Soins de santé aux enfants

Une crise historique qui doit être réglée

L’accès aux soins de santé pédiatriques au Québec et au Canada est en crise.

Partout, les hôpitaux pédiatriques sont aux prises avec des volumes sans précédent d’enfants qui se présentent à leurs urgences. Leur nombre élevé coïncide avec d’importantes pénuries de professionnels de soins pédiatriques spécialisés.

Cette situation est attribuable à une convergence de facteurs, dont la pandémie de COVID-19 et la résurgence de virus respiratoires tels que l’influenza et le VRS (virus respiratoire syncytial). Les besoins actuels dépassent les ressources historiquement allouées. Les enfants attendent maintenant plus longtemps que les adultes pour de nombreux soins essentiels. Et le Canada occupe désormais le 30e rang (sur 38 pays riches) au classement du bulletin de l’UNICEF sur le bien-être des enfants et des jeunes.

Des actions concrètes devront être prises afin de renverser cette tendance.

Les salles d’urgence, les unités générales et les unités de soins intensifs pédiatriques de notre province fonctionnent à des niveaux jamais atteints dans leur histoire.

Il n’y a pas assez de lits ou de personnel pour fournir les soins nécessaires. C’est inacceptable et des solutions doivent être mises en place immédiatement.

Face à cette demande sans précédent, des décisions impossibles doivent être prises. Quel enfant recevra des soins ? Lequel attendra ? Dans nos hôpitaux débordés, des opérations sont annulées faute de lits et de personnel et ces annulations peuvent se répercuter à long terme sur la vie des enfants. Les coûts humains et financiers, directs et indirects, du report de soins essentiels pour les enfants sont énormes.

Avec l’hiver qui approche, les hôpitaux pédiatriques se préparent encore à une augmentation des besoins qui ne tariront pas avec l’arrivée du printemps, d’où l’importance d’établir un plan complet et durable mobilisant tous les acteurs impliqués dans les soins aux enfants.

À mesure que notre population vieillit, la demande de soins de santé s’accroît et les effectifs diminuent. Dans cette équation, n’oublions pas les enfants.

Pendant les premiers mois de la pandémie, les soins pédiatriques dans les hôpitaux communautaires et régionaux ont été réduits dans le but d’accroître les services destinés aux adultes. Bien que cela ait pu sembler logique, il en a résulté une diminution soutenue de la capacité de fournir des soins pédiatriques qui a contribué à la situation actuelle. Cette tendance doit être renversée.

Nous reconnaissons l’aide financière fournie par les gouvernements pendant la pandémie et nous saluons la création récente d’une cellule de crise pour s’attaquer aux besoins urgents dans nos hôpitaux. Mais l’érosion continue de l’accès à des soins de qualité pour les enfants demeure une menace importante. Nous avons actuellement besoin d’établir une stratégie intersectorielle intégrée pour obtenir de meilleurs résultats en matière de santé et de bien-être pour nos enfants et nos jeunes.

L’idée d’élaborer une stratégie globale sur la santé des enfants n’est pas nouvelle, mais elle a gagné en popularité en raison de la crise actuelle. L’an dernier, plus de 1500 intervenants se sont réunis dans le cadre de l’initiative pancanadienne Assurer un avenir en santé, assoyant les assises d’un cadre consensuel à considérer pour la mise en œuvre de tout plan à venir. Ce cadre définit cinq priorités reliées entre elles pour améliorer la santé et le bien-être des enfants : des recherches et des connaissances efficaces, des politiques et des structures axées sur l’enfant, des écoles et des collectivités qui jouent le rôle de carrefours de la santé et du bien-être, des systèmes de santé accessibles et souples, et des collectivités mobilisées autour des enfants, des jeunes et des familles⁠1.

Nous nous trouvons aujourd’hui à un point critique. Nous devons trouver des moyens de résoudre la crise et de planifier notre avenir collectif. Il faut élaborer un plan d’action rassembleur pour s’attaquer de façon stratégique et efficace aux facteurs de stress qui agissent sur le système de santé, afin d’assurer un équilibre équitable entre les besoins du nombre relativement petit d’enfants et ceux de l’importante population adulte vieillissante. Un avenir sain dépend de la capacité des jeunes de devenir des adultes productifs et en santé.

Pour le bien de nos enfants, les autorités fédérales et provinciales, avec leurs champs de compétence respectifs, doivent travailler pour faire de la santé et du bien-être des enfants la priorité.

Les habitants du Québec, et tous les Canadiens et Canadiennes rêvent d’un avenir plus sain pour leurs enfants. Si nous voulons réellement que ce rêve se réalise, c’est maintenant qu’il faut agir.

* Cosignataires : DPatrick Daigneault, directeur du département universitaire de pédiatrie de l’Université Laval, CHU de Québec ; DMarc-André Dugas, chef du département de pédiatrie, Centre mère-enfant Soleil du CHU de Québec-Université Laval ; Dre Bethany Foster, directrice, département de pédiatrie, Université McGill et pédiatre en chef, Hôpital de Montréal pour enfants du Centre universitaire de santé McGill ; DJean Sébastien Tremblay Roy, directeur du département de pédiatrie, Université de Sherbrooke et chef du département de pédiatrie, CIUSSS de l’Estrie-CHUS. Par ailleurs, Dre Anne Monique Nuyt est également directrice du département de pédiatrie, Université de Montréal et cheffe du département de pédiatrie, CHU Sainte-Justine

1. Consultez le rapport Assurer un avenir en santé

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