Lieux publics fermés

Le masque obligatoire, mode d’emploi

Dès samedi, les Québécois devront porter le masque lorsqu’ils seront dans des lieux publics fermés, a annoncé lundi le premier ministre, François Legault. La province n’est pas à l’abri d’un reconfinement en cas de deuxième vague de COVID-19 et, pour éviter de tout refermer, il faut comprendre que « porter un masque, c’est ça, la liberté ». Comment sera appliquée cette nouvelle mesure ? Explications.

Agir avant les vacances de la construction

L’augmentation importante du nombre de cas dans la province et la transmission communautaire qui est observée a poussé le gouvernement à rendre le port du masque obligatoire, a expliqué le premier ministre en point de presse à Montréal. Les vacances de la construction, qui débutent la fin de semaine prochaine, n’y sont pas étrangères non plus. « Il va y avoir beaucoup de déplacements entre les régions, ça va être une espèce de grosse soupe où les Québécois vont se promener », a décrit François Legault. Il s’est défendu d’avoir été soumis à la pression de certaines villes, dont Montréal, qui ont devancé Québec pour cette annonce. « On n’a jamais exclu de mettre le masque obligatoire partout au Québec », a déclaré M. Legault.

masqués à la pharmacie, à l’épicerie...

Qu’est-ce qu’un « lieu public fermé » ? « C’est tous les endroits où, comme public, on va croiser des personnes et il y a des risques d’être à moins de deux mètres », a expliqué le directeur national de santé publique, le Dr Horacio Arruda. À la pharmacie, dans une salle de spectacle, à l’épicerie, dans les corridors des cégeps et des universités : toutes les personnes de 12 ans et plus devront désormais être masquées. Il faudra s’y habituer, a ajouté le premier ministre, puisque le virus risque d’être là pour encore un bon moment.

... au bar et au restaurant

Oui, il faudra aussi porter le masque dans les restaurants et les bars, a confirmé François Legault. « Il y a des petits comiques qui disent : “Comment on peut faire pour manger si on a un masque ?” », a relaté le premier ministre. Il faudra porter le masque en entrant et en sortant du restaurant ou en se levant pour aller à la salle de bains, a-t-il indiqué. « Une fois qu’on est assis, qu’on est à deux mètres des autres, on peut l’enlever, son masque », a expliqué M. Legault.

Amendes de 400 $ à 6000 $

Québec veut d’abord miser sur la sensibilisation pour faire passer son message, mais s’en remet ensuite aux propriétaires de commerces, qui auront la responsabilité de s’assurer que leurs clients portent le masque. Les commerçants pourront recevoir des amendes de plus en plus salées si la règle n’est pas respectée. Le Conseil du patronat du Québec s’est inquiété lundi que le « fardeau » soit imposé aux employeurs, mais le gouvernement a précisé qu’il pourrait imposer des amendes aux clients dès le début d’août. « On ne peut pas mettre la responsabilité seulement dans les mains des propriétaires de commerces », a affirmé François Legault.

Intervention policière

Si un commerçant a maille à partir avec un client qui refuse de porter le masque, il pourra appeler la police, a fait savoir le premier ministre. « [Les commerces] n’ont pas besoin d’avoir quelqu’un avec des gros bras pour faire le travail, ils peuvent appeler la police », a-t-il déclaré. Il dit avoir bon espoir que les Québécois obtempéreront. Même si c’est une infime minorité de personnes qui ne respectent pas la règle, les « cas complexes » – par exemple, des clients rageurs – seront un stress pour le personnel, estime l’Association des détaillants en alimentation du Québec. « On va s’assurer que les clients portent le masque, mais on fait quoi si un client veut forcer l’entrée ? On ne veut pas appeler la police plusieurs fois par jour », dit son président-directeur général, Pierre-Alexandre Blouin. En réponse à ceux qui estiment que le masque brime leurs libertés individuelles, le premier ministre a rappelé que le Québec n’était pas à l’abri d’un reconfinement et d’une nouvelle fermeture des commerces. « Porter un masque, c’est ça, la liberté », a déclaré François Legault.

Les fêtes privées suscitent l’inquiétude

François Legault a aussi dénoncé lundi le fait que des « partys de 20, 30, 50, 60 personnes » ont toujours lieu un peu partout au Québec. « Ce n’est pas le temps de faire des gros mariages », a déclaré le premier ministre. À ce jour, peu d’amendes ont été données à des gens qui ne respectaient pas la limite de 10 personnes autorisées dans des rassemblements privés, mais le premier ministre a rappelé que c’était possible de le faire. « Ce n’est pas vrai qu’on va tout foutre en l’air le travail qu’on a fait depuis quatre mois à cause de quelques personnes qui veulent faire des gros partys », a dit M. Legault.

Une centaine de nouveaux cas au Québec

La pandémie de COVID-19 a causé une seule mort de plus au Québec au cours des 24 dernières heures, a-t-on annoncé lundi. Au cours de la même période, 100 nouveaux cas de COVID-19 ont toutefois été recensés dans la province, ce qui porte le total de personnes infectées à 56 621. Le nombre d’hospitalisations a quant à lui diminué, pour atteindre 305.

« Comme si la pandémie n’existait pas là-bas »

La justice ordonne la fermeture du bistro lounge Le Mondo, à Saint-Jérôme, en raison du non-respect des consignes sanitaires

Baisers langoureux d’une femme à plusieurs clients d’affilée, danses lascives et aucun contrôle : le risque de propagation de la COVID-19 dans un bar de Saint-Jérôme était si élevé que la justice a décidé, lundi, d’en ordonner la fermeture d’urgence.

Le bistro lounge Le Mondo a accueilli des manifestants anti-masques le 7 juillet dernier, mais c’est plutôt le non-respect des consignes sanitaires du gouvernement du Québec qui lui coûtera son permis d’alcool, au moins de façon temporaire.

La Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ) a obtenu la fermeture de l’établissement à la demande du Service de police de la Ville de Saint-Jérôme, qui constate depuis trois semaines que les règles imposées aux bars du Québec n’y sont pas appliquées.

« C’est comme si ça n’existait pas, la pandémie, là-bas », a expliqué le policier Nicolas Scholtus-Champagne, lundi, devant le tribunal administratif. « Le Mondo se démarque par son non-respect des consignes », a ajouté sa collègue, l’agente St-Laurent.

Avec d’autres policiers qui ont visité Le Mondo au cours des trois dernières semaines, ils ont constaté que la grande majorité du personnel ne portait pas de masque, que le bar accueillait davantage de clients que la loi ne le lui permettait et que la piste de danse était souvent bondée.

« On a même pu voir des clientes embrasser différents clients [sur la bouche] pendant la soirée », a témoigné la policière Élizabeth Desjardins. Sur la piste de danse, que la loi interdit pourtant d’utiliser, « les gens dansaient, se touchaient, étaient à une distance où ils se frôlaient », a ajouté l’agente St-Laurent. Aucun décompte des clients n’était fait à l’entrée, la distanciation physique était inexistante, et personne ne demandait à quiconque de se laver les mains à l’alcool, selon leurs témoignages.

« Difficile de rester assis »

Le Mondo est la propriété d’Antoine Villeneuve, propriétaire de bar de danseuses nues, qui en a récemment fait l’acquisition. La Presse avait déjà rapporté, vidéo à l’appui, que la piste de danse de son nouvel établissement était très utilisée malgré l’interdiction provinciale.

« Notre piste de danse est fermée », avait-il répliqué à la fin de juin. « Au début de la soirée, les gens restent assis. Mais plus la soirée avance, plus ils boivent, plus il est difficile de rester assis. »

Lundi, son avocat a tenté de faire reporter l’audition du dossier parce qu’il avait été avisé seulement samedi de la demande de fermeture d’urgence déposée par la Régie. Lorsque les juges administratifs ont refusé sa demande, acceptant d’entendre la cause sur-le-champ, MClaude Roy a quitté l’audience téléphonique, renonçant du même coup à faire entendre le point de vue de son client. Il n’a pas non plus rappelé La Presse.

« Il ne faut pas que Saint-Jérôme devienne un foyer d’éclosion avec un établissement comme ça », a plaidé MIsabelle Poitras, de la RACJ. « La Santé publique n’a pas eu le temps d’intervenir parce que c’est nous qui intervenons ce matin, on a été plus vite qu’eux. »

« Nous allons suspendre le permis », a décidé le juge administratif Marc Savard, à l’issue de la journée de lundi. « C’est assez sérieux pour le fermer [le bar], à tout le moins temporairement. »

Les policiers de Saint-Jérôme ont aussi allégué avoir pu identifier plusieurs criminels sur place, dont des membres de la section de Trois-Rivières des Hells Angels. Un plongeur se serait vanté aux policiers de son appartenance à un gang de rue d’allégeance bleue (Crips), et un homme récemment libéré de prison leur aurait ouvertement avoué qu’il consommait de la cocaïne.

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