covid-19 Vaccination

Le point sur la campagne de vaccination au pays

Campagne de vaccination

Du renfort pour les provinces si nécessaire

Ottawa — Le gouvernement Trudeau est prêt à mobiliser des membres des Forces armées canadiennes et des employés de la Croix-Rouge au besoin au cours des prochaines semaines afin de soutenir les provinces dans leurs efforts pour vacciner plus rapidement les populations vulnérables.

Alors que les frictions se multiplient entre Ottawa et les provinces depuis quelques semaines – l’intention du gouvernement Trudeau d’établir des normes nationales pour les centres de soins de longue durée et le refus du premier ministre d’augmenter les transferts en santé font partie de la liste des griefs des provinces –, Ottawa souhaite éviter que le lent début de la campagne de vaccination devienne une pomme de discorde qui empoisonne davantage les relations fédérales-provinciales.

M. Trudeau a abordé cet épineux dossier jeudi soir lors d’une conférence téléphonique avec ses homologues provinciaux. D’entrée de jeu, il a rappelé l’importance de travailler « en équipe » afin de venir à bout de la pandémie, reconnaissant au passage que les propos qu’il a tenus cette semaine au sujet de la lenteur des provinces à vacciner la population n’avaient pas été « utiles ».

En coulisses, on maintient que le premier ministre ne veut pas faire de reproches à ses homologues des provinces dans ce dossier, mais qu’il veut bien comprendre pourquoi des milliers de doses de vaccins n’ont pas encore été administrées.

« Les chiffres sont têtus. Ils ne mentent pas. Nous avons remis aux provinces 424 000 doses des vaccins. Mais seulement 50 % de ces doses se sont retrouvées dans les bras des Canadiens jusqu’ici. On veut comprendre pourquoi, et voir ce qu’on peut faire pour augmenter la cadence », a indiqué une source fédérale qui a exigé l’anonymat afin de parler plus librement de ce dossier.

Même si aucune province n’a formellement demandé de renfort jusqu’ici, M. Trudeau entend multiplier les signaux selon lesquels il peut déployer des soldats ou des membres de la Croix-Rouge si cela s’avère nécessaire dans certaines provinces.

« Les livraisons vont s’accélérer au cours des prochaines semaines. Nous sommes prêts à mettre l’épaule à la roue pour vacciner les Canadiens plus rapidement », a-t-on fait valoir.

Faire le point

La conférence des premiers ministres – la 23e convoquée par M. Trudeau depuis le début de la pandémie, mais la première en 2021 – visait à faire le point sur la campagne de vaccination au moment où la deuxième vague continue de prendre de l’ampleur et alors que les réseaux de santé sont surchargés en raison de la forte hausse des cas quotidiens rapportés dans toutes les provinces.

À ce sujet, M. Trudeau a réitéré qu’Ottawa est prêt à fournir davantage de tests de dépistage et à soutenir les provinces qui doivent imposer un confinement plus strict pour aplatir la courbe de contamination.

Si du côté d’Ottawa on tente de calmer le jeu, cela n’a pas empêché le lieutenant politique de Justin Trudeau, Pablo Rodriguez, de répliquer aux critiques du premier ministre du Québec. Durant une conférence de presse, mercredi, alors qu’il annonçait un resserrement des mesures de confinement, François Legault a affirmé que si la campagne de vaccination battait de l’aile, c’était parce qu’Ottawa tardait à livrer de nouvelles doses aux provinces.

« Près de 50 000 doses de vaccin dorment dans des congélateurs au Québec. C’est plus de la moitié des doses livrées. Les livraisons s’accélèrent. On doit accélérer la cadence », a réagi sur son compte Twitter M. Rodriguez, qui est aussi le leader du gouvernement en Chambre.

Le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, Christian Dubé, n’a pas tardé à répliquer à son tour. « Les doses ne dorment pas. Elles sont déployées et seront toutes utilisées. Vous pouvez nous en envoyer le triple. On va toutes les utiliser très rapidement », a-t-il écrit, également sur son compte Twitter.

Il faut dire que Justin Trudeau a en quelque sorte lui-même lancé la première salve plus tôt cette semaine quand il a dit partager la « frustration » des Canadiens d’apprendre que de nombreuses doses se trouvent toujours dans les congélateurs.

Augmentation de la cadence

En date du 6 janvier, les provinces avaient augmenté la cadence, puisque environ 45 % des doses avaient été injectées.

Au Québec, le 6 janvier, on calculait avoir utilisé 38 984 doses sur les quelque 87 500 doses reçues. Le ministère de la Santé et des Services sociaux a indiqué que cela s’expliquait par le récent changement de stratégie du gouvernement du Québec.

« Jusqu’à très récemment, étant donné l’incertitude concernant les prochaines livraisons de vaccins à venir, nous conservions au congélateur la moitié des doses, pour assurer l’administration de la deuxième dose aux personnes vaccinées. »

— Marie-Claude Lacasse, porte-parole du ministère de la Santé et des Services sociaux, dans un courriel à La Presse Canadienne

Québec a décidé, le 31 décembre, d’administrer toutes les doses reçues afin de vacciner un maximum de personnes. « Ainsi, dans les derniers jours, la vaccination a beaucoup accéléré », a déclaré Mme Lacasse.

Mercredi, le ministre Christian Dubé a réaffirmé que la province était en mesure d’administrer 250 000 doses par semaine. Du côté de l’Ontario, on prétend aussi qu’il manquera bientôt des doses de vaccins. La province a déjà administré près de la moitié des doses reçues. « Au rythme actuel, nous aurons épuisé les doses initiales des vaccins Pfizer à la fin de la semaine. […] On s’attend à épuiser l’envoi de vaccins Pfizer de cette semaine à la fin de la semaine prochaine », a soutenu Ivana Yelich, porte-parole du premier ministre Doug Ford.

— Avec La Presse Canadienne

CHSLD de Sainte-Dorothée

« C’est la fin d’un combat pour nous »

Soulagement et fébrilité dans l’un des pires lieux d’éclosion de COVID-19 au Québec au printemps dernier. Au CHSLD de Sainte-Dorothée à Laval, 160 des 179 résidants seront vaccinés d’ici vendredi soir. On assure que tout se fait dans les temps, mais l’opération demande minutie et organisation.

Nadine Assekar, conseillère en soins infirmiers au CHSLD de Sainte-Dorothée, ne s’attendait pas à un enthousiasme aussi vibrant quand elle s’est présentée devant les résidants de l’endroit fiole à la main. Les visages se sont illuminés, les manches se sont retroussées et on trépignait d’impatience. Les occupants aux contacts sociaux restreints – ils ne peuvent sortir de l’immeuble ni se promener d’un étage à l’autre – ont enfin l’impression que la bataille menée depuis mars tire à sa fin.

« Ils voulaient tous être dans les premiers à recevoir le vaccin. Ils vivent le pire de cette pandémie. »

— Nadine Assekar, conseillère en soins infirmiers au CHSLD de Sainte-Dorothée à Laval

Lise Campeau, 86 ans, a été la première résidante de l’établissement vaccinée jeudi matin. La première vague de COVID-19 a frappé l’endroit comme un tsunami : 101 résidants ont succombé au virus depuis le début de cette pandémie.

En tout, 160 des 179 résidants de l’établissement seront vaccinés en deux jours.

Au total, huit infirmières s’occupent d’administrer la première dose aux résidants. Pour limiter les déplacements des employés, on demande à l’infirmière d’administrer le vaccin à son étage.

La majorité du personnel de soins est déjà vaccinée. « Je ne le suis pas encore, mais bientôt », explique Nadine Assekar, qui a administré le vaccin à plusieurs résidants jeudi matin.

un travail en amont

Le 23 décembre dernier, la région lavalloise a reçu 3000 vaccins de Pfizer-BioNTech. Les employés désirant recevoir le vaccin pouvaient alors prendre rendez-vous à l’hôpital de la Cité-de-la-Santé.

On préconise le vaccin du fabricant Moderna – plus facile à déplacer et à manipuler que celui de Pfizer – pour la clientèle des CHSLD.

Une campagne de vaccination massive ne s’organise pas en un rien de temps, explique Julie Rodrigue, coordonnatrice de site au CHSLD de Sainte-Dorothée.

Le travail de logistique se fait avant la réception des doses. On l’a prévenue lundi que le CHSLD de Sainte-Dorothée allait recevoir ses doses du vaccin de Moderna jeudi matin. Les doses ont d’abord été livrées à l’hôpital de la Cité-de-la-Santé.

Il faut obtenir le consentement des familles ou des résidants. Cette étape préférable à l’administration du vaccin a duré deux jours.

On s’assure aussi d’avoir le matériel adéquat pour administrer les vaccins, d’avoir de l’adrénaline à portée de main en cas de réaction allergique. La cargaison de vaccins est arrivée jeudi à 8 h. Après une heure et demie de décongélation, les doses sont prêtes à être administrées. « Le travail se poursuit après l’administration de la dose. On doit saisir la journée même chacune des doses utilisées dans le dossier des résidants. Je vais sûrement partir vers 22 h. On attend aussi d’autres réponses de familles », ajoute Mme Rodrigue.

Depuis le début de l’opération, 2315 doses de vaccin ont été administrées à Laval, indiquent les plus récentes données. Quant aux doses livrées sur le territoire lavallois, on recommande au CISSS de ne pas en dévoiler le nombre, selon nos informations.

« Ça n’aurait pas pu aller plus vite que ça ici », insiste la coordonnatrice, elle-même vaccinée depuis le 23 décembre. « C’était vraiment mon cadeau de Noël. J’étais dans les premières. C’est un soulagement de te dire que tu as cette protection et que ton entourage est protégé », dit-elle, souriante.

« C’est la fin d’un combat pour nous. »

Étape par étape

23 décembre : réception des doses du vaccin de Pfizer destinées aux travailleurs de la santé et employés des CHSLD et RPA

24 décembre : réception du vaccin de Moderna au Canada

31 décembre : réception du vaccin de Moderna au Québec

4 janvier : le CHSLD de Sainte-Dorothée apprend qu’il va recevoir ses premières doses du vaccin de Moderna.

4 et 5 janvier : on obtient l’accord des résidants ou de leur famille pour l’administration du vaccin.

6 janvier : le vaccin arrive à l’hôpital de la Cité-de-la-Santé à Laval.

7 janvier : 110 doses de vaccins arrivent au CHSLD de Sainte-Dorothée.

8 janvier : 50 doses sont attendues au CHSLD de Sainte-Dorothée pour vacciner le reste des résidants dont on a le consentement.

en Trois questions

Qui sont les premiers groupes ciblés pour recevoir le vaccin ?

Le ministère de la Santé et des Services sociaux a identifié six groupes prioritaires, représentant 1,7 million de personnes en tout, qui pourraient recevoir une première dose de vaccin d’ici la fin mars. Essentiellement, il s’agit des Québécois âgés de plus de 70 ans, qu’ils vivent en résidence ou pas. En date du lundi 4 janvier, 6,4 % des résidants de CHSLD, 8,5 % du personnel soignant et 181 personnes proches aidantes âgées de plus de 70 ans avaient reçu le vaccin.

Qui reçoit le vaccin en ce moment ?

Selon le tableau diffusé lundi par le Ministère, la vaccination est actuellement accessible pour les personnes qui se trouvent dans trois des quatre premiers groupes prioritaires, soit les résidants des CHSLD (groupe 1), le personnel soignant (groupe 2) et les communautés isolées ou éloignées (groupe 4). Les personnes qui habitent en résidence privée pour aînés (groupe 3) devraient commencer à être vaccinées à partir de la semaine du 25 janvier. Suivront toutes les autres personnes âgées de 80 ans et plus (semaine du 15 février), puis celles âgées de 70 ans et plus (semaine du 15 mars). Évidemment, le calendrier sera ajusté en fonction de la livraison des doses de vaccin.

Si on n’habite pas en CHSLD ou en RPA, faut-il s’inscrire pour recevoir le vaccin ?

Pas pour le moment. Comme la vaccination se déroule actuellement dans les établissements de santé, ce sont les directions régionales (CISSS et CIUSSS) qui organisent la vaccination « selon la liste des priorités et surtout selon les doses que le Québec obtient », nous a indiqué le Ministère par courriel. « Puisque les priorités concernent des personnes résidant en installation et des travailleurs de la santé, les établissements de santé contactent ces personnes directement », ajoute le Ministère. Pour les personnes qui ne vivent pas dans ces établissements, « il n’est pas possible de prendre rendez-vous pour le vaccin, actuellement, ni de se mettre sur aucune liste d’attente ». « Quand le Québec recevra suffisamment de doses pour passer aux autres groupes à vacciner, ce sont les établissements de santé qui seront [chargés] d’organiser la vaccination de la population sur leur territoire et les détails seront communiqués à ce moment », précise le Ministère.

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