Xi Jinping voudra stabiliser la relation bilatérale
Joe Biden et Xi Jinping sont arrivés mardi à San Francisco, en Californie, à la veille d’une rencontre extrêmement attendue, destinée à éviter que la relation très tendue entre leurs deux pays ne se dégrade encore.
Les présidents américain et chinois doivent avoir ce mercredi un long entretien, dont l’objectif premier est d’assurer que la rivalité entre les deux superpuissances reste sous contrôle.
La dernière fois que Xi Jinping s’était rendu aux États-Unis, c’était il y a six ans pour rencontrer un Donald Trump enthousiaste qui lui avait promis « une très, très grande relation » bilatérale.
C’est le contraire qui s’est produit depuis : les relations sont devenues glaciales et le président chinois va désormais chercher à les stabiliser lors de sa rencontre cette semaine avec son homologue américain.
Malgré les tensions autour de Taïwan, du commerce ou de la mer de Chine méridionale, les deux dirigeants se verront en marge d’un sommet de la Coopération économique pour l’Asie-Pacifique (APEC) – leur premier entretien depuis un an.
En froid depuis le ballon
Après une prometteuse rencontre Xi-Biden en novembre 2022 en Indonésie, les relations avaient déraillé après que les États-Unis eurent abattu en début d’année un ballon chinois accusé par Washington d’être un aéronef espion.
Le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, avait alors reporté sa visite en Chine.
Depuis, les visites diplomatiques, dont celle de M. Blinken, se sont multipliées de part et d’autre. Un signe de la volonté des deux parties de se rabibocher.
« Nous n’essayons pas de nous découpler de la Chine », a assuré mardi Joe Biden, pour qui l’objectif est d’« être capables de prendre le téléphone et de se parler s’il y a une crise ».
« Nous nous opposons à une définition des relations sino-américaines en termes de concurrence », a même dit une porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois.
« Je pense que personne ne fonde de grands espoirs sur cette rencontre en termes de résultats concrets », nuance toutefois Joseph Liow, de l’Université de technologie de Nanyang à Singapour.
« Cette réunion est surtout importante car elle symbolise la volonté des dirigeants d’établir des relations plus stables. »
Les conflits Russie-Ukraine et Israël-Hamas pourraient être au menu des discussions.
Fermeté sur Taïwan
« La Chine attache une grande importance à tout ce qui va dans le sens d’une stabilisation des relations sino-américaines », indique Chen Dingding, président du groupe de réflexion Intellisia Institute, établi à Canton.
D’un point de vue tactique, pour Pékin, « l’essentiel est aujourd’hui de rechercher des points de coopération », ajoute Lyu Xiang, expert en relations sino-américaines à l’Académie chinoise des sciences sociales.
Xi Jinping est aux prises en Chine avec une économie affaiblie, mais aussi avec « l’impression d’élites chinoises que la relation diplomatique la plus importante » pour Pékin est « mal gérée », écrit dans une note Alicia Garcia Herrero, économiste à la banque Natixis.
« [Pour Xi Jinping], sa capacité à projeter une image de force et d’un homme qui garde les relations bilatérales sous contrôle [sera] politiquement utile. »
— Amanda Hsiao, spécialiste de la Chine au groupe de réflexion International Crisis Group
Des questions épineuses pourraient toutefois entraver l’apaisement des tensions.
La Chine a souligné qu’elle ne fera aucune concession sur les sujets cruciaux pour elle, notamment Taïwan, une île qu’elle considère comme une province qu’elle n’a pas encore réussi à reconquérir depuis la fin de la guerre civile chinoise en 1949.
« Scandaleux »
Washington et Pékin ont toutefois progressé ces derniers mois en matière de commerce et de lutte contre les changements climatiques.
La semaine dernière, l’émissaire américain sur le climat, John Kerry, a reçu son homologue chinois Xie Zhenhua, tandis que la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a rencontré son équivalent chinois, le vice-premier ministre He Lifeng.
Durant sa visite, Xi Jinping doit dîner avec des chefs d’entreprise américains. Le président chinois devrait par ailleurs plaider auprès de Joe Biden en faveur d’un assouplissement des sanctions commerciales imposées par les États-Unis.
« Les barrières douanières, les restrictions sur les exportations de technologies, l’inscription d’entreprises chinoises sur la liste noire et les restrictions sur les produits énergétiques verts chinois sont scandaleuses et inacceptables », affirme Lyu Xiang, de l’Académie chinoise des sciences sociales.
« Les États-Unis doivent proposer des mesures concrètes pour améliorer la situation. »
Xi Jinping et Joe Biden pourraient par ailleurs annoncer la reprise du dialogue militaire direct après un an de suspension, ce qui serait une « avancée très importante » selon Amanda Hsiao, de l’International Crisis Group.
Prudence toutefois, selon Chen Dingding de l’Intellisia Institute, quant aux récents signes d’ouverture de Joe Biden envers la Chine : il pourrait adopter une ligne plus dure à l’approche de l’élection présidentielle s’il se retrouve face à son prédécesseur Donald Trump.