Service de garde en milieu scolaire

L’heure de la reconnaissance se fait attendre

La Semaine québécoise de la garde scolaire doit nous donner l’occasion, comme collectivité, de souligner la qualité du travail et le dévouement quotidien de près de 22 000 éducatrices et techniciennes. Celles-ci apportent, comme nous l’a révélé la pandémie, un soutien constant à la conciliation travail-famille et, surtout, nourrissent le développement global de nos enfants en leur permettant de grandir dans un environnement sécuritaire et stimulant.

Mais même « essentiel », ce service continue de faire les frais d’un manque de compréhension et de reconnaissance au sein du réseau de l’éducation. Plusieurs centaines de milliers d’enfants utilisent les services de garde de nos écoles primaires. Ils ne méritent pas un tel désintérêt collectif, à un âge où leur développement est si crucial.

Déjà, en 1996, le Conseil supérieur de l’éducation (CSE) tirait la sonnette d’alarme : l’enfant ne semblait plus autant primer au cœur des priorités, les services de garde étant offerts, au sein de nos écoles primaires, bien plus pour « dépanner » les parents que pour assurer l’épanouissement pédagogique de ces enfants. Pourtant, ceux-ci peuvent passer quatre heures par jour dans les services de garde, 200 jours par année. Puis, en 2001, ce fut le tour du Vérificateur général du Québec, qui mit au jour le manque de données importantes sur la gestion et le financement des services de garde. Le CSE récidivait en 2006 par le dépôt d’un rapport complet sur les services de garde en milieu scolaire, lequel mena à la création d’un comité national rassemblant l’ensemble des intervenantes et intervenants du milieu… dont les recommandations n’ont pourtant pas été prises en compte par le Ministère.

Cela dit, ces travaux ont permis de mettre en lumière le fait que le ministère de l’Éducation, en plus d’avoir peu de données lui permettant de savoir si ces services sont financés adéquatement, laisse la possibilité aux directions d’école de piger dans les budgets des services pour payer des dépenses qui n’y sont aucunement reliées. Des budgets, rappelons-le, constitués en bonne partie des contributions financières des parents.

En déposant, le mois dernier, un projet de règlement visant à améliorer les services de garde en milieu scolaire, le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, est passé à côté d’une extraordinaire occasion de renforcer ces services primordiaux pour la société québécoise.

Cette proposition de règlement passe tristement à côté d’une réflexion de fond sur le rôle des services de garde dans les milieux scolaires, ainsi que sur les moyens à leur octroyer.

Ainsi, il est étonnant qu’on n’y retrouve aucune mesure concernant les ratios d’enfants placés sous la responsabilité des éducatrices et éducateurs ni aucune attention particulière aux impacts occasionnés par l’intégration des maternelles 4 ans, soumises aux mêmes ratios de 20 élèves pour une éducatrice – il est de 10 dans un CPE, pour le même âge.

Il est tout aussi désolant de constater que le projet de règlement ne propose aucune mesure appropriée en ce qui a trait à l’encadrement des enfants en situation de handicap ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage. Devant la nécessité de définir de réels objectifs éducatifs pour les services de garde en milieu scolaire, le projet de règlement du ministre Roberge demeure malheureusement muet.

Il est grand temps que le ministère de l’Éducation fasse preuve de leadership pour organiser une réelle réflexion collective sur les services de garde en milieu scolaire dont nous voulons nous doter. Dans un tel cas, le personnel des services de garde sera au rendez-vous pour trouver des pistes d’action qui permettront de mieux répondre aux besoins des enfants et des parents du Québec. Souhaitons que la volonté politique y soit également.

* Cosignataires : Denis Bolduc, secrétaire général de la FTQ ; Linda Tavolaro, secrétaire générale de la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP – CSN) ; Éric Pronovost, président de la Fédération du personnel de soutien scolaire (FPSS – CSQ) ; Patrick Gloutney, président du Syndicat canadien de la fonction publique du Québec (SCFP Québec) ; Pierrick Choinière-Lapointe, directeur exécutif du Syndicat des employées et employés professionnels-les et de bureau (SEPB – Québec) ; Cristina Cabral, présidente de l’Union des employés(es) de service local 800 (UES 800)

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