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Ces randonneurs qui aiment trop les montagnes

Les Adirondacks, dans l’État de New York, sont victimes de leur grande beauté. Il y a maintenant une telle affluence sur les sentiers de randonnée et les sommets les plus populaires que les autorités locales jonglent avec l’idée d’en limiter l’accès et d’imposer des droits d’entrée.

« Il est important que les visiteurs, incluant ceux du Canada, réalisent que le libre accès aux High Peaks tire peut-être à sa fin, lance Neil Woodworth, directeur exécutif de l’Adirondack Mountain Club (ADK). Le nombre de visiteurs est tel que ça ne peut pas continuer comme ça. Il faut faire quelque chose. »

Déjà, des résidants, au bout de leur rouleau, ont fermé un sentier populaire qui passait sur des terrains privés. Pour l’instant, cette fermeture ne s’applique que les fins de semaine, mais elle deviendra permanente en septembre prochain.

« Le sentier qui mène au sommet d’Owl’s Head est fréquenté par des familles avec de jeunes enfants. C’est une courte randonnée avec une vue extraordinaire. »

— Joe-Pete Wilson, superviseur du village de Keene

Toutefois, les voitures stationnées sur la petite route d’accès lors de la longue fin de semaine du mois de mai (Memorial Day) étaient tellement nombreuses qu’elles bloquaient l’accès des résidants. En outre, le sentier est tellement surutilisé qu’il est sérieusement érodé.

« Owl’s Head est un microcosme de ce qui se passe dans toute la région, affirme M. Wilson. Il y a des problèmes d’engorgement aux points de départ des sentiers populaires comme Cascade, Giant, ou au stationnement d’Adirondak Loj. Il n’y a pas assez d’espaces de stationnement, pas assez de toilettes, pas assez d’argent pour entretenir les sentiers. »

Boom de fréquentation

Le nombre de randonneurs sur les sentiers des Adirondacks augmente de façon constante depuis une dizaine d’années.

« Mais au cours des deux dernières années, l’augmentation a été énorme », soutient M. Wilson.

Durant la fin de semaine de la fête du Travail, en septembre 2016, pas moins de 1600 personnes ont foulé le sommet du mont Cascade en une seule journée, ce qui est très élevé. « Ça détruit l’expérience qu’on devrait avoir au sommet », affirme M. Woodworth, de l’ADK.

Selon lui, une grande campagne de publicité de l’État de New York visant à mousser le tourisme dans la région de Lake Placid explique en partie cette augmentation.

« On n’a plus besoin de ce genre de publicité. Il serait préférable d’utiliser ces sommes d’argent pour mieux gérer les sentiers et les sommets. »

— Neil Woodworth, directeur exécutif de l’Adirondack Mountain Club

Le directeur exécutif d’ADK mentionne également l’impact des médias sociaux, notamment auprès des milléniaux.

« L’un raconte qu’il a grimpé cinq sommets, il met l’autre au défi d’en grimper six, ils organisent ensemble une sortie pour en grimper sept. Ce genre d’activité sur les médias sociaux se traduit par une augmentation du nombre et de la taille des groupes sur les sentiers. »

M. Woodworth indique qu’au sein de cette nouvelle génération de randonneurs, plusieurs ne connaissent pas les règles de protection de l’environnement. Plusieurs sont mal préparés et n’apportent pas l’équipement nécessaire, comme une carte, des vêtements appropriés et une lampe frontale.

« Ils utilisent leur téléphone cellulaire pour être secourus, souvent parce qu’ils se sont attaqués à une randonnée trop difficile pour eux, souvent parce qu’ils se sont fait surprendre par l’obscurité. Il y a pratiquement une opération de recherche et sauvetage dans l’État de New York par jour. On ne peut pas soutenir ce rythme. »

Des pistes de solution

Les discussions ne font que commencer avec le département de la conservation environnementale de l’État de New York (NYDEC) mais déjà, on discute de divers scénarios pour réduire la pression.

Pour faciliter le stationnement, les randonneurs pourraient se garer dans de grands terrains et accéder aux points de départ des sentiers en empruntant une navette.

« Ça pourrait permettre de contrôler le nombre de personnes pour les sentiers populaires », indique M. Woodworth.

Des rangers pourraient aussi être postés au départ des sentiers surutilisés, comme celui qui mène au mont Marcy, le plus haut sommet des Adirondacks, afin de refouler les randonneurs une fois un nombre maximum atteint.

Il pourrait également être question d’établir un système de permis payants pour les sentiers les plus utilisés : il y aurait un nombre maximum de permis par jour, possiblement attribués au hasard des demandes reçues.

Il pourrait donc être judicieux pour les randonneurs de choisir dès le départ un sentier moins populaire qui ne serait pas assujetti à un permis ou un droit d’accès. « Nous ne faisons que commencer à regarder différentes solutions », indique M. Woodworth.

Pour un nouveau stationnement

Pour l’instant, le NYDEC se penche sur le cas précis du sentier d’Owl’s Head. Le département songe à établir un nouveau sentier à partir d’une autre communauté.

« Ça ne ferait que déplacer le problème », déplore le superviseur Wilson, qui préconise l’établissement d’un nouveau stationnement à proximité du point de départ du sentier actuel.

Paradoxalement, il estime que la fermeture du sentier d’Owl’s Head est une bonne chose.

« Ça met de la pression sur l’État de New York, explique-t-il. Ça le force à réaliser qu’il y a un problème dans la région des High Peaks des Adirondacks. »

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