvent être faits de façon régulière, comme la méditation, le yoga et la respiration profonde. Ce dernier exercice lui plaît particulièrement. « Ça stoppe la réaction au stress », explique-t-elle.

Sonia Lupien propose une autre technique. « Tu vas déconstruire ton stresseur pour donner l’impression à ton cerveau que tu as le contrôle dessus », dit-elle. Elle utilise l’acronyme CINÉ pour nous aider à déterminer ce qui peut nous stresser dans une situation : le contrôle faible, l’imprévisibilité, la nouveauté et l’égo menacé. « Une fois qu’on sait pourquoi ça nous stresse, on va reconstruire le stresseur », explique Sonia Lupien, qui nous propose alors de trouver un plan – qu’on applique ou pas ! – afin que notre cerveau se calme.

Pour notre bien-être, Sylvie Boucher nous invite aussi à développer de l’autocompassion.

« Surtout si on est exigeant et dur envers soi-même, on doit pouvoir changer notre attitude pour qu’elle soit bienveillante. »

– Sylvie Boucher, psychologue

La psychologue montre du doigt une autre compétence à inclure dans notre vie : la gratitude. Il peut suffire de prendre quelques instants avant le coucher pour nommer trois choses au sujet desquelles on est reconnaissant.

« Le cerveau est porté à retenir le négatif, donc c’est bon d’entraîner son cerveau à voir le positif », indique-t-elle.

Un autre exercice à intégrer à notre quotidien : « s’accorder du temps pour soi », dit la psychologue. Trouver un moment pour faire le point sur notre état. « On peut se poser des questions comme ‟Comment je me sens ?” ou ‟Comment a été ma journée ?”.» Si quelque chose accroche, dit-elle, on y porte attention pour « changer la situation ou changer nos perceptions ».

Trouver ses méthodes

Pour sa part, la jeune professionelle dans la vingtaine Catherine Lambert fait du journaling depuis environ trois ans. Quelques fois par semaine, elle se trouve un sujet et elle écrit dans son journal ce qui lui passe par la tête. « Ça aide pour mon anxiété, indique-t-elle. Ça me permet de sortir de ma tête et de mettre les choses par écrit. »

C’est plutôt la méditation transcendantale qui s’est imposée dans le quotidien de James Selfe, qui travaille comme associé dans un cabinet-conseil spécialisé en santé mentale et en mieux-être organisationnel. Le rituel qu’il a instauré depuis des années l’aide dans sa régulation d’émotions. « Quand je ne le fais pas, je me sens plus fébrile et plus impatient avec les autres », dit-il.

Ces deux exercices « visent la pleine conscience », affirme Sylvie Boucher. « On dirige son attention sur ce qui se passe ici et maintenant, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur », illustre la psychologue, qui y voit de bons moyens de maintenir une bonne santé mentale.

Mais attention, ces exercices ne sont pas faits pour tout le monde. « Ce n’est pas parce que ça marche pour votre belle-sœur et pas pour vous que vous êtes un échec, évoque Sonia Lupien. Chacun peut trouver sa méthode. »

On devrait même se trouver plusieurs techniques, ajoute la chercheuse. « Mettez plusieurs affaires dans votre boîte à outils, notre cerveau n’aime pas la redondance, dit-elle. Et ce n’est pas grave si ça fonctionne un jour, mais pas le lendemain. »

Les expertes s’accordent sur le fait qu’il faut s’écouter et ne pas aller dans l’excès. « Suis ton intuition, ton cerveau sait ce dont il a besoin », affirme Sonia Lupien. La psychologue Sylvie Boucher invite à garder un équilibre dans tout ça : « trop, c’est comme pas assez », croit-elle.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.