Budget du Québec

Une douche froide sur le milieu communautaire

À la suite du budget déposé par le ministre Girard, le 25 mars, plusieurs organismes d’action communautaire autonome (ACA) vivent un mélange de déception, de colère et d’indignation. Les travailleuses et travailleurs poursuivront leur engagement envers leur communauté avec le sentiment d’être utilisés et avec un goût amer en bouche, celui de la sous-traitance forcée.

Après plus de 15 ans sans plan d’action gouvernemental en action communautaire (PAGAC), les organismes ont fait leur devoir ; c’est au gouvernement de passer de la parole aux actes. On nous a souvent dit : « Merci, vous faites du bon travail ! » On aurait pu s’attendre à voir nos efforts reconnus, mais non ! Pas d’argent stable pour faire face aux nombreux défis qui nous attendent avec la pandémie et, surtout, l’après-pandémie. Que des miettes ! Presque uniquement du financement ciblé, compliqué, non récurrent et qui ne répond ni aux besoins des organismes ni à ceux des communautés.

Après quatre ans d’augmentation graduelle du financement, on nous coupe soudainement les ailes. Il s’agit d’un choix politique inacceptable et injustifiable, en particulier pendant cette période difficile alors que les besoins sont plus criants que jamais. C’est d’autant plus irrecevable dans un contexte où le gouvernement s’était engagé à mieux soutenir les organismes, dès le printemps 2021, avec un nouveau plan d’action.

Après nous avoir froidement laissé tomber, il nous demande maintenant de patienter… jusqu’au prochain budget. Comment peut-on continuer à avoir confiance, avec les mains vides et tellement de promesses brisées en travers de la gorge ?

Dynamique et essentiel

Pourtant, avec ses 4000 organismes et ses 60 000 travailleuses et travailleurs, l’action communautaire autonome représente un secteur d’emploi important. Que dire des 425 000 bénévoles et militants.es qui démontrent à quel point les organismes communautaires répondent aux besoins de leur communauté. Le communautaire représente, pour plusieurs personnes en situation de vulnérabilité, à la fois le premier et le dernier maillon du filet social. Avant eux, il n’y avait rien et après eux, il n’y a plus rien non plus.

Plus agile que le réseau public, leur autonomie leur confère une capacité d’adaptation hors du commun qui a amplement été démontrée pendant la crise.

D’ailleurs, selon des données récoltées en octobre 2020, 71,8 % de la population les considère comme des acteurs clés pendant la pandémie et plus de 80 % souhaitent un meilleur financement par l’État.

Plusieurs acteurs politiques et de la société civile nous appuient et reconnaissent notre apport à la société : tous les partis de l’opposition, ainsi que les milieux syndical, étudiant, philanthropique, municipal et de la recherche. Tout le monde reconnaît la qualité remarquable du travail de ces groupes qui agissent sur tous les fronts : en santé et services sociaux, en environnement, en défense des droits, en logement, et ce, auprès des femmes, des jeunes, des familles, des autochtones, des personnes LGBTQIA2+, handicapées, réfugiées et immigrantes.

Pourquoi nous laisser tomber malgré le consensus qui existe autour de la nécessité de financer à la hauteur des besoins ?

Parce que le gouvernement nous tient pour acquis. Voilà pourquoi ! Mais ce mépris a assez duré. Le communautaire n’est pas dupe.

Nous en avons vu d’autres. Notre riche et longue histoire nous souffle à l’oreille que nous devons toujours être sur nos gardes, que la solidarité est payante et qu’il est possible de faire des gains !

Bien sûr, on ne laissera pas tomber notre monde. Nous serons là pour ramasser les pots cassés, souvent au péril de notre propre santé, à travailler dans des conditions extrêmement précaires qui mènent directement à la pauvreté. Mais le budget ne passe pas et le report du plan d’action gouvernemental en action communautaire non plus. Le communautaire n’a pas dit son dernier mot. Et c’est par la force de notre solidarité que nous répliquerons !

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.